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Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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Fiche de document Dossier : La transformation politique des conflits

Grenoble, juillet 2009

«  Israël / Palestine, vérités sur un conflit », Alain Gresh

Quelques causes profondes d’un conflit vieux de plus de 50 ans.

Mots clefs : Travailler la compréhension des conflits | Représentations mentales et paix | Respect des droits des peuples | Favoriser le dialogue entre les parties en guerre | Conflit israélo-palestinien | La responsabilité des autorités politiques à l'égard de la paix | Citoyens israéliens pour la paix | Citoyens palestiniens pour la paix | Autorité palestinienne | Gouvernement israélien | ONU | Union Européenne | Communauté Internationale | Palestine | Israël

Réf. : Alain Gresh, « Israël / Palestine, vérités sur un conflit », Ed. Fayard, 2007, 265p.

Langues : français

Type de document :  Ouvrage

Dans un avant-propos en forme de lettre à sa fille, Alain Gresh explique que cela fait près de 20 ans qu’il écrit sur le conflit israélo-palestinien, qu’il donne des conférences sur ce thème et qu’il effectue des reportages sur place. Toute cette passion déployée vient du fait qu’il a, comme il le dit si bien, le Proche-Orient au cœur car il y est né et y a grandi.

Il comprend qu’à chaque nouvelle crise dans la région, les juifs de France soient solidaires d’Israël et les musulmans de France des Palestiniens. Toutefois, il condamne fermement les règlements de comptes communautaires (injures antisémites, synagogues brulées et haine antimusulmane, agression anti-arabes) qui eux ne font qu’exacerber les tensions. Selon lui, il n’existe aucun droit « naturel » ou « religieux » en Palestine. Il nous rappelle que les résolutions des Nations Unies reconnaissent l’installation de deux peuples. L’un juif et l’autre palestinien, et que chacun de ces peuples a droit à son Etat indépendant. C’est déjà le cas depuis cinquante ans pour le peuple israélien mais pas pour les Palestiniens qui eux en sont toujours privés et vivent dans l’exil forcé ou sous occupation. Il précise que le génocide des juifs pèse lourdement sur ce conflit et que les Palestiniens payent pour un crime qu’ils n’ont pas commis et pour lequel ils n’ont à assumer aucune responsabilité.

Chapitre 1. « Dieu est du côté du persécuté »

Le Chapitre 1 comporte 20 pages et il s’ouvre sur la seconde Intifada que l’auteur compare aux émeutes de Soweto qui eurent lieu en Afrique du Sud en 1976. En effet, la brutalité insensée de l’armée sud-africaine ressemble en bien des points à celle de l’armée israélienne notamment quant à la disproportion des moyens employés pour contrer ces deux soulèvements. Une seule question mérite d’être posée selon l’auteur : comment un soldat peut viser un enfant pour le tuer ? Ensuite, il nous fait part d’un appel publié dans le Monde écrit par des intellectuels juifs français qui dénoncent le fait que les dirigeants de l’Etat d’Israël s’arrogent le droit de parler en leur nom et la dérive que prennent les solidarités « communautaires ». Il dénonce le terrorisme intellectuel qui vise à empêcher tout débat quant la politique du gouvernement d’Israël et qui consiste à taxer d’antisémite toute personne qui viendrait à critiquer celle-ci.

Chapitre 2. « Le conflit se noue 1917-1939 »

Ce chapitre comporte lui aussi 20 pages. Tout commence le 2 novembre 1917 avec la lettre écrite et adressée par Lord Arthur James Balfour, alors ministre du puissant Empire britannique, à Lord Rothschild, un des représentants du judaïsme britannique, proche des sionistes. Dans cette missive, Londres promet aux sionistes la création d’un foyer national juif et dans le même temps aux dirigeants arabes leur indépendance. Le 24 juillet 1922, la SDN (Société Des Nations) octroie à la Grande-Bretagne le mandat sur la Palestine. Cette terre que l’on qualifia alors d’être sans peuple était en fait habitée en grande majorité par des Arabes. On comptait parmi eux 600 000 musulmans, 80 000 juifs et 70 000 chrétiens. Le chapitre continue avec une partie consacrée au Yishouv (nom de la communauté juive installée en Palestine). Dans les années 30, il devient le centre décision du mouvement sioniste ce qui n’était pas le cas dans les années 20 car celui-ci se trouvait à l’extérieur. Il nous est expliqué que celui-ci éprouva des difficultés à mobiliser les masses juives car celles-ci préféraient se rendre aux Etats-Unis plutôt qu’en Terre sainte. A travers le Fonds national juif, l’achat de terre était l’un des objectifs – et l’un des moyens - de ce mouvement. Tout ceci est rendu possible grâce au parapluie britannique. L’accession au pouvoir d’Hitler accéléra l’immigration ce qui eut comme conséquence de radicaliser les parties en présence. C’est dans ce contexte qu’éclata la grande révolte, qui durera 3 ans, de 1936 à 1939. Le 15 mai 1936 marque le début de la grève générale qui dura 170 jours. Celle-ci n’avait qu’un seul mot d’ordre : l’arrêt de l’immigration juive. Le mouvement s’estompa quelque temps et repris de plus belle en septembre 1937. On assista alors à une révolte populaire armée de la part des Palestiniens qui menèrent des actions à la fois contre les forces britanniques et les colonies juives. Le chapitre se termine par l’adoption du Livre Blanc le 17 mai 1939 qui restreint l’immigration juive et interdit l’achat de terres arabes.

