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, Managua, Nicaragua, January 2009

L’éthique du soldat français : la conviction d’humanité

Sachant articuler l’expérience de terrain et la réflexion de fond, le colonel Royal est actuellement Conseiller communication du chef d’État-major de l’armée de Terre.

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Ref.: Benoît Royal, colonel de l’armée française, « L’éthique du soldat français : la conviction d’humanité », Ed. Economica, Paris 2008.

Languages: French

Contenu de l’ouvrage

Dans un contexte très conflictuel où les affrontements armés font preuve d’une violence barbare, les militaires se trouvent confrontés à un paradoxe entre la réflexion sur la responsabilité éthique des militaires dans l’utilisation de la violence et la construction de la paix d’une part et, d’autre part, les faits cruels qui s’imposent et qui s’affichent dans les médias : prison de Guantanamo à Cuba, massacres d’Hadithab en Irak, sévices de la prison d’Abu Graib, mort affreuse de civils en Palestine.

Les « bavures » dont certaines armées sont responsables, accompagnées des discours essayant de brouiller leur cruauté « frappes chirurgicales », « effets collatéraux », suscitent un vrai questionnement du point de vue du respect, non seulement du droit international et du droit de la guerre, mais aussi et surtout, du point de vue du respect de la dignité humaine.

A travers une série de 20 expériences concrètes, émouvants, poignantes, et même dérangeantes, y compris pour l’armée elle-même, ce colonel de l’armée française montre que l’un des enjeux de la mission actuelle du militaire concerne la question éthique.

L’auteur met en œuvre une articulation de trois approches :

  • Ethique, lorsqu’il parle de convictions et de valeurs ;

  • Morale, lorsqu’il aborde la question de la conscience ;

  • Philosophique, lorsqu’il aborde le besoin de construire du « sens ».

Articulation intéressante d’autant plus que celle-ci est proposée par un militaire.

Le « cœur » du livre est habité par le dilemme fondamental du soldat : d’une part, sa mission comporte le risque très probable d’être tué…. Ou d’avoir à donner la mort à un autre homme. Et, lorsque le soldat est un chef, la question est celle de porter seul la responsabilité éthique de voir ses soldats tués, ou de mettre en oeuvre l’acte de mort collectif de l’autre comme un acte planifié, voulu… D’autre part, le fait que, dans de telles situations, des repères éthiques émergent, de véritables cas de conscience se posent…

L’auteur est conscient que de sentiments d’orgueil, de puissance, d’arrogance, peuvent faire qu’un soldat ne se pose plus la question de sa responsabilité éthique. Que lorsqu’un militaire, ou une armée, agit d’abord en fonction de ses désirs de vengeance ou de ses sentiments de haine, la violence deviendra aveugle, barbare, et autoreproductrice : celle-ci sera un facteur de destruction, autant de l’ennemi que du soldat lui-même. En même temps, il montre la difficulté à comprendre la démarche militaire dans une situation de guerre, en raison de la complexité des situations : comment réagir devant un fanatique religieux prêt à se faire exploser en tuant des civils innocents car, pour lui, c’est le meilleur moyen « d’aller au paradis » ? Ou devant un adversaire qui utilise femmes, enfants, vieillards, comme bouclier humain ? Ou devant un ennemi qui se sert de vos convictions éthiques et de vos valeurs pour vous tuer ?

Face à ce dilemme, l’auteur parle d’une conviction d’humanité : « même en face d’un barbare, un soldat digne de ce nom ne doit pas céder à la barbarie », affirme l’auteur sans aucun détour.

L’éthique du soldat, selon lui, doit reposer sur le respect absolu de la vie et de la dignité de la personne humaine, de toute personne humaine.

La réflexion est encore enrichie grâce à une préface du professeur Henri Hude, directeur du pôle éthique pour la formation des militaires français à l’école militaire Saint-Cyr, et d’une postface remarquable du Général Bachelet, ancien inspecteur général des armées.

Commentary

Il s’agit d’une excellente présentation des paradoxes et des dilemmes vécus par les militaires qui, en situation de combat, continuent à porter des valeurs et à croire qu’un soldat doit être soucieux autant d’efficacité pour gagner les batailles que d’humanité pour respecter l’autre et, d’abord, pour se respecter soi-même.

Cet ouvrage est une bonne illustration de l’approche éthique de l’humanisme militaire français qui aurait bien vocation à être mieux connue par des responsables militaires d’autres pays, ainsi que de toute personne exerçant de responsabilités dans la construction d’un monde plus juste et plus pacifique.