Cyril Musila, Paris, mayo 2003
Cultures
Reconnus en tant que moyen fondamental qui forge l’identité des peuples, les facteurs culturels sont souvent utilisés comme un tison enflammé dans les conflits ou les tensions qui existent en Afrique. Les aspects les plus couramment observés de ce genre de conflits culturels ou ethniques sont visibles dans tous les types de crises foncières. Là, l’identité culturelle, exprimée à travers la langue, la religion et d’autres signes distinctifs, est utilisée comme l’élément qui sert à définir l’ennemi ou à se définir comme la victime. Ce processus atteint, l’affrontement devient inéluctable en terme de « c’est nous ou c’est eux ».
Mais les conflits culturels africains se sont souvent aussi manifestés en terme de « résistance » d’un groupe (dominé ou en voie de l’être) contre une culture dominante. Cela est perceptible dans un certain nombre de pays où les antagonismes se sont servis de l’identité religieuse des populations. Ici, c’est le traitement constitutionnel de la religion et des droits humains qui déchaîne les attaques et les tueries. Ailleurs, c’est l’usage de l’ethnicité et donc de la culture qui a servi à distinguer les citoyens en « zones » : les citoyens de « souche » et les « autres », citoyens de seconde zone. Cette distinction était surtout culturelle et liée à l’appartenance ethnique. Politisée, la culture a été utilisée pour empêcher certains de voter ou d’être élus, parce qu’identifiés comme des étrangers.
Si dans certains cas les arguments culturels et identitaires sont utilisés par les institutions étatiques contre des groupes ethniques, dans certains autres au contraire, ce sont ces derniers qui exploitent leur appartenance pour déclencher des violences contre l’Etat central. En effet, les luttes séparatistes armées de certaines régions s’appuient sur l’évocation de la marginalisation politique et économique dont ils accusent leurs gouvernements respectifs de maintenir leurs communautés. Ces identités correspondent à des territoires dont les principales têtes d’affiche réclament l’autonomie et l’indépendance.
L’enjeu culturel figure donc parmi les défis majeurs de la gestion de conflit et de la paix. Il s’agit de mettre en avant le soubassement culturel et anthropologique des sociétés, en l’occurrence mettre en scelle au sein des Etats les systèmes par lesquels les groupes villageois ou ethniques recherchent la cohésion sociale, leurs modes de prévention et de résorption des tensions.