I. Les prémices d’un dictateur
Saddam Hussein est né en avril 1937, au sein d’une famille de paysans très pauvres, dans le village d’Al Auja, près de Tikrit au Nord du pays. N’ayant pas connu son père biologique, il est élevé par le nouvel époux de sa mère qui le battra à de nombreuses reprises. Vers l’âge de 8 ans, Saddam Hussein fait une fugue et est recueilli par son oncle maternel Khairallah Talfah, maître d’école et plus tard Gouverneur de Bagdad. Il jouera un rôle important dans la vie de son neveu. C’est lui qui lui inculquera les références mythologiques et historiques sur lesquelles Saddam s’appuiera bien des années plus tard. Il épousera sa fille et entrera ainsi dans la tribu des Albou Nasser. Après des études secondaires Saddam rejoindra une cellule clandestine du parti Baas. Ce parti ayant été fondé par des syriens il représentait à l’époque une alternative au modèle du nationalisme arabe de Nasser, prônant un arabisme laïc mélé à des références socialistes.
En 1956, Saddam Hussein participe au coup d’Etat qui détrône un Roi étranger imposé en Irak par le Royaume-Uni. Mais ce coup d’Etat sera un échec et il faudra attendre 1958 pour qu’un groupe d’officiers sous la direction du général Kassem réussisse à renverser la monarchie.
Le 7 Octobre, le jeune Saddam Hussein qui n’est qu’un subalterne d’homme de main participe à la tentative d’assassinat du général Kassem, tentative qui échoue et se solde par une blessure. Avant d’être condamné à mort par contumace par le gouvernement irakien, il se refugie en Egypte.
Le 8 février 1963, un coup d’Etat réussi renverse Kassem et propulse le général Aref au pouvoir alors que celui-ci s’est appuyé sur des groupes bassistes. Saddam Hussein décide alors de revenir en Irak mais il sera emprisonné par le gouvernement de 1964 à 1967, date de son évasion.
II. L’ascencion vers le pouvoir
Le 17 Juillet 1968, un autre pan du parti Baas réalise un coup d’Etat et renverse le pouvoir en place. Ce groupe compte des proches de Saddam Hussein et le parti Baas devient puissant et structuré. Saddam se retrouve hissé au rang de responsable des services de sécurité grâce à son oncle par alliance, le général Ahmad Hassan Al Bakr, devenu Président de la République. Saddam Hussein mesure très vite le pouvoir qu’il a entre les mains et s’en sert pour évincer d’éventuels rivaux, tout en s’appuyant sur son réseau de solidarité des alliances de la ville de Tikrit. Mais, dans les années 1970, le parti Baas se confessionalise et devient essentiellement sunnite. Il s’en trouve privé d’une large base politique et doit donc rechercher les alliances avec d’autres partis, notamment les communistes et les partis kurdes. Ces alliances ne seront que de courte durée et bientôt le régime se retournera contre eux grâce à la manne pétrolière et le traité d’alliance signé avec l’URSS en 1972.
Le parti Baas devient une étape obligatoire pour toutes les négociations économiques, ainsi que pour l’accès au pouvoir. Il constitue désormais un instrument entièrement entre les mains de Saddam Hussein.
Le 1er Juin 1972, une nationalisation des compagnies pétrolières permet à l’Irak d’entrer dans un cycle de développement économique, industriel et social intense.
En 1973, Saddam Hussein devient général et entame alors une irréversible ascension qui le conduira en 1979 à remplacer le général Ahmad Hassan Al Bakr à la présidence.
III. L’Histoire « d’une dictature à l’Irakienne » de 35 ans
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Les outils de la dictature
Le dictateur irakien s’inspira beaucoup des modèles soviétiques et nazis pour maintenir son contrôle sur l’Irak.
