Virginie Rouquette, Paris, juin 2005
Pratiques de médiation. Auteur : Association "Non-violence actualité".
Écoles, quartiers, familles, justice : une voie pour gérer les conflits.
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Réf. : Editions Charles Léoplold Mayer, Paris, 2000
Langues : français
Type de document :
L’ONU et l’UNESCO dédient la décennie 2000 à la promotion de la non-violence et de la paix pour les enfants dans le monde.
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Le dossier réalisé par l’association Non-violence actualité apporte sa contribution à la cause en proposant une réflexion sur les pratiques de médiation.
L’ouvrage se présente sous la forme d’un recueil de témoignages d’acteurs issus d’horizons très variés, engagés, selon des modalités différentes, dans des missions de médiation.
En confrontant leurs témoignages, l’association souligne d’une part, l’utilité de la médiation dans une société soumise à des phénomènes d’érosion du lien social et d’affaissement du sentiment civique et, d’autre part, la diversité des formes qu’elle peut recouvrir en fonction des contextes dans lesquels elle intervient.
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Si les récits rassemblés par l’association restituent avant tout la variété d’une pratique, l’ouvrage va en réalité plus loin en mettant en exergue les dimensions sociale, politique voire philosophique qu’implique la médiation.
Après avoir rappelé le caractère naturel du conflit dans les relations humaines et donc relativisé son impact négatif, les auteurs remarquent que l’introduction d’une tierce personne lors de la recherche d’une résolution pacifique d’un conflit, est une solution ancienne et commune à de nombreuses cultures. En transformant une relation binaire dans l’impasse en relation ternaire, le médiateur engage les parties en conflit à reconsidérer leurs positions sous un nouvel angle, en restaurant l’idée qu’une solution existe, que celle-ci doit provenir des opposants eux-mêmes et qu’elle est préférable à la poursuite d’une confrontation frontale.
La médiation, comme pratique, provient des Etats-Unis. Elle est introduite en France au milieu des années 1980 et s’est peu à peu diffusée dans divers pans de la vie sociale. L’ouvrage insiste sur cette pluralité des contextes dans lesquels la médiation s’avère être un recours pertinent pour la résolution d’un différend.
Dans le cadre scolaire, elle apparaît comme une modalité adaptée au règlement des conflits dans la mesure où elle se base sur la pédagogie de l’éducation plutôt que la sanction ou la dépossession du conflit par une autorité extérieure et/ou supérieure. Selon les expériences, le médiateur peut tout aussi bien être un adulte, choisi pour son indépendance à l’égard des parties ou au contraire, un ressortissant direct de l’école (collégien, lycéen, voire écolier).
La médiation familiale, dans un contexte de croissance du nombre des divorces, permet de dépasser la logique de guerre pour restaurer le dialogue et surtout remettre l’enfant au centre de la recherche de solutions.
Autre déclinaison de la médiation, certaines municipalités ont mis en place, sur une initiative politique, des groupes de médiateurs dans le but d’éviter le recours aux tribunaux et d’améliorer la qualité de la vie en communauté. Cette médiation une fois encore s’adapte aux contextes (elle peut être interculturelle, sociale, elle peut se dérouler en entreprise) mais elle a toujours pour objectif commun de renverser la logique de confrontation en rendant aux acteurs, par le dialogue et la recherche de compromis, la gestion (et la résolution réfléchie et pacifique) de leur problème. En ce sens, la médiation redonne confiance aux personnes en conflit et rend la logique d’assistanat inutile.
Aux dires des praticiens, le bilan global de ces expériences est positif. La médiation aboutit régulièrement à une solution satisfaisant les deux parties, se dégageant de la logique "gagnant-perdant".
Dans les écoles ou les quartiers dits sensibles, on observe une diminution du recours à la violence et des actes de délinquance.
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La médiation responsabilise et redonne aux parties en conflit une maîtrise raisonnée de leur relation en changeant les perspectives sur le différend qui les sépare. Elle constitue en ce sens une alternative, reconnue comme telle par les citoyens, à la résolution d’un conflit par la violence ou le recours direct à la justice.
Les expériences montrent néanmoins que les chances d’aboutir favorablement sont multipliées quand l’environnement de la médiation se montre favorable à cette procédure.
Commentaire
Plusieurs questions restent sans réponse arrêtée à l’issue de cet ouvrage incitant à poursuivre la réflexion afin d’améliorer les futures pratiques de médiation.
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La plupart des acteurs s’accordent sur la nécessité d’une formation du médiateur.
Cependant les conceptions de celle-ci varient : les connaissances en matière de droit doivent elles être privilégiées à celles portant sur les questions sociales, voire même éthiques et psychologiques ? Ces questions amènent à s’interroger sur le statut du médiateur. Le statut de bénévole, s’il laisse une marge de manœuvre, prive néanmoins son détenteur de reconnaissance, menaçant par là même la pérennité de la pratique…
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Des limites ?
Au-delà de la simple pratique, la médiation ne peut-elle pas se révéler dangereuse, en relativisant l’importance de principes considérés comme universels ?
La médiation est une pratique encore jeune. Son avenir sera celui que lui forgeront ses partisans et praticiens. Aujourd’hui, il oscille entre deux types d’évolutions. La médiation peut en effet s’orienter vers une logique conservatrice (par la recherche d’un "moins pis"), ou au contraire, aller dans le sens d’une logique profondément réformatrice, en dépassant totalement le blocage initial.
Au-delà des questionnements, l’ouvrage est un plaidoyer en faveur de la médiation, en tant que démarche résolument citoyenne et responsable.
En mettant au centre de la démarche la recherche non-violente d’un meilleur "vivre ensemble" par la recherche d’une réconciliation durable, l’association rappelle que la volonté et le dialogue sont encore les armes les plus affûtées dans la recherche d’une résolution d’un conflit.