Chapitre 3. « Du judaïsme au sionisme »

Le chapitre 3 comporte 29 pages. On débute avec un rappel quant à la définition de ce qu’est un juif. « Est juif celui qui est né d’une mère juive, s’est converti au judaïsme et n’appartient pas à une autre religion ». Il fallut attendre 1970 pour que la Cour Suprême israélienne propose cette définition. On nous explique aussi ce qu’est une nation avec notamment plusieurs définitions à travers les âges. Il nous est aussi mentionné que les juifs au cours des deux derniers millénaires, n’ont été liés ni par le territoire, ni par la langue, ni par l’Histoire, ni par les coutumes. Ensuite, il nous est dit qu’à l’origine de l’histoire juive on trouve l’un des textes les plus sacrés de l’humanité, la Bible. On passe ensuite à deux faits historiques. Le premier est le terme antisémitisme qui fut inventé en 1873. C’est lors de ce même siècle qu’est né une « science » celles des « races » qui servira de justification à l’aventure coloniale et la « nécessaire » domination des Blancs. Vient un historique sur le sionisme : d’où il tire son nom, que représente-t-il, quand a-t-il émergé au niveau politique, pourquoi et dans quel but… Les religieux, pour la plupart, rejettent le sionisme car selon eux l’Etat juif ne peut renaître et le Temple ne peut être relevé qu’avec la venue du Messie. Pour concurrencer celui-ci, l’URSS alla même jusqu’à concevoir une république autonome juive, le Birobidjan, à l’extrémité orientale de la Sibérie. Pour Alain Gresh, Israël est un « fait colonial » ça ne fait aucun doute. Comme l’Australie et les Etats-Unis, le pays est né d’une conquête, de l’expropriation des autochtones. En revanche il n’est pas, contrairement à l’Afrique du Sud de l’apartheid, une « société coloniale », une société qui a besoin des indigènes pour survivre.

Chapitre 4. « Naissance d’Israël, naufrage de la Palestine (1947-1949) »

Ce chapitre comporte 22 pages. Après la seconde guerre mondiale, les Etats-Unis comme l’Europe de l’Ouest refusent d’accueillir les centaines de milliers de survivants des camps européens. Les Arabes de leur côté, se disent prêts à accueillir des réfugiés et non des colons. Les Nations Unies créent une commission l’UNSCOP (United Nations Special Committee on Palestine) qui a pour mission d’établir un rapport avant le 1er septembre 1947 décidant le partage de la Palestine et de la création d’un Etat juif. Trois éléments vont emporter l’avis de la majorité de ces membres : la tragédie des « clandestins », la réussite de la colonisation et les visite des camps de la mort. Le 29 novembre 1947, l’Assemblée générale des Nations unies « recommande » le partage par 33 voix contre 13 et 10 abstentions. Quel qu’eut été le vote des Nations Unies, l’Etat d’Israël aurait été créé. Il existait en fait dès la fin des années 1930. Pourtant, la décision de l’ONU est importante car elle donne une légitimité au projet sioniste. Les Palestiniens, comme les Etats arabes (à l’exception de la Jordanie) ont refusé le partage car celui-ci leur apparaissaient illégitimes. Ensuite, il nous est proposé 8 pages de cartes en couleurs. Les trois premières concernent la Palestine sous mandat britannique (1923-1947), le plan de partage et les premières annexions (1947-1949) et l’expansion israélienne (1967-1978). Les deux suivantes nous montrent pourquoi la ville de Jérusalem est trois fois sainte et la géographie de la Vieille Ville de Jérusalem. Les deux suivantes nous expliquent les propositions israéliennes présentées lors des discutions de Camp David en 2000 et de Taba en janvier 2001. La dernière enfin nous expose la Palestine à la vielle de la seconde intifada en septembre 2000.