La propagande constitue bien sûre un instrument de contrôle de la population, il s’en sert à travers des films à sa gloire mais aussi des pièces de théatre. Il utilise tous les médias et censure la presse. Grace à un régime de terreur aveugle, il entretient une ambiance de suspicion et de peur qui paralyse les opposants. Ce n’est pas officiellement le régime qui a recours à l’usage de la violence mais c’est le parti Baas qui exerce un rôle très actif grâce à des formations paramilitaires entièrement loyales au pouvoir de Saddam Husssein. Toutefois, l’armée aussi est sous haute surveillance et subit de nombreuses purges internes à tous les niveaux.
Mais Saddam a su se constituer un réseau solide qui palie à certaines prérogatives de l’Etat. En effet, ce sont les tribus qui seront les principales privilégiées de cette dictature ; dans la région de Tikrit et aux frontières elles recevront même des armes afin de contrôler le territoire. La justice tribale sera réhabilitée dans certaines régions avec l’accord tacite de l’Etat et quelques tribus ont parfois vu le régime leur accorder sa grande mansuétude notamment lorsque elles se permettaient de piller les étrangers sur les routes.
Cependant, il faut comprendre que Saddam Hussein, en favorisant les tribus mais aussi la communautarisation, se mettait au centre d’un jeu qu’il avait seul la capacité d’arbitrer. Ces deux phénomènes pouvant déboucher sur des conflits sanglants le seul pouvant les maîtriser se trouvait être alors le régime en place, ce que même les opposants reconnaîtront.
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Les années de gloire
Les années 70 ont été une période faste pour l’Irak qui toucha le revenu de sa rente pétrolière en intégralité grâce au choc pétrolier. Ce revenu fut utilisé par le régime irakien de Saddam Hussein comme moyen de progression économique, industriel mais aussi social. En une décennie l’Irak atteingnit des sommets et s’industrialisa rapidement, accédant à un niveau de vie comparable aux pays européens. L’UNESCO récompensa l’Irak en 1982 pour l’effort d’alphabétisation et son plan d’éradication de l’illettrisme.
Dans le domaine de la santé l’Etat a même pris en charge les frais d’hospitalisation et des subventions ont été accordées aux fermiers. En modernisant son système de santé l’Irak est devenu le pays le plus moderne et efficace de tout le monde arabe. Les services publics étaient éfgalement modernisés et recrutaient y compris sur le mérite.
Mais l’Irak a été le premier pays pétrolier à économie rentière à diversifier son champ d’action, l’industrialisation du pays s’est vue accélérée et de nombreuses infrastructures ont vu le jour. Toutes les villes d’Irak se sont retrouvées rapidement électrifiées.
Dans le même temps, Saddam Hussein lance une campagne de modernisation de l’agriculture accompagnée d’une réforme qui permet la redistribution des terres.
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La Guerre Iran-Irak
Pendant toutes ces années le régime irakien est soutenu par les pays occidentaux ainsi que par les pays de l’Est et devient une puissance régionale. La Révolution islamique de 1979 a renforcé le rôle de leader et rempart de l’Irak face aux islamistes. C’est avec l’accord tacite des occidentaux que l’Irak lance son armée en Septembre 1980 contre l’Iran pour occuper le Chatt-el Arab, chasser les iraniens des îlots du Golfe Persique, et s’emparer du Khouzistan. Les raisons qui poussent Saddam à attaquer sont aussi essentiellement internes car l’Irak connnait un réveil du chiisme religieux et le régime craint une alliance chiite qui le renverserait avec les iraniens. Les chiites sont ainsi obligés de choisir leur camp et font preuve d’un patriotisme dépassant largement toute conviction religieuse. Mais en entraînant son pays dans cette guerre, Saddam Hussein perd de vue les intérêts internationaux et surtout américains qui, implicitement, entretiennent ce conflit. Ainsi, les deux pays de la région ayant un potentiel pour devenir des puissances influentes se retrouvent face à face dans une lutte qui ne fera que les affaiblir. Cette guerre dura 8 ans au bout desquels des millions de morts et aucune victoire réelle. En 1988, le régime irakien se sentant faiblir, est traversé d’un relent de vigueur et, après avoir accusé les kurdes de traîtrise, organise une campagne punitive en direction de cette population contre laquelle il utilise des armes de destruction massive. Plus de 100 000 personnes périssent et l’épisode le plus marquant restera celui du village d’Halabja où, le 16 Mars 1988, des gaz chimiques ont été utilisés sur la population provoquant la mort de plus de 5 000 personnes dans l’indifférence totale de la communauté internationale.
