Hervé OTT, Millau, août 2015
Pédagogie des rencontres et des conflits transculturels
Le conflit, trop souvent perçu et vécu comme destructeur, peut être un formidable outil de transformation relationnelle et sociale. Pour cela les auteurs de cet ouvrage nous proposent d’interroger une vision culturelle-idéologique négative de l’être humain et de ses capacités à créer du lien, à s’engager dans des solidarités fortes par-delà les clans familiaux, sociaux ou nationaux.
Réf. : Karl-Heinz Bittl et Hervé Ott, Pédagogie des rencontres et des conflits transculturels, Ed. Chronique sociale, Comprendre la société, Décembre 2014, 436 p.
Langues : français
Type de document :
Quel est le propos de cet ouvrage ?
Ce livre développe les arrière-plans cachés des conflits dans la relation interpersonnelle, dans les groupes et dans les rencontres interculturelles. Il explicite en outre des moyens à prendre pour les transformer. Il décrit la transformation constructive des conflits et l’approche nécessaire pour y parvenir : accueillir le conflit comme un blocage et comme une opportunité de transformer les relations, les structures et nos perceptions des différences (notamment culturelles). Il s’inspire largement des résultats des recherches en sciences humaines humanistes sur la violence, les fonctionnements des groupes et le transculturel.
Comment se situe t-il par rapport à d’autres livres du même domaine ?
C’est d’abord un manuel de pédagogie pratique : 40 % de son contenu est composé de jeux et d’exercices et de méthodologie destinés à l’animation de groupes, notamment interculturels mais pas exclusivement. En ce sens il est, à notre connaissance, relativement novateur. Il existe quelques livres de jeux et d’exercices mais essentiellement centrés sur la coopération ou la négociation1. Pour chacun des thèmes abordés, il existe quantité d’ouvrages spécialisés, ce livre permet, en un seul ouvrage, de lire et travailler les conflits de façon systémique.
C’est donc cette approche systémique des fonctionnements et des conflits humains qui en fait la spécificité entre les trois dimensions de la personne, de la structure et de la culture avec 3 « médiations » que sont les lois, les règles (entre la personne et la structure), les rituels (entre la structure et la culture) et les valeurs (entre la culture et la personne)2. Chaque thème abordé (agressivité, communication, violence, médiation, prise de décision, pouvoir, processus d’exclusion, différences culturelles spécifiques, valeurs, etc.) est relié à des exercices et jeux pour enfants et adultes, qui permettent de faire travailler un groupe. Et inversement, les exercices sont reliés aux thèmes de fond développés, de façon à indiquer ce qu’ils permettent d’illustrer.
Est-ce un essai ? un livre pratique ? un témoignage ?
C’est un essai qui dévoile les différentes dimensions des conflits et un manuel pratique pour animer la transformation de ces conflits. Il est illustré par quantité d’exemples tirés de l’expérience des auteurs. Il est introduit par un parcours « biographique » des deux auteurs (militants puis formateurs), l’un allemand, l’autre français, très investis pendant plus de 35 ans dans les échanges franco-allemands, avec des pays de l’Europe de l’ouest et de l’est, du Maghreb, d’Afrique noire, du Proche Orient, du Pacifique sud.
Quels en sont les points forts ? Défend t-il une thèse? Laquelle ?
Cet ouvrage insiste sur le fait que chaque conflit implique la responsabilité de tous les protagonistes, qu’il est illusoire de chercher à départager strictement les coupables et les victimes (sauf du point de vue de la loi) et que chacun/e peut identifier sa part de responsabilité dans ce qui se joue de conflictuel. Que la violence, c’est la manifestation de ce qui reste caché et tu chez les individus, à l’intérieur des groupes ou institutions et dans la dimension culturelle. Transformer le conflit revient donc à aider à mettre en mots, à exprimer ce qui est caché, pour parvenir à une négociation, une coopération ou une séparation, avec et par-delà les différences. Il y a des paroles qui « tuent » quand on parle sur l’autre mais tout se transforme quand on parle de soi (affects, besoins, désirs) à l’autre, aux autres. Il y a aussi des processus de groupe difficiles à décrypter (pouvoir, exclusion, violence culturelle/ idéologique) qui engendrent une violence cachée. Enfin, il montre qu’il faut adapter les outils de transformations aux situations et les combiner : la seule communication « non-violente » ne suffit pas dans les conflits de groupes, une bonne « organisation » collective risque de provoquer des conflits interculturels et même la mise en œuvre de valeurs communes - parce qu’universelles - dans les relations et les groupes peut aussi créer des tensions. En interrogeant toutes ces dimensions, ce livre donne à chacun les moyens de sortir de l’impuissance et de retrouver une puissance d’agir dans les situations qui semblent bloquées.
A quels lecteurs s’adresse-t-il ?
A toutes celles et tous ceux qui sont confronté/e-s personnellement ou professionnellement aux conflits interpersonnels, dans les groupes et institutions et dans les relations interculturelles : notamment les personnes qui animent des groupes et/ou des rencontres pluriculturelles, qui sont actives dans l’éducation, l’enseignement, la formation, le conseil, l’analyse de pratique, l’accompagnement d’équipes, la thérapie et même dans les Ressources humaines au sein d’ONG et d’entreprises.
D’où est venue l’idée de ce livre ?
Elle est née d’abord des interventions de formation interculturelles des auteurs et de leurs expériences de vie. Au delà, ce livre cherche à combler un vide constaté dans les ouvrages traitant de l’interculturel. Il permet de prolonger le propos de E. Brass : “Je crois donc urgent, dans les programmes de sensibilisation et de “formation” destinés aux responsables d’échanges, d’apprendre à mieux connaître et à mieux comprendre (et les savoirs seuls ne le permettent pas), les phénomènes de violence individuelle et collective par exemple. La violence est consubstantielle aux individus, aux groupes et aux sociétés, partout où des hommes vivent sur cette terre. C’est une constatation banale, mais qui connaît et comprend la “banalité du mal” et qui sait comment y faire face ? La culture et les cultures que nous produisons et qui nous constituent en êtres humains nous donnent la possibilité, dans chaque ensemble particulier, dans chaque communauté, dans chaque société, de prendre en charge cette violence pour lui donner des formes autres que destructives. Les croyances, les rites, les usages, les coutumes, règles et lois, cérémonies et fêtes, les créations artistiques ordonnent aussi des violences, les canalisent, les subliment.”3
Table des matières résumée
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1. Introduction
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2. Biographie des auteurs
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3. La dimension personnelle et interpersonnelle
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4. Dans les groupes
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5. De l’interculturel au transculturel
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6. L’apprentissage et la coopération transculturels
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7. Coopérer oui mais comment ?
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8. Animer un stage
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9. Etapes importantes dans l’utilisation des méthodes : jeux et exercices
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10. Exercices de transformation des conflits
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11. Les formes de bilan
Notes
1 Cf le Catalogue de Ressources de Non-violence actualité.
2 Cette approche systémique des conflits a été développée dans l’Approche et transformation constructives des conflits (A.T.C.C.® ) cf. ieccc.org/spip.php?article111
3 E. Brass in Pédagogie des rencontres interculturelles, sous direction L. Clolin, B. Müller Anthropos 1996, p. 259.