Paris, octubre 2001
La formation des volontaires en France
Ce n’est qu’un début, continuons la formation ! Le Comité français de l’intervention civile de paix, créé en I997, a confié les formations 2000, 2001 et 2002 à l’Institut de recherche et de Formation du Mouvement pour une Alternative Non-violente (IFMAN), organisme de formation qui depuis une dizaine d’années intervient surtout auprès des travailleurs sociaux et des enseignants.
Keywords: Intervención civil de paz | Capitalización de conocimientos prácticos (savoir faire) para la paz | Experiencias compartidas y paz
La première formation des volontaires (année 2000)
Le financement de cette première formation a été assuré en partie par la participation personnelle des stagiaires ou de l’organisme qui prévoit de les envoyer en mission, et pour l’essentiel par les subventions de deux Fondations privées et d’une ONG.
La formation 2000, précédée d’un week-end de présentation et de sélection, a duré 25 jours et a regroupé 11 stagiaires.
Le pari pris par le Comité de gestion de l’Intervention civile de paix pour la formation 2000 était risqué : première initiative de ce type en France, première formation de ce type pour l’IFMAN, absence de soutien politique et financier des pouvoirs publics, risque d’un nombre insuffisant de participants, organisation en week-ends pour permettre la participation de personnes qui ne voulaient ou ne pouvaient pas interrompre leurs activités professionnelles…
Ce pari a été gagné : les participants ont été satisfaits de ce qu’ils ont vécu et appris, la première expérience a permis de pointer les améliorations à apporter à l’avenir.
Objectifs de la formation 2001
La durée de la formation 2001 a été maintenue à 25 jours.
Les objectifs assignés à la formation 2001 étaient les suivants :
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1) rendre les stagiaires capables de contruire leur mission d’ICP en terme d’objectifs opérationnels, de moyens à mettre en œuvre, de capacité d’évaluation de leur propre action
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2) rendre les stagiaires capables de maîtriser différents phénomènes psychologiques individuels et collectifs au sein d’un groupe de travail exposé à des difficultés relationnelles
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3) donner aux stagiaires des savoir-faire sélectionnés en fonction des publics visés par leur mission
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4) alimenter le désir d’un engagement comme volontaire pour une mission d’ICP.
Ce qui a été le plus novateur en 2001 a été le soutien actif et la participation de l’armée française par l’intermédiaire du Commandement des Organismes de Formation de l’Armée de Terre (COFAT), dont un officier a animé une journée. Par ailleurs, un des 18 stagiaires était un lieutenant-colonel d’active.
Bilan de la formation 2001
18 stagiaires ont participé à la formation, 12 hommes et 6 femmes, âgés de 21 à 52 ans, de professions très diverses. Plusieurs d’entre eux avaient une expérience à l’étranger, et deux une expérience d’intervention civile.
Globalement, le bilan est très satisfaisant. Les stagiaires estiment que la formation leur a été très profitable pour se préparer à des missions d’intervention civile, mais aussi au plan de la culture générale et du développement personnel.
Les stagiaires étaient très différents par leur âge, leur look extérieur, leur niveau de formation, leur profession, leur expérience de terrain à l’étranger, leur sensibilité politique… Non seulement le courant est bien passé, mais il s’est créé une véritable synergie et une complicité qui font partie des facteurs de réussite d’une formation.
La durée, 25 jours, a été globalement jugée satisfaisante, mais beaucoup ont demandé des modules supplémentaires qui la porteraient à 35 jours à l’avenir : module sur la médiation, module de confrontation avec le sang, la souffrance et la mort, module d’expérimentation du stress, de la peur et des comportements de sécurité.
La période de 15 jours consécutifs a été jugée nécessaire pour que les membres du groupe soient obligés, comme en mission « sur le terrain », de se supporter mutuellement, de gérer leurs tensions et leurs conflits, de définir des règles d’organisation et de fonctionnement du groupe. De ce point de vue, la session a été riche de conflits et d’enseignements sur la façon de les gérer…
Concernant l’évaluation des capacités des stagiaires, la méthode adoptée comprenait quatre étapes :
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un travail en groupe sur les capacités, aptitudes et qualités nécessaires pour une mission d’ICP (Voir encadré)
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un travail d’auto-évaluation de chacun par rapport à ces capacités
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un partage en petits groupes avec évaluation de chacun dans l’exigence et la bienveillance
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un entretien individuel entre le stagiaire et le coordinateur.
