Montargis, août 2007
La médiation éducative : un rôle de « tampon » dans la relation pédagogique et éducative
A l’heure où la violence dans la cité, et plus particulièrement au sein de l’institution scolaire, semble être à nouveau la cible privilégiée des différentes instances médiatiques, la tendance est à la médiation. Le médiateur éducatif, nouvel acteur du théâtre social et scolaire, incarne le « tampon » devenu incontournable dans le champ si vaste de la relation pédagogique et éducative.
Une partie de la jeunesse est en proie au désarroi ; elle manifeste de façon croissante son rejet d’un système social et scolaire dans lequel elle ne se reconnaît pas ou plus, mais avec lequel elle entretient néanmoins des rapports plus qu’ambigus, du style « école je t’aime, je te hais ».
Conscients d’une certaine incapacité à renouer le dialogue, certains établissements scolaires se dotent d’un nouvel « outil », dans le but est d’endiguer au mieux le flot des comportements « d’anorexie scolaire ».
La mission première de cet intervenant : rétablir le dialogue et faciliter l’adaptation, voire la réadaptation scolaire. Renouer les relations entre les enfants, entre les élèves et les adultes et, le cas échéant, entre les adultes eux-mêmes. Refaire du lien tout simplement. En quelque sorte, il s’agit bien là de la fonction de médiation, telle que nous la comprenons en nous arrêtant sur sa définition générique : « entreprise destinée à mettre d’accord, à concilier ou à réconcilier les personnes, les parties ».
Le médiateur éducatif n’est ni un enseignant, ni un psychologue, ni une assistante sociale, pas plus qu’un « super » surveillant ou le représentant d’une quelconque forme d’autorité. Sa fonction est en fait triple :
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Servir de relais d’informations ;
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Rétablir le dialogue, restaurer la relation ;
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Résoudre le(s) conflit(s) ou participer à ce processus.
Dans ce cadre, le conflit est à envisager comme un événement inévitable dans la relation pédagogique et éducative. L’action de médiation consiste à un traitement du conflit par la parole essentiellement, par la négociation. Faire en sorte que les parties en présence retrouvent la maîtrise de leur propre et parviennent à un compromis satisfaisant pour chacun, nous pourrions dire un consensus. Par un travail journalier, aussi bien auprès des élèves qu’auprès des professeurs ou de tout autre instance (familiale, membres de la communautés scolaire), il doit amener chacun des acteurs à l’acceptation d’une décision d’arbitrage.
Une instance a été mise en place à titre expérimental au milieu des années 1990, dans un collège la banlieue Ouest de Paris : le « Lieu de Parole », devenu très vite « Lieu d’écoute et de parole ». L’idée initiale était de créer un espace (devenu) nécessaire, où les élèves, habités par une violence passive ou active, pouvaient recourir à la parole échangée avec un adulte.
De la médiation éducative avant l’heure. Un lieu pour se plaindre en quelque sorte. Les adeptes de la pédagogie institutionnelle reconnaîtront là une pratique qui leur est familière : mettre en place des passerelles émotionnelles, pour réinstaurer l’institution. Il s’agissait concrètement de rétablir au plus vite le lien de la parole (la communication comme point nodale). Exercice difficile, tant il faut s’en tenir aux difficultés inhérentes de la vie au sein de la communauté scolaire (axiome de base), pour éviter de tomber dans le piège d’une toute puissance illusoire. Se borner donc à favoriser l’échange entre l’enfant (élève) et l’adulte (professeur) et, corrélativement de l’enfant avec sa famille. Cela suppose une écoute permanente, quasi rogerienne.
La parole, le langage sont autant de vecteurs capitaux de la relation pédagogique et éducative, plus encore de la relation humaine. Etre un guide, tout simplement, en accompagnant l’autre. Entendre la médiation éducative comme un outil de (re)construction et de réparation de la relation.
Le travail des médiateurs apporte une valeur ajoutée, une « plus value », dans le sens où il permet de « ré-humaniser » les espaces ouverts au public, les lieux sensibles, de réguler les tensions quotidiennes et de renouer des liens sociaux défaillants.
Le développement de la médiation éducative (et plus largement sociale), révélatrice d’un malaise dans l’institution scolaire (dans la société), d’un déficit de réponse publique, renvoie, en effet, à une réflexion à mener sur la nécessaire adaptation des métiers dits de proximité.
Commentaire
La médiation éducative dans tous ses stades ou styles a pour but avant tout de restaurer le lien. Redonner son importance à la parole et l’écoute est essentiel pour que l’institution éducative reprenne son rôle de socialisation.
Notes
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Auteur : Stéphane DERVAUX, Docteur en Sciences de l’Education.