Larbi Bouguerra, La Corniche Bizerte, August 2007
Projet SOUNDOUS au Soudan
Pour affirmer ses droits sur les eaux du Nil et réaliser des projets importants comme l’Egypte, son voisin du nord, le Soudan se lance dans un grand projet ouvert aux investisseurs étrangers.
Ref.: Emission de la télévision satellitaire en langue arabe Al Jazeera de Qatar en date du 31 juillet 2007 à 17h30 (heure de Tunis)
Languages: Arabic
Document type: Video
Au sud de la capitale Khartoum, les ministères chargés de l’agriculture, de l’irrigation, du tourisme, de la planification… sont en train de mettre en place un grand projet agricole dont le moteur vital sera l’irrigation avec les eaux du Nil. Le coût de ce projet est de 75 millions de dollars américains. Il vise l’irrigation de 100 000 feddans (un feddan est une mesure de surface courante dans les campagnes égyptienne et soudanaise et vaut approximativement un tiers d’ha) pour l’agriculture, l’élevage et même le tourisme ; le Soudan voulant faire connaître qu’il renferme aussi des vestiges pharaoniques de tout premier plan essaie d’attirer la manne touristique. Il n’en demeure pas moins que l’intérêt économique de ce projet est discuté tant par la société civile que par les spécialistes de l’agriculture, de l’irrigation, des sociologues… Pour certains, son principal intérêt est de permettre aux investisseurs étrangers – notamment ceux du Golfe, très présents dans le pays - de réaliser des profits.
Pour les responsables politiques, le projet Soundous a un attrait supplémentaire : affirmer les droits du Soudan sur les eaux du Nil. Le projet ne demandera pas moins de 1 à 2 milliards de m3 d’eau par an.
Commentary
Le Soudan, en dépit des apparences « fraternelles » avec l’Egypte, le grand voisin du nord, n’a jamais digéré l’accord de 1959 sur le partage des eaux du Nil qui octroie la part du lion au Caire. Cet accord a été, en effet, signé avant l’indépendance soudanaise. Tous les moyens sont donc bons pour montrer que le pays utilise effectivement sa quote-part voire qu’il a besoin de plus d’eau. D’où le projet Soundous.
Par ailleurs, la situation politique n’est guère au beau fixe avec Le Caire. Le pouvoir à Khartoum est très proche des islamistes, bêtes noires du Caire qui les pourchasse avec la dernière énergie. Mais, il ne faut pas être manichéen car la situation est fort compliquée : l’actuelle crise du Darfour pose un dilemme au pouvoir d’un Moubarak vieillissant. Il y a, d’une part, les exigences de Washington, opposé au pouvoir soudanais – qui est soutenu par Beijing qui exploite ses hydrocarbures - et qui fournit au Caire une aide considérable, la deuxième en importance dans la région après celle octroyée à Israël, d’autre part, Moubarak ne veut pas s’aliéner ouvertement Khartoum à cause précisément du partage des eaux du Nil, entre autre.
Dernier point à signaler : tout projet d’irrigation dans la vallée du Nil est potentiellement porteur du risque de bilharziose, une grave affection de l’arbre urinaire. Il est à espérer que le projet Soundous formera à cet égard les agriculteurs – en leur recommandant notamment de se garder d’uriner dans les canaux ou d’y travailler pieds nus - et leur fournira l’assistance médicale nécessaire.