Sophie Arie, Paris, juillet 2008
La paix par la politique : une définition positive de la paix
La plupart des ONGs élaborent des outils politiques de construction de paix. De l’étude de la gestion de conflit au thème de la sécurité, les méthodes de paix laissent entrevoir une définition positive de la paix.
La plupart des ONGs élaborent des outils politiques de construction de paix. Elles ont une action directe, dans l’intervention sur place, entre les gouvernements, par exemple, ou encore une action indirecte, où l’approche politique de la construction de paix prend sa place dans le cadre plus théorique de la recherche et de l’élaboration de savoirs.
Le champ politique de l’action de paix ne se limite pas à une action de terrain, par les gouvernements. La paix par la politique mobilise également des valeurs et des concepts. Le paradigme politique est ici utilisé pour ce qui pourrait désigner la gestion du vivre-ensemble. Nous allons donc aborder des thèmes de gestion d’un vivre ensemble pacifique.
De l’étude de la gestion de conflit au thème de la sécurité, les méthodes de gestion du vivre-ensemble laissent entrevoir une définition positive de la paix : elle n’est pas seulement une absence de violence ou de conflit, elle est une notion durable et généralisable
Le premier thème de l’action politique de paix est celui de la gestion de conflit et du Peacebuilding. Si l’action de paix par la gestion de conflit et ses différents processus se définit clairement dans son rapport au conflit, nous pouvons d’ores et déjà y voir les prémisses d’une paix qui se définit au-delà de son rapport au conflit, une paix positive.
Gestion du conflit et Peacebuilding
La gestion du conflit et le processus de peacebuilding, ou « construction de paix » sont des outils récurrents pour les différents acteurs de paix européens. La plupart des acteurs de paix se consacrent ou alors présentent au moins un programme pour la gestion du conflit. Le peacebuilding y fait l’objet d’une action politique directe, ou encore est insérée dans une action culturelle ou humanitaire. Nous étudierons en première partie le processus de peacebuilding, et dans une deuxième partie, trois organisations européennes ciblées sur l’action politique du peacebuilding et de la gestion de conflit.
1. Les processus de gestion de conflit et de « peacebuilding »
Les notions de « gestion de conflit » et de « peacebuilding » sont deux termes généraux prenant en compte de multiples actions sur le conflit : la prévention, la résolution, la reconstruction et la consolidation post-conflit. Ainsi, les acteurs de paix abordent la construction de la paix par la gestion du conflit en général ou par un point plus spécifique.
Michelle Maiese, chercheur au centre de recherche Conflict Research Consortium de l’Université du Colorado, présente les étapes et les dimensions du peacebuilding dans un document du même nom, disponible sur le site ressource Beyond Intractability.org (1). Elle définit le peacebuilding comme un processus de facilitation de l’établissement d’une paix durable et de prévention du retour de la violence en prenant en compte les causes essentielles et les effets du conflit, à travers la réconciliation, la construction d’institution et les transformation politiques comme économiques (2). La notion de peacebuilding est donc une vaste notion qui contient les étapes temporelles de gestion de conflit comme les dimensions dépassant le conflit. Elle inclue en effet les dimensions économiques, sociales, politiques pour une paix durable. La paix induite dans cette construction est une paix qui n’est pas seulement une absence de conflit. Au regard d’une paix plus large qu’une simple absence de conflit, nous pouvons nous interroger sur les critères de paix. L’absence de conflit permet-elle de parler de paix ? Dans quels cas pouvons-nous parler de paix ?
L’absence de violence dépasse l’absence de conflit : l’absence de conflit n’implique pas l’absence de violence. En effet, un conflit peut être évité par la violence des structures, lors d’une dictature par exemple. Sous une dictature, et sans conflit apparent, on ne saurait parler d’une situation de paix. La « paix » est maintenue par la violence. L’absence de discrimination pourrait être un critère de paix parallèle et corrélatif à l’absence de violence physique et structurelle, pour aller plus loin que la paix comme simple absence de conflit. L’absence de conflit n’implique pas l’égalité en droit entre les hommes. De la même manière que pour la violence, la discrimination peut exister dans une situation de « paix » sans conflit.
Ces critères pourraient être ceux d’une paix durable, ou « sustainable peace ». Le terme anglais de « sustainable » est habituellement traduit en français par « durable ». Cette traduction présente une lacune : elle ne prend en compte que la durabilité dans le temps. La paix « soutenable » mêle la temporalité à la qualité même de la notion de paix. Pour être une paix temporellement durable, la paix doit être soutenable, c’est-à-dire solide, d’une qualité certaine.