La formation ICP 2001 marque le début d’une véritable concertation entre l’armée, les militants de la non-violence et les ONG humanitaires dans la préparation des intervenants civils et militaires, et peut-être à terme dans les stratégies d’intervention dans les régions en crise.
L’intervention civile prévient les affrontements armés, observe les violations des droits de l’homme, accompagne les personnes menacées, sépare les belligérants, facilite le dialogue pour une résolution politique et pacifique des conflits, aide à la reconstruction de liens entre les populations civiles hostiles …
L’armée fait cesser des violations des droits de l’homme quand la contre-violence s’avère nécessaire, mène certaines opérations spécifiques (déminage, désarmement des factions armées, fouilles de voitures, opérations de police, arrestation des responsables de crimes contre l’humanité, des incendiaires ou des pilleurs…), et aide les intervenants civils et humanitaires, notamment par ses moyens logistiques : transports aériens, véhicules tout terrain, tentes, cantines, blocs opératoires, matériel de transmission…
L’action humanitaire traite les conséquences d’une guerre ou d’un génocide : accueil des réfugiés, aide alimentaire, adduction d’eau, hygiène, soins aux blessés, prévention et traitement des maladies, accompagnement psychologique des personnes victimes de traumatismes ou de deuils.
Enfin, les stagiaires ont décidé la constitution d’une association de volontaires pour des missions d’ICP. Les objectifs de cette association seront notamment l’information mutuelle sur les missions effectuées par chacun, l’information sur les offres de missions, l’aide et le conseil pour la recherche de financements, l’interpellation des pouvoirs publics pour développer l’ICP.
Contenu de la formation 2001
Apports « théoriques »
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Jacques Sémelin - CNRS
Les concepts de base, la lutte non-violente, exemples historiques
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Commandant Régis Colcombet - COFAT
Le rôle de l’armée, la gestion du stress, le cadre conceptuel des actions militaires, les actions civilo-militaires (ACM), mise en situation
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Christian Mellon - Justice et Paix
Géopolitique des conflits avant et après I989, l’ingérence, exemples contemporains de résistance civile
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Guy Aurenche - ACAT
Les droits de l’homme
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Pierre Dufour - Equipes de Paix dans les Balkans
Les Balkans : histoire et géopolitique, mise en situation
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Jean-Marie Muller - MAN
Philosophie de la non-violence, les concepts de base, la fin et les moyens, les alternatives à la violence, stratégie de l’action non-violente
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Bruno-Marie Duffé - Institut des Droits de l’Homme de Lyon
Signification et déontologie de l’action humanitaire
Apports « pratiques »
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Agnès Delclaux - Reliance
Respiration et relaxation, sentir et gérer ses émotions, faire le poids, s’enraciner, se ressourcer, se centrer, rester souple, le système nerveux et le stress, dire non avec fermeté, accueillir le chaos émotionnel de l’autre…
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Etienne Godinot - IFMAN
Exercices sur la communication non verbale, la perception, la déformation de l’information, la capacité d’oubli, les systèmes de valeur et la subjectivité, les attitudes d’écoute, la reformulation, le langage non verbal, la confiance en soi et en l’autre, le message « je…", la prise de parole en public
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Hervé Ott - Culture Communication Conflits
Le travail en groupe, conflits d’intérêt et conflits de personnes, fonctions et rôles, définition et contenu d’une responsabilité, les modes de partage des responsabilités, exercice de décision rapide en groupe, les antagonismes fondamentaux dans les groupes, les processus d’inclusion et d’exclusion
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Philippe Beck - PBI
Sens, cadre et conditions d’une présence internationale, le mandat de PBI, ses principes d’action, exercices sur l’impartialité, le principe de discrétion, la sécurité, l’analyse politique d’une situation, les conditions et les modalités des missions PBI, les groupes de soutien
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Jean-Jacques Samuel - IFMAN
Travail sur les situations de peur, mises en situation de conflits, exercice de prise de risque, rôle de la peur, attitudes face à la peur, le mimétisme dans l’affrontement, gérer les crises émotionnelles, exercices « perception et sensations », « faire face à la provocation »
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Jean-Pierre Veyrenche - Bioforce
La machine humanitaire, comportement en situation d’insécurité, organisation technique et logistique d’une mission, géopolitique de l’eau, médias et communication, départ, santé, retour
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Etienne Godinot - IFMAN
La démarche de projet, évaluation individuelle et collective
Animation du groupe de parole
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Chantal Lamotte, psychologue à l’Ecole Nationale de Police de St-Cyr-au-Mont-d’Or
Projets professionnels et de mission ICP des stagiaires
En l’absence de dispositions légales sur le statut des volontaires, les stagiaires essayent généralement de faire cohabiter le mieux - ou le moins mal possible - une mission d’intervention civile et leur activité professionnelle. Les situations et les choix sont très diversifiés.
