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Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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Emilie Bousquier

Continuité ou transition : qu’adviendra-t-il de Cuba à la mort de Fidel Castro ?

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Les acquis de la Révolution menacés

Il y a plus de quarante cinq ans, la Révolution cubaine avait enthousiasmé les jeunes, les populations du Tiers-Monde, les habitants des bidonvilles d’Amérique latine. Cuba se croyait à l’aube d’une période de justice sociale et de démocratie mettant fin à la longue dictature sanglante de Fulgencio Batista. Tous se rangeaient du côté des deux porte-étendards romantiques de la Révolution, Fidel Castro et Che Guevara. Tout le monde s’accorde aujourd’hui à dire que Cuba n’est nullement devenu le paradis socialiste dont rêvaient les révolutionnaires.

Cuba, l’île des Caraïbes, compte onze millions d’habitants, dont sept millions sont nés après la révolution. Aujourd’hui les Cubains ont une espérance de vie de soixante-seize ans, un taux supérieur à la moyenne des pays d’Amérique latine. En comparaison, l’espérance de vie en Haïti est de cinquante-quatre ans. Quant au taux d’alphabétisation des adultes, il est de 96 % à Cuba contre 46 % en Haïti. On ne peut pas nier que la révolution a eu son heure de gloire et permis un certain développement pendant les années soixante.

Actuellement toutefois, les acquis de la révolution sont menacés. Les difficultés économiques et les pénuries alimentaires engendrées par l’abandon de l’Union soviétique au début des années 1990 perdurent. Les jeunes générations cherchent désespérément de nouvelles voies et opportunités alors que de nombreux Cubains, plus âgés, perdent la foi dans le programme qu’ils ont pourtant soutenu. Ben Corbett le dit si bien : « la dignité de la population est sacrifiée à la dignité de l’idéal révolutionnaire » (1).

Alors que le monde a avancé, s’est soumis aux règles et aux aléas de la mondialisation, à Cuba, il semblerait que le temps se soit arrêté. Le leader de la révolution cubaine, Fidel Castro, est au pouvoir depuis plus de quarante-six ans. Il a fait de Cuba une république socialiste dont l’avenir est actuellement plus incertain que jamais. Aujourd’hui, il n’est plus crédible. La communauté internationale s’afflige de la situation cubaine, de la continuité d’un régime tel que le régime castriste. Il faut également noter que l’embargo imposé par les États-Unis depuis 1962 et donc les relations de tensions entre les deux États, pourtant « voisins », n’arrange en rien la situation de l’île, qui, après quarante-cinq ans de régime marxiste, est ruinée. Mais au niveau international, c’est aussi le respect des droits de l’homme à Cuba, ou plutôt ses violations, qui inquiètent. Tel un régime à parti unique, la contestation n’est pas acceptée et la liberté d’expression, bafouée. Les peines sont dures, lourdes et injustifiées.

Alors quelle transition pour Cuba ?

On retrouve une grande diversité d’opinions et d’analyses sur Cuba qui vont de l’anticastrisme et l’anticommunisme le plus catégorique à la reconnaissance que la révolution a au moins permis à ce peuple de sortir de la misère et de l’humiliation.

Depuis la chute du mur de Berlin et l’anéantissement du bloc soviétique, une question revient constamment dans les analyses : est-ce la fin de l’espoir, la « faillite d’une utopie » comme le dit avec justesse le titre du livre d’Olivier Languepin ?

Il est extrêmement difficile de prévoir l’avenir de Cuba parce qu’une foule de questions restent toujours en suspens aujourd’hui.

  • Le principal problème des Cubains est-il l’embargo américain conjugué à l’abandon soviétique ou le fait qu’ils soient maintenus sous la tutelle d’un pouvoir autoritaire ?

  • Que peut faire La Havane face à l’agression du géant américain ?

  • Un pays peut-il vivre en autarcie dans un contexte de mondialisation ?

  • Maintenir l’idéologie socialiste implique-t-il le maintien du pouvoir autoritaire ?

  • Castro utilise-t-il des mesures qui vont à l’encontre des libertés individuelles pour asseoir son pouvoir personnel ou défendre la nation de ses ennemis ?

  • Et surtout : qu’adviendra-t-il de Cuba à la mort du Líder máximo ? Les Cubains, sauront-ils commencer à marcher sur les chemins de la démocratie ?

(1) Ben Corbett, Cuba, tout changera demain, Alvik Editions, 2003, p. 31.