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Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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Fiche d’expérience

Les premiers pas pour une transition de systèmes autoritaires vers des régimes démocratiques à gouvernement civil en Amérique Centrale

1980 – 1990, la nécessaire réforme politique pour la pacification de la région centre-américaine.

Mots clefs : Méthodes de décision politique pour maintenir la paix | La démocratie, facteur de paix | Initiatives de coopération politique internationale pour la paix | Subordination du pouvoir militaire au pouvoir civil | Démilitarisation du pouvoir | Société Civile Locale | Parti politique | Gouvernement national et paix | Gouvernement salvadorien | Gouvernement guatémaltèque | Gouvernement hondurien | Gouvernement costaricien | Etablir le dialogue entre les acteurs et les partenaires de la paix | Elaborer des propositions pour la paix | Mener des négociations politiques pour rechercher la paix | Faire des réformes politiques pour arrêter la guerre | Réformer les relations politiques pour reconstruire la paix | Elire démocratiquement les autorités | Former de nouvelles élites | El Salvador

Au début des années 1980 l’Amérique Centrale était traversée par des guerres civiles sanglantes, principalement au Guatemala, au Salvador et au Nicaragua, opposant des mouvements de guérilla révolutionnaire à des militaires d’extrême droite.

Si la pacification des rapports sociaux était l’objectif majeur de la société civile, celle-ci a compris que la paix ne pouvait pas être apportée par les seigneurs de la guerre. Une réforme fondamentale s’avérait à leurs yeux nécessaire comme préalable à la construction de la paix : il s’agissait de confier le pouvoir à des personnes ayant des principes démocratiques et des démarches pacifiques.

Les 3 pays subissant un conflit armé interne, le Guatemala, le Salvador et le Nicaragua, se sont investis dans une réforme politique profonde, non sans difficultés. Les deux autres pays voisins, le Honduras et le Costa Rica, bien que moins touchés par les conflits armés, se sont associés à cette entreprise devenue régionale.

Au Guatemala la transition s’est entamée en 1983, lorsqu’un coup d’Etat militaire contre le général Ríos Mont, leader des généraux anticommunistes durs et célèbre par sa stratégie militaire d’élimination massive de l’ennemi, portait au pouvoir le général Mejía Vítores, leader des militaires pro-démocrates. Ce dernier a engagé une importante procédure de réformes institutionnelles. En 1984 a été organisée une Assemblée Nationale Constituante donnant au pays une nouvelle Constitution basée sur la primauté du pouvoir civil sur le pouvoir militaire, sur l’observance des principes démocratiques et sur le respect des droits humains. En 1985-1986 ont été organisées des élections présidentielles. C’est le Parti de la Démocratie Chrétienne qui a remporté la victoire. Un Président civil, Vinicio Cerezo a été élu grâce à des procédures démocratiques. Les vieux généraux quittaient le pouvoir après plus de trois décennies d’Etat militaire, une nouvelle élite politique, civile et à principes démocratiques était chargée de conduire le pays vers la démocratie et vers la paix.

Au Salvador, la droite de la droite continuait à vouloir imposer le système autoritaire par la force. Les guérilleros du FMLN se battaient contre l’armée pour prendre le pouvoir. Alors que le pays se déchirait par une violence incontrôlable, le leader de la société civile, Napoleon Duarte, s’est présenté comme candidat à la présidence pour le parti Démocratie Chrétienne. Grâce au soutien de la grande majorité de la société civile qui refusait la guerre, en 1984 il remporta la victoire.

Au Guatemala et au Salvador les autorités civiles commençaient par cohabiter avec le pouvoir militaire, elles avaient l’intention de le substituer par la suite.

A l’Honduras les élites nationales ont voulu répondre aux aspirations populaires tout en respectant les intérêts des USA, très forts dans le pays. En 1980, le pays renouait avec les institutions civiles élisant une Assemblée Nationale Constituante. En 1985 a été élu à la Présidence José Azcona, du Parti Libéral.

Au Nicaragua, suite à la victoire de « la révolution sandiniste » contre la dynastie des Somoza en 1979, les sandinistes étaient au pouvoir, avec Daniel Ortega à leur tête. Des élections présidentielles ont été organisées en novembre 1984. Ortega est devenu Président élu démocratiquement.

Au Costa Rica, où un régime démocratique était en place depuis 1948, lors des élections présidentielles de 1986, le Parti de Libération Nationale a remporté la victoire. Oscar Arias, son ancien secrétaire général, politologue et homme d’affaires, est devenu Président.

Commentaire

C’est grâce à ce processus préalable de démocratisation institutionnelle que le processus de pacification a pu voir le jour. La question de la démocratisation n’a pas été posée en termes de défi à surmonter, elle constituait le cœur de ce processus, c’est elle qui lui donnait naissance.

Ces premiers pas pour une transition de systèmes autoritaires vers des régimes démocratiques à gouvernement civil ont favorisé la convergence d’approches des 5 nouveaux Présidents centraméricains. Une réalité leur semblait évidente : les défis politiques étaient communs à la région, à défis communs, réponse commune ? En 1986 un Sommet des cinq Présidents centraméricains s’est tenu à Esquipulas. Ils signèrent la « Déclaration d’Esquipulas I » dans laquelle ils s’engageaient à trouver une solution pacifique aux conflits. Par là même, ils instauraient le principe de la négociation démocratique comme procédure de prise de décisions politiques pour la région.

Au début du XXIe siècle, les pratiques institutionnelles d’un régime démocratique s’affermissent en Amérique Centrale. Liberté d’expression, respect du droit d’association, pluralisme de partis, élections, transitions démocratiques sont devenues, non sans difficultés, les réussites d’une démocratisation en cours.