On peut classer en trois groupes les projets de mission :
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Projets précis de mission à court terme (dans un délai de 12 mois) : au Kosovo ou en Macédoine, au Guatémala, missions à dominante humanitaire en Afrique ou en Amérique latine …
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Missions d’intervention civile restant à définir et à moyen terme (d’ici 2 ans) : au Proche-Orient, en Amérique latine, au Kosovo
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Missions non définies et à long terme (d’ici plus de 2 ans) : en Amérique latine, en Afrique, au Kurdistan, au Proche-Orient, en Colombie, en Algérie…
Perspectives pour les formations futures
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Tant qu’il n’existera pas un financement sérieux de la formation, sur fonds publics, avec une assurance de durée, il sera très aléatoire d’organiser de telles formations, et à plus forte raison illusoire de prévoir des formations spécifiques selon trois niveaux de mission.
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Le problème du statut des volontaires se pose également si les organisateurs veulent accueillir davantage de candidats : par exemple, des salariés qui voudraient pouvoir partir en mission dans le cadre d’un congé légal et reprendre sans difficulté leur activité professionnelle chez leur employeur à leur retour.
L’intervention civile est une réponse pertinente, relativement facile à mettre en œuvre et finalement peu coûteuse, face à tant de conflits armés qui ont existé récemment (ex : Balkans), qui sont en cours (ex : Israël-Palestine, Soudan) ou qui menacent d’exploser (ex : Cachemire) sur une grande partie de la surface du globe.
Nous ne sommes qu’au tout début de l’histoire des interventions civiles non-violentes.
La formation des intervenants civils nécessite des moyens importants si l’on veut qu’elle soit de qualité et qu’elle s’adresse à des volontaires de plus en plus nombreux. Il s’agit là d’un choix éminemment politique.
Capacités, aptitudes et qualités nécessaires pour une mission d’intervention civile de paix
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Bonne santé et endurance physique
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Equilibre psychologique
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Gestion et maîtrise de ses propres émotions
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Connaissance de soi-même
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Savoir s’arrêter, décompresser
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Connaître ses propres limites
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S’auto-évaluer
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Impartialité
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Connaître son mandat et s’y tenir
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Ne pas juger les personnes
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Capacité d’adaptation
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Capacité d’analyse des situations
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Capacité d’adaptation aux situations
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Capacité d’adaptation aux populations, coutumes, conditions de vie
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Capacité d’observation, de vigilance
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Capacité à reconnaître le danger
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Bon sens
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Capacité à la prise de décision rapide
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Capacité au travail et à la vie en groupe
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Capacité à savoir dire et entendre les remarques, les critiques
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Disponibilité
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Capacité d’animer une réunion
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Autodiscipline, sens des responsabilités
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Communication
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Capacité d’écoute, de dialogue, de remise en cause
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Capacité de communication avec les ONG, populations locales, institutions
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Capacité à parler la langue locale et/ou l’anglais
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Commentario
Propos issus des actes du colloque : Intervention civile de paix, Assemblée Nationale, 2001.