Chapitre 5. « Du génocide à l’expulsion, les souffrances de l’autre »

Ce chapitre comporte 28 pages. L’auteur ne veut en aucun cas comparer le génocide juif et l’expulsion des palestiniens, il fait juste le constat suivant : Les juifs israéliens comme les Palestiniens sont habités par une souffrance profonde, par une peur existentielle. Pour les premiers, le génocide nazi fait partie intégrante de leur identité et ils redoutent sa « répétition ». Pour les Palestiniens, l’expulsion et le déracinement de 1948-1949 participent d’une épreuve traumatique dont ils continuent de subir les effets et dont ils craignent aussi la « répétition ». Selon lui, ignorer cette peur, c’est se priver de comprendre l’une des dimensions majeures du conflit. Alain Gresh va tenter de restituer le parcours de chacun des 2 cataclysmes. Il nous explique quand est apparue la Shoah, pourquoi et dans quel but… Le génocide des juifs est transposé au cœur du conflit israélo-palestinien. Comme tous les événements historiques, il est « instrumentalisé », utilisé à des fins politiques. Puis, il nous explique en quelques mots ce qu’est le négationnisme et condamne les propos d’un de ces théoriciens, Roger Garaudy. Ensuite il aborde le drame des réfugiés qui pendant des décennies a opposé les deux camps. Reconnaître que les Palestiniens ont été expulsés, c’est accepter qu’ils ont droit, comme tout peuple victime, à des « réparations », morales et matérielles. Il rappelle enfin que toute personne qui fuit les combats, a le droit de rentrer dans ses foyers : c’est un principe de droit international.

Chapitre 6. « Une guerre de plus (1950-2002) »

Le chapitre 6 comporte 51 pages ce qui en fait le chapitre le plus long du livre. En 1950, Israël existe dans des frontières élargies, sa population a doublé entre 1948 et 1951. La Palestine, elle, a disparu de la carte géographique, mais aussi politique. Il nous est rappelé que le Fatah fut créé par Yasser Arafat en avril 1959 et l’OLP le 28 mai 1964. Dès janvier 1965, le Fatah s’engage dans des actions armées contre Israël. Aux débuts des années 9170, pour ne pas disparaître de la scène internationale et par désespoir, la résistance palestinienne se lança alors dans le terrorisme international. Ensuite, il nous est conté le quotidien difficile des Palestiniens dans les territoires occupés : la perte de terres, précarité de l’emploi, impossibilité de construire une maison … Les Palestiniens deviennent des étrangers dans leur propre patrie. Selon l’auteur, Israël se heurte à un dilemme fondamental : comment être à la fois un « Etat juif » et une démocratie ? Ensuite, l’auteur revient sur les accords d’Oslo et de Camp David. Il nous en explique les tenants et les aboutissants. Dans quelles conditions ils se sont tenus, quels en ont été les acteurs, quel en a été l’issue, les avancées… et finalement pourquoi la paix a été manquée à chaque fois. La dernière partie de ce livre est consacrée à Ariel Sharon. Il nous est dit que l’objectif stratégique d’Ariel Sharon est de liquider tous les acquis des années 1990. Son but ultime étant la capitulation de la population palestinienne et sa renonciation à toute forme de résistance.

Commentaire

Ce livre a le mérite d’aborder et d’analyser les causes du conflit qui, bien souvent ne sont pas abordées par les médias de masse (ou alors d’une manière évasive) qui préfèrent se concentrer sur les conséquences directes. Ici tout est clair et précis. L’auteur va droit à l’essentiel et ne rentre dans les détails que pour les choses importantes ou les faits historiques.

Alain Gresh explique que l’idée d’écrire ce livre est née d’une conversation sur l’enseignement du conflit israélo-arabe et d’une indignation face au traitement accordé aux événements par les responsables politiques. Pour se faire, il reconnaît avoir utilisé les travaux de dizaines d’auteurs palestiniens, israéliens, français et anglo-saxons et les recherches les plus récentes afin de forger sa propre analyse et nous en faire part à travers ce livre. Il veut ainsi nous expliquer le conflit de la manière la plus simple possible en choisissant les éléments qui lui semblent indispensables à la compréhension de ce conflit.

Il est regrettable qu’il n’y ait pas une carte sur les accords d’Oslo car ce sont ceux qui ont été le plus près d’aboutir

Le petit plus de ce livre est la chronologie de 7 pages qui nous est proposée à la fin de celui-ci et qui nous retrace le conflit israélo-palestinien de la Première Guerre Mondiale jusqu’à la seconde intifada. Tout y est passé en revue, certes d’une manière brève, mais cela permet de pouvoir suivre l’évolution du conflit presque année après année.

Notes

  • Auteur de la fiche : Alexandre Lecoq.