Fiche d’expérience

Après 36 ans de conflit armé interne, le Guatemala réussit le cessez-le-feu en 1996

Le cessez-le-feu, un pas vers la construction de la paix au Guatemala

Mots clefs : Dialogue social pour construire la paix | La démocratie, facteur de paix | Actions de coopération politique locale pour la paix | Subordination du pouvoir militaire au pouvoir civil | Résistance aux groupes guérilleros | Résistance aux groupes armés hors la loi | Résistance non armée à la répression militaire | Société Civile Locale | Gouvernement national et paix | Citoyens guatémaltèques pour la paix | Gouvernement guatémaltèque | Résister civilement et pacifiquement à la guerre | Etablir le dialogue entre les acteurs et les partenaires de la paix | Elaborer des propositions pour la paix | Présenter des réformes pour un nouveau projet de société | Mener des négociations politiques pour rechercher la paix | Signer un Accord de Paix | Faire des réformes politiques pour arrêter la guerre | Réformer les relations politiques pour reconstruire la paix | Guatemala

Au Guatemala les accrochages entre un petit groupe d’officiers de l’armée devenus guérilleros révolutionnaires et l’armée officielle ont commencé en 1960. Bien que les conflits étaient beaucoup plus anciens. Grâce à un Etat militaire fort imposé à l’ensemble de la population et à un système de répression féroce de toute opposition, la rébellion armée ne prenait pas de l’ampleur. Ce n’est qu’à la fin des années 1970 que la guérilla est devenue mouvement lorsque les leaders guérilleros se son tournés vers la population Maya dont la plupart vivait dans des conditions économiques, politiques, culturelles, etc. d’une extrême précarité. Entre les années 1970 et 1980 les combats sont devenus de plus en plus importants en nombre et en gravité.

Suite à l’ampleur qui prenait le mouvement guérillero, l’armée, dirigée successivement par les généraux Carlos Arana, Kjell Laugerud, Lucas García et Ríos Mont, a entrepris une stratégie militaire de répression massive par la disparition des opposants, par la torture, par des massacres, par la technique de la terre brûlée, au prix de nombreuses victimes civiles assassinées dans des conditions atroces. En 1983, après une année et demi de combat militaire féroce qui n’a pas épargné des populations civiles faisant des nombreuses victimes par la pratique de techniques militaires des plus cruelles, le mouvement guérillero était réduit de façon importante. Une grande partie des combattants avait péri dans les combats. Ceux qui avaient survécu ont essayé de se regrouper en petits groupes de rebelles, mais ils ressemblaient à des petits groupes de délinquants plus qu’à un mouvement guérillero classique. D’autres sont partis se réfugier au Mexique ou dans la forêt. Leurs commandants avaient pris le chemin de l’exil. Les populations Maya, désormais bien contrôlées par l’armée, ne coopéraient plus avec un mouvement guérillero vaincu militairement et agonisant. Bien qu’une telle répression ait été perçue par l’armée comme une victoire militaire, elle s’est avéré comme l’une des raisons de sa défaite politique face aux nouveaux leaders civils.

Après la défaite militaire de la guérilla il y avait encore des accrochages entre les petits groupes de guérilleros et l’armée nationale. Le concept conflit armé était encore utilisé bien que, plus qu’à représenter une réalité militaire, il servait à justifier certaines actions militaires tant de la part des généraux ( de la répression, des massacres ) que des commandants ( des séquestrations, des attentats ), ainsi qu’à légitimer les aides financières que recevaient de l’extérieur les uns et les autres.

Généraux discrédités par la cruauté de la répression et commandants guérilleros militairement vaincus et fautes de soutien laissaient la place à des nouvelles élites politiques. En 1986 l’armée a quitté le pouvoir, un civil a été élu démocratiquement à la Présidence, des dialogues ont alors été entamés entre le gouvernement et la guérilla.

La société civile s’est beaucoup investie dans la lutte pour la démocratisation du pouvoir, pour le respect des droits humains, pour la construction de la paix. Ces efforts étaient soutenus de façon importante par la communauté internationale, notamment par d’autres pays de l’Amérique Latine, par la Communauté Européenne, par des ONG internationales, etc.

Pendant dix ans de négociations difficiles entre les parties en conflit mais aussi entre celles-ci et des représentants de la société civile, des accords sur de questions spécifiques se succédaient.

En janvier 1996 le « Partido de Avanzada Nacional » , nouveau parti dirigé par les grandes élites économique du pays, a accédé au pouvoir. M. Alvaro Arzú est devenu Président. Alors que les espoirs de pacification paressaient diminuer, grâce à des négociations efficaces au sommet, les accords de paix ont été signés au Guatemala le 29 décembre 1996. Le cessez-le feu a été tout de suite une réalité. Mais ces accords allaient plus loin : ils prévoyaient une véritable réforme des rapports sociaux dans les domaines politique, militaire, économique, culturel, etc. Leur accomplissement allait permettre de gérer les conflits de façon pacifique et de construire paix.

Commentaire

La paix au Guatemala peut être envisagée à trois étapes

Premièrement, la victoire militaire de l’armée sur la guérilla en 1983, transformant le conflit armé en une lutte pourrie entre vieux militaires et petits groupes guérilleros sans soutien populaire les uns et les autres, s’affrontant dans un contexte de fin de guerre froide.

Deuxièmement, la signature des accords de paix en 1996 qui a permis d’instaurer effectivement le cessez-le-feu.

Troisièmement, l’application des accords de paix permettant de reconstruire les rapports sociaux et de réformer le pays.

Si les deux premières étapes ont été réussies, la paix reste encore un défi à surmonter car les accords de paix n’ont jamais été mis en place. Au gouvernement du PAN, parti des élites économiques nationales, qui a signé les accords de paix, lui est succédé le gouvernement du FRG, parti du général Rios Mont, l’un des premiers responsables de la stratégie de la terreur subie par les Guatémaltèques au début des années 1980.