Mais la descente aux enfers continue pour l’Irak quand Saddam Hussein décide d’envahir le Koweït en Août 1990. Cette décision est avant tout une erreur d’appréciation des relations internationales de l’époque. L’Irak est au bord de la banqueroute après 8 ans de guerre. Ses créanciers des émirats et du Koweït le presse de rembourser mais il s’agit davantage d’un complot destiné à débarrasser définitvement la région de la menace irakienne. En effet, l’Irak est sorti du dernier conflit surarmé et effraie Israël ainsi que les pays du Golfe. Après l’invasion du Koweït, l’ensemble de la communauté internationale se retourne contre l’Irak et les attaques se succèdent jusqu’à ce que les troupes irakiennes se replient à Bagdad. Cependant les forces de la coalition préfèrent contenir le régime irakien plutôt que de le faire chuter et risquer de mettre en péril la stabilité de la région. Le prix à payer est un blocus économique mis en place pendant 12 ans, jusqu’en 2003, et qui provoque la mort d’1 million d’enfants. De plus, la population chiite se rebelle en 1991 et est victime d’une répression dans le sang et le gaz sous les yeux de la communauté internationale qui refuse d’intervenir. Seul le Kurdistan irakien reste protégé par les forces américaines et profite d’un début d’autonomie. L’Irak reste contrôlé par les forces de la coalition et l’ONU, mais Saddam Hussein conserve le pouvoir.
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Le déclin
Jusqu’en 2003, le pays est en état de déliquescence, la menace que le président américain avait proféré contre l’Irak semble être devenue une réalité ; le pays est quasiment retourné à la préhistoire tant au niveau du développement économique que dans le domaine social.
Le 20 Mars 2003 les Etats-Unis et leurs alliés décident de renverser le régime sous des prétextes mensongers de détention d’armes de destruction massive. La Chute de Bagdad, le 9 Avril 2003, annonce officiellement la fin du régime de Saddam Hussein qui prend la fuite mais sera retrouvé dans une cave. Les atrocités commises sous le régime apparaissent alors enfin au grand jour et des dizaines de charniers sont découverts dans tout le pays.
IV. Le procès d’un dictateur
La phase préliminaire de son procès a eu lieu à Bagdad au mois de Juillet 2004, dans un tribunal d’exception où il est jugé pour crime de guerre, génocide et crime contre l’humanité.Il comparait avec plusieurs membres importants du parti Baas.
Le 19 Octobre, le procès commence mais Saddam Hussein refuse de reconnaître l’autorité du tribunal et plaide non coupable pour la première affaire relative au massacre de Doujail. Les témoins programmés craignant pour leur vie ne viennent pas, le procès est repoussé au 28 novembre puis au 5 Décembre.
Le Juge, après démission, est remplacé en Janvier par Rauf Rashid Abd El Rahman qui appelle Saddam Hussein en témoin le 15 Mars. Il fait alors des déclarations politiques qui conduisent à couper son micro.
Le 15 Mai il est formellement accusé de crimes contre l’humanité, puis, le 19 Juin, le procureur général du tribunal requiert la peine de mort contre lui et plusieurs de ses proches.
L’Homme qui a terrorisé l’Irak pendant 35 années est donc aujourd’hui sous la menace de la peine de mort dans l’indifférence la plus totale de la part des Irakiens qui aujourd’hui se préoccupent davantage de la situation de violence qui règne dans le pays.