Algérie tisser la paix : huit défis pour demain.

Le premier défi de cette rencontre est celui de la parole, de pouvoir faire parler, faire s’écouter sans enjeux de pouvoir, sans enjeux de convaincre. Les participants sont donc invités à exprimer leurs points de vue à partir de leur propre expérience et ainsi esquisser des éléments de la stratégie de paix pour reconstruire l’Algérie.

Pour élaborer cette stratégie, il s’agit d’établir un diagnostic qui peut se définir comme la reconnaissance de la dimension culturelle de la violence en Algérie, et ce, à tous les niveaux de la société.

Pour remédier à cet état de fait, la redéfinition des missions de l’école est nécessaire. L’école algérienne n’a pas su produire ses propres valeurs et s’est contentée de reproduire une culture importée par une méthode d’apprentissage du "par cœur" en décalage total avec la société dans son ensemble. Les intervenants parlent d’"analphabètes bilingues !".

Cette école doit s’adresser aux jeunes qui parfois se réfugient dans le refuge identitaire à la recherche de nouveaux repères. De même, il s’agit de redonner confiance dans la "chose publique" en inventant des lieux de médiation entre les jeunes et les administrations, les banques ou les guichets de toutes sortes.

Pour intégrer les jeunes à la société algérienne, celle-ci doit s’ouvrir à trois niveaux : "Ouverture vers l’autre (espace et éloignement culturel). Ouverture vers le temps (passé et avenir). Ouverture à l’intérieur et à l’extérieur de l’Algérie".

C’est par cette ouverture que l’identité des algériens se construira en dehors des idéologies autoritaires qui mutilent "le savoir, l’héritage et la religion des familles au profit d’un arabo-islamisme réducteur éloigné des réalités historiques et culturelles complexes du maghreb".

L’État est perçu par les citoyens algériens comme tout puissant et dominateur. La société civile doit interpeller l’État par le haut et par le bas et permettre ainsi au débat public de se développer et de réfléchir sur le fonctionnement de ses administrations.

Les défis définis par les participants sont les suivants :

• Réformer l’école et le système éducatif et l’adapter aux réalités de la société algérienne ;

• Redonner des perspectives aux jeunes par l’élaboration commune d’un projet de société ;

• Construire une société d’échange et d’ouverture ;

• Faire évoluer la famille ;

• Rédéfinir l’État, sa structure et son rôle jusqu’aux mécanismes locaux de gouvernance ;

• Soutenir l’émergence d’une société civile active et organisée ;

• Former de nouvelles élites ;

Ainsi, en redéfinissant l’Algérie par elle-même et pour elle-même, il convient de se demander de quel type d’État, de quelle société civile, de quelles élites nous voulons pour construire une paix durable en Algérie.

Commentary

Cette rencontre est un premier pas vers une normalisation de la situation politique de l’Algérie. Mais comme nous le savons, dix ans après la situation est encore tendue. Si la volonté de réunir des personnes de tous horizons a fait émerger ce texte particulièrement riche en enseignements sur la situation de ce pays, elle n’a pas encore permis de populariser ce genre de démarche. Pourtant, la construction de l’ouvrage qui présente à chaque page des encarts transcrivant des interventions "sur le vif" de participants rend la lecture dynamique et motivante pour l’organisation d’autres rencontres s’appuyant sur cette démarche.