Marly-le-Roi, juillet 2007
Reconnaissance par la France de l’intervention civile de paix
Une reconnaissance indispensable à la réussite d’une gestion de crise.
I. L’intervention civile de paix reconnue par la France
La France doit participer et promouvoir cette dynamique de résolution des conflits qui se développe déjà sur le plan international, européen et dans plusieurs pays. Pour cela, elle doit reconnaître et soutenir la mise en œuvre de l’ICP, contribution efficace à la construction et au maintien de la paix dans le monde.
Cette reconnaissance officielle doit s’accompagner de la reconnaissance des intervenants civils de paix et de la promotion d’une formation spécifique, garante de leur sécurité et d’un impact réel sur le terrain.
Ces deux conditions doivent être remplies pour que les volontaires puissent réaliser dans les faits leur volonté de s’engager pour la paix et la solidarité internationale.
II. L’intervention civile de paix, un moyen de gestion des crises
La France s’investit à plusieurs niveaux dans la gestion des crises : diplomatique, militaire, contributions financières aux organisations européennes, internationales et ONG humanitaires. Cependant, cet engagement est insuffisant dans la mesure où il ne concerne que trop rarement le soutien aux initiatives de paix des organisations des sociétés civiles locales. La reconnaissance et le soutien de la France à des missions ICP permettraient de renforcer cette connexion indispensable à la réussite d’une gestion de crise.
En effet, le rôle des organisations de la société civile des zones de conflit et des pays du Nord est aujourd’hui largement reconnu aux niveaux multilatéraux, européens ainsi que chez certains de nos voisins.
A. Une réelle entrée dans la dynamique européenne et multilatérale
Un rapport de la Banque mondiale affirmait récemment qu’« Aujourd’hui, la principale question dans le débat international n’est plus de savoir si la société civile a un rôle à jouer dans la consolidation de la paix, mais comment la société civile peut réaliser de la meilleure manière qui soit ses contributions bénéfiques ».
De même, dans son rapport sur la prévention des conflits armés (2001), Kofi Annan, souhaitant encourager les Nations unies à passer d’une « culture de réaction » à une « culture de prévention », appelait les ONG concernées par la question à s’organiser pour envisager une collaboration étroite. Cette mobilisation est effective depuis 2004 sous la forme d’un « Partenariat global pour la prévention des conflits armés ».
Enfin, pour envisager un renforcement de sa collaboration avec les organisations de la société civile, l’Union européenne s’est impliquée, depuis 2005, dans la mise en place d’un « Partenariat pour la Prévention des Conflits » et depuis 2006 dans la mise en place d’un « Partenariat pour la Consolidation de la Paix ».
Les organisations de la société civile sont donc les mieux à même de comprendre des dynamiques locales et ainsi d’opérer un travail efficace auprès des acteurs locaux, de façon indépendante, impartiale et en toute équité.
B. Des pays voisins déjà engagés
Plusieurs États reconnaissent l’intervention civile de paix et ont mis en place des cadres favorisant leur intervention dans des zones de conflits :
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L’Allemagne a institutionnalisé l’intervention civile de paix en 1998 en créant un Service civil de paix. Placées sous l’égide du ministère de la Coopération, des ONG allemandes accréditées envoient des volontaires pour une durée minimum de 2 ans après une période de formation de 4 mois. En 2005, 130 projets d’intervention civile de paix ont été menés en Afrique, Asie, Amérique latine, au Moyen-Orient et dans les Balkans.
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Le gouvernement catalan a adopté une loi (29 novembre 2006) sur la création d’un Institut de civils pour la paix dont le but est de former des futurs volontaires de paix, sur l’éducation à la culture de paix et sur la création d’un corps européen de volontaires de paix.
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En Italie, des associations italiennes mènent des programmes de réconciliation au Kosovo, à Chypre et en Géorgie dans le cadre du service national civil.
Alors même que l’intervention civile de paix est devenue un instrument pertinent et efficace de résolution des conflits et de construction de la paix, il doit être maintenant reconnu en France.
III. L’intervention civile de paix, volontariat de solidarité internationale
A. L’intervention civile de paix et la loi sur le volontariat international
La loi du 14 mars 2000 reconnaît la contribution des volontaires à la politique de paix de la France mais en raison de sa complexité, elle n’a pas eu de suite. La loi n° 2005-159 du 23 février 2005 relative au contrat de volontariat de solidarité internationale, instaurant un nouveau contrat de volontariat correspondant aux activités des organisations non-gouvernementales d’action humanitaire et de coopération au développement, permettrait la reconnaissance de cette intervention pour la paix.
Cette loi offre un cadre satisfaisant au déploiement de volontaires dans des contextes similaires à ceux d’une intervention civile de paix, c’est-à-dire hors Union européenne, dans des zones de conflit ou de tensions sociales et politiques.
Cependant, la spécificité des missions qui constituent une intervention civile de paix, l’importance fondamentale accordée à la formation des futurs volontaires nécessite un développement complémentaire pour permettre à ces intervenants de partir dans les meilleures conditions possibles.
B. Pas de missions d’intervention civile de paix sans formation
L’efficacité des missions ICP ainsi que la sécurité des volontaires civils dépendent à la fois du soutien international que les ONG reçoivent en situation de crise et de la formation préalablement suivie par les volontaires.
Elle doit permettre aux citoyens de tous âges d’acquérir et de développer des capacités, aptitudes et qualités nécessaires à la conduite d’une mission d’intervention civile de paix en zone de conflit armé.
En France, seules les formations dirigées par les institutions européennes à destination d’experts civils et militaires sont prises en charge publiquement. Il s’agit de la formation sur les aspects civils de la gestion des crises délivrée par l’ENA.
Cependant, cette formation s’adresse à des personnes, généralement issues de l’administration, qui ont pour vocation à être détachées auprès des institutions intérimaires, européennes ou multilatérales, sur des zones de post-conflit et à remplir des fonctions essentiellement administratives.
Or le comité ICP propose une formation globale, qui s’adresse à un public plus large, devant participer à une mission ICP. Les objectifs pédagogiques sont différents et orientés vers l’acquisition d’aptitudes personnelles à gérer des situations et un environnement de tension et de conflit. Cette dimension de la formation est capitale puisqu’elle doit permettre aux futurs volontaires d’exercer le mandat de leur mission de manière sereine, rationnelle sans céder aux diverses pressions qui sont le fait de leur zone d’intervention.
La formation qui a été définie par les organisations membres du Comité ICP comprend trois modules d’une durée d’une semaine chacun. Elle aborde les questions de :
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Compétence individuelle : gestion du stress, médiation, communication non-violente, principes de la non-violence ;
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Travail en équipe dans les situations de tension et d’urgence : coordination et animation d’équipe, prise de décision, modération, régulation des conflits interpersonnels ;
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Mandat de la mission du volontaire : fonction durant la mission, contexte d’intervention, gestion des aspects sécuritaires, coordination avec les autres acteurs de terrain, etc.).
La formation ICP a donc pour but de préparer les volontaires aux conditions d’exercice de leur mission, sur le terrain et auprès des populations et acteurs locaux, en toute sécurité.