Ainsi, par le peacebuilding, il s’agit de créer une paix positive, de la paix « négative » au-delà du simple rapport au conflit, dans l’absence. La « construction de paix » s’étend donc bien au-delà de la simple construction politique, mais elle prend en compte les dimensions structurelles économiques et sociales. Si nous abordons pour commencer le peacebuilding sous son aspect politique, il est important de l’observer par la suite sous son aspect humanitaire.
Le peacebuilding fait donc appel à différentes notions et à différentes étapes. Alors que l’ONU, dans l’Agenda pour la paix, situe le peacebuilding, construction de paix, comme une phase du processus de paix intervenant après le peacemacking, le « faire la paix » et le peacekeeping, la préservation de la paix, la plupart des ONGs y incluent ces différentes phases. Ainsi, la majorité des ONGs incluent dans un seul et même processus les efforts de transformation à long terme, la prévention, la réconciliation, le conseil comme la sécurité et les interventions militaires. La temporalité accordée à la construction de la paix est un indicateur essentiel de la vision des hommes et de leur capacité à la paix.
2. L’action de paix par le « peacebuilding » : de la prévention à la reconstruction.
Avant d’étudier plus précisément les actions de peacebuilding exclusivement politique, il faut noter que certaines organisations européennes mettent en place des processus de peacebuilding et gestion de conflit, au cœur d’une action globale culturelle ou humanitaire, et ce dans un processus allant de la prévention à la reconstruction.
L’ECCP mène une action de paix basée sur le savoir et le partage de connaissance. Il est un acteur culturel. Il englobe la prévention de conflit dans la construction de la paix en tant que telle. De même, l’organisation grecque KEGME, et l’organisation espagnole FRIDE, acteurs de paix par l’humanitaire intègrent à la construction de la paix la prévention, la médiation et la résolution de conflit. Ainsi, nous pouvons voir comment, sur le terrain, l’action de peacebuilding implique les trois dimensions temporelles.
En observant les étapes de gestion de conflit mises en avant par les différents acteurs, il est intéressant de relever à quel point celles-ci témoignent d’une anthropologie de paix spécifique. L’organisation britannique « Responding to Conflict », RTC (3) s’attache à mettre en avant son action pour la transformation du conflit. Elle choisit de ne pas se situer dans la résolution, ni dans la prévention. Ce choix politique sous-tend une anthropologie particulière. Pour construire la paix, RTC pose les principes de créativité et d’innovation face au conflit : plutôt que de chercher à supprimer le conflit, elle s’engage à le transformer. La dynamique de cette approche justifie le principe de créativité et d’innovation. La position anthropologique est claire : le conflit est inévitable. Les hommes, par leurs différences sont condamnés à être en conflit. Mais la violence du conflit n’est elle-même pas une fatalité. Ainsi, construire la paix serait transformer la gestion violente du conflit en gestion pacifique du conflit. La problématique de paix centrale pour cette organisation n’est pas le conflit mais sa gestion. La paix n’est pas antinomique avec le conflit. Le conflit est lui même abordé comme un processus dynamique, inhérent au vivre-ensemble. On pourrait davantage parler de « confrontation » que de « conflit » : le conflit peut devenir un mécanisme positif de transformation.
La position de RTC est particulièrement originale. La plupart des organismes de gestion de conflit valorisent davantage la résolution et la prévention du conflit, situant l’enjeu de paix dans la résolution même du conflit. Le centre de recherche « Swisspeace » créé par la Fondation Swiss Peace, met en avant la problématique de paix par rapport au conflit : elle se concentre sur les causes des conflits, pour pouvoir les prévenir, les reconnaître et les réduire. La stratégie politique est celle de l’évitement du conflit. Cette position est assez récurrente : c’est la position globale des centres de recherche et d’action en science politique pour la gestion des conflits, comme la Fondation Russe pour la Paix, du CMI en Finlande, ou encore du CPSH en France. Quoi qu’il en soit, nous pouvons remarquer que le point commun des organisations de gestion de conflit et de peacebuilding est le refus de la violence. L’affrontement n’est pas violent en lui-même. S’il semble humain, donc inévitable, voir positif comme le met en avant RTC, la violence apparaît comme un abus de force, où dans le rapport de force, l’une des partie s’impose.
Nous pouvons désormais remplacer la définition négative de la paix comme absence de conflit par la définition de la paix comme absence de violence. Cette première définition s’est élaborée à partir de la comparaison de la construction politique de paix, mais elle reste négative : nous devons poursuivre ce questionnement politique de la paix.
Les organismes d’étude et d’action politique s’attachent donc à certaines étapes de gestion de conflits, témoignant d’une vision particulière de la paix, sans se contenter toutefois de la simple question de conflit. Ils intègrent tous à la construction de la paix des facteurs de durabilité : la justice, la démocratie, la société civile, le développement, le respect des différences, etc. La gestion du conflit, dans le cadre de la construction de paix reste toujours lié à la culture et au développement. Par cette transversalité, nous nous rapprochons de la notion positive de paix. Tous posent une valeur positive de paix : elle est bien sûr une absence de violence, mais elle est une co-construction de valeurs. Ainsi, si le paradigme politique est bien une base, la paix devra être appréhendée sous ces aspects culturels et humanitaires.
Démocratie et Société Civile
Alors que le Peacebuilding se présente comme l’outil politique le plus évident de la construction de la paix, la démocratie intervient comme une valeur politique de paix. Elle dépasse l’outil, elle est une finalité en elle-même. Cette valeur est posée par tous les acteurs européens de paix, implicitement ou directement. Elle est liée à l’importance donnée à la société civile. Cette valeur est plus particulièrement chez certains acteurs dont l’organisation est née au cœur d’un contexte politique spécifique. Nous remarquons une mise en avant de la démocratie comme valeur de paix par ces acteurs localisés dans les pays de l’Est ou encore dans les Balkans.
1. La démocratie comme valeur de paix en Europe de l’Est et dans les Balkans.
La mise en avant de la démocratie comme valeur de paix se lit dans un contexte historique et politique très spécial, celui de l’Europe de l’Est et des Balkans dans la deuxième moitié du XXe siècle.
En effet on peut remarquer que les acteurs de paix mettant en avant la démocratie et la société civile comme valeur de paix sont principalement roumains, biélorusses, serbes et croates. Le point commun de ces organisations est la réaction à un régime autoritaire, et à des conflits liés à certaines idéologies. Avant d’étudier la spécificité de quatre acteurs de paix, nous devons étudier comment ces valeurs particulières sont nées d’une réaction contre sa négation même : la dictature et les idéaux totalitaires.
Le sociologue Michel Wieviorka étudie la question de la démocratie face aux dictatures dans l’article « la démocratie comme état de grâce » (4). Il pose trois registres de la conscience collective sur lesquels peut fonctionner la résistance au totalitarisme, et plus particulièrement à la dictature : le social, l’identitaire, le politique. Le registre politique de résistance à la dictature est bien celui de la démocratie. Ainsi, la notion de démocratie définie comme « régime où la souveraineté appartient à l’ensemble des citoyens » (5) doit être analysée plus en profondeur.
Le régime démocratique donne la souveraineté à l’ensemble des citoyens. Cette définition engage chacun des êtres humains dans un ensemble agissant. La démocratie fait donc appel à la citoyenneté, à l’engagement citoyen. Cette implication de tous les hommes pose le problème propre au vivre-ensemble : la gestion de la diversité. C’est en cela que Michel Wieviorka un « régime ouvert au pluralisme d’opinions et de croyances » (6), ou autrement dit, un régime construit par le pluralisme d’opinions et de croyance (7). En observant la constitution de la démocratie par la diversité, nous commençons à apercevoir en quoi elle est une valeur de paix : elle présente l’harmonie et le dynamisme du vivre ensemble. Dans cette mesure, la démocratie se lie aux droits de l’homme, dans la gestion de la diversité. En effet, pour permettre un vivre ensemble dans la paix, au sens positif, participatif et durable du terme, il s’agit de poser un cadre juridique, celui qui pose les hommes comme libres et égaux les un par rapport aux autres : « les hommes naissent et demeurent libres et égaux en droits » (8). Nous reviendrons par la suite sur le cadre juridique de la paix.
Nous pouvons élargir la notion de dictature au totalitarisme lorsque celle-ci s’accompagne d’un idéal total, qui dépasse le cadre de la politique. Nous voyons alors comment la démocratie s’impose comme valeur de paix contre le totalitarisme dans la mesure où l’une des principales caractéristiques du totalitarisme est l’idéal d’un homme total. Parmi la vaste et analyse que fait Arendt du totalitarisme dans son œuvre Les origines du totalitarisme (9), nous pouvons relever la négation même de la diversité humaine par le totalitarisme. En effet, en supprimant la liberté politique, essence même de l’humanité, l’Etat totalitaire supprime l’homme. Comme nous l’avons étudié précédemment, l’homme se caractérise par le vivre-ensemble, c’est-à-dire l’action politique comprenant la diversité. Ainsi, annihiler son action politique, son engagement dans le vivre ensemble revient à détruire son humanité. Dans un Etat totalitaire, les hommes ne vivent plus « ensemble », mais « à côté », si l’on peut dire, sans inter-action. Nous comprenons donc qu’à la suppression de l’engagement citoyen s’ajoute, sous le totalitarisme quel qu’il soit, la suppression de la diversité humaine : les Etats totalitaires détruisent les différences de pensées, de cultures, d’ethnies.
Le totalitarisme épuise donc la société civile, entendue comme engagement des individus citoyens vers des intérêts communs. L’idéal totalitaire est celui de l’humain superflu. Sous la domination, l’homme dénué de son action politique est dénué de son humanité. Ainsi, les activités des hommes doivent être mécaniques, inscrites dans une routine sans but. Le système totalitaire ne peut parvenir à sa pleine forme que si les hommes ne sont plus que réflexes conditionnés : « l’homme ne peut être pleinement dominé qu’à condition de devenir un spécimen de l’espèce animale homme » (10). L’individualité, ce qui pourrait distinguer un homme d’un autre est donc intolérable. Dans ce cadre, on ne peut plus parler du caractère « civil » de la société : les hommes n’ont plus d’engagement civil, ne sont plus citoyens.
La démocratie et la société civile s’avèrent, face aux dictatures, être des valeurs politiques de la paix positive dans le vivre-ensemble. Michel Wieviorka insiste sur le fait que dans les situations de dictatures les plus dures, la démocratie devient plus que politique, une position éthique. Elle n’est pas seulement un outil politique de paix, mais une valeur. Nous pouvons donc définir la démocratie en tant que valeur de paix, avec Michel Wieviorka, comme une « formule politique qui assure de manière unifiée le traitement articulé de diversités sociales, culturelles et politiques » (11).
Dans la valeur de démocratie posée par les acteurs européens de paix, nous retrouvons des caractéristiques établies par Michel Wieviorka : la démocratie évoque l’Etat de droit, le pluralisme de la culture, et « l’insertion de groupes porteurs de demandes sociales dans l’espace publique ». Les exigences d’une telle démocratie dépassent la simple disparition du régime totalitaire. Les difficultés de reconstruction sociale et politique que connaissent les pays ayant été touchés par le totalitarisme sont particulièrement grande : il s’agit de réinvestir la société civile, l’engagement de chacun dans le vivre-ensemble. Cette implication pour la reconstruction vers une paix positive s’observe chez de nombreux acteurs européens de paix, et plus particulièrement chez les ONGs des pays ayant connu une dictature.
2. Quatre acteurs de paix et leur contexte historique, politique et social.
Alors que la démocratie, les droits de l’homme, et la société civile sont posés comme valeur de paix par tous les acteurs de paix, certaines ONGs centrent leur action autour de ces valeurs. Quatre associations sont particulièrement engagées dans une reconstruction vers la paix par ces valeurs :
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Le SCAF, en Biélorussie ;
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Le EDRC en Roumanie ;
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Le Centre d’Osijek, en Croatie ;
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Le CEMIR en Serbie.
Ces quatre ONG sont nées dans des contextes de reconstruction, après-guerre ou au lendemain d’un système totalitaire.
Le CEMIR - Centre pour la paix et le développement de la démocratie -, et le Centre d’Osijek, pour la paix, la non-violence et les droits de l’homme sont nés au cœur de la guerre des Balkans. Ces deux centres s’inscrivent dans le refus fondamental de la violence, et pour la reconstruction d’une société civile : le CEMIR s’engage pour donner une voix à la contestation anti-guerre, et le Centre pour la paix d’Osijek s’engage pour les droits de l’homme et le refus du nationalisme ethnique.
La République socialiste fédérative de Yougoslavie réunissant la Slovénie, la Croatie, la Bosnie Herzégovine, la Serbie, le Monténégro et la Macédoine et gouvernée jusqu’en 1980 par Tito, a éclaté à partir de 1989, marquant la succession de guerre civiles et de sécessions dans les Balkans. Réunissant une grande diversité d’ethnies et de cultures, les nationalismes autoritaires se sont développés. Michel Wieviorka montre comment, paradoxalement, la chute d’un régime autoritaire peut entraîner un retour à un ancien régime nationaliste. Face au régime de Tito, on observe la montée des nationalismes populistes et xénophobes, où la Nation devient une obligation exigeant une homogénéité culturelle ou ethnique de la société. Il est important de noter ici que la démocratie comme pur système politique n’est pas contradictoire avec le nationalisme : elle ne contient pas nécessairement la valeur éthique de la diversité et des droits de l’homme. Ainsi, de 1990 à 1999, le Président Franjo Tudjman, autoritaire et nationaliste à été élu démocratiquement, dans l’idéologie d’une nation ethniquement « pure ». En Serbie, le gouvernement de Slobodan Milosevic, de 1989 à 2000 à été particulièrement répressif et meurtrier, dans sa politique nationaliste pour le soutient des Serbes de Croatie, de Bosnie-Herzégovine et du Kosovo. Le régime démocratique présente des risques dans son idéalisation.
La démocratie comme simple système électoral n’est donc pas une valeur de paix suffisante. Elle doit contenir les droits de l’homme, le respect la diversité et la société civile. L’engagement du Centre pour la Paix, la non-violence et les Droits de l’homme à Osijek, en Croatie se situe alors dans la promotion de la diversité et