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Modus Operandi
1. L’approche psycho-sociologique a permis de mettre en évidence trois catégories de variables explicatives de l’émergence des frustrations et du risque élevé du passage de la frustration à la violence qui valident nos hypothèses :
2. Les conflits précédents laissent le corps social meurtri et déchiré. Les deux communautés en cause, en l’occurrence Kotoko et Arabes Choa, sont séparées au pire par la haine et au mieux par la suspicion alors qu’elles sont appelées à vivre ensemble dans un même espace. Pour reprendre à notre compte une image de Simmel, on y semble sur un pont reliant la rive du conflit et la rive de la paix.
3. Cette proximité imposée dans un contexte où la réconciliation est loin d’être solidement assise, génère une très forte susceptibilité dans les conflits sociaux pouvant opposer isolément des individus appartenant aux deux communautés.
4. De sorte que de l’avis général des personnes rencontrées au cours de notre enquête, la moindre altercation, ou rixe entre deux personnes, pour peu qu’elles appartiennent respectivement aux deux communautés peut, dans certains contextes, être récupérée, amplifiée et propagée dans les artères des quartiers, comme un feu de brousse par la rumeur, ameutant des combattants improvisés, de sorte que très rapidement on peut passer à une émeute avec des suites imprévisibles où la dimension physique de l’affrontement catalyse de fortes solidarités où l’ennemi est tout désigné.
5. Ce, selon un schéma d’ailleurs généralement établi où il apparaît que l’une des caractéristiques majeures du passage collectif à la violence directe, c’est d’être toujours “simplificatrice”, d’exacerber la coupure entre amis et adversaires, entre l’in-group et l’out-group par rapport auquel le groupe protestataire compare sa situation et définit sa frustration. Avec en corollaire la sommation redoutable à devoir “choisir son camp”.
6. On rentre facilement dans une logique de justice expéditive, de lynchage, de pogrom, où selon René Girard (1972) ”La désignation du bouc émissaire obéit à une logique spécifique : non pas une victime coupable mais une victime sacrifiable. Les victimes ne sont pas choisies en raison des “crimes” qu’on leur attribue mais des “signes victimaires” qui les caractérisent. Elles sont à la fois “différentes” de l’in-group, mais présentes et visibles à ses yeux ; elles appartiennent par exemple à une minorité différenciée ». “Lorsque un groupe humain, ajoute Girard, a pris l’habitude de choisir ses victimes dans une certaine catégorie sociale, ethnique, religieuse, il tend à lui attribuer les infirmités ou les difformités qui renforceraient la polarisation victimaire si elles étaient réelles”.
7. Par conséquent, les conflits intercommunautaires ont trois particularités fondamentales distinctives du point de vue de leur configuration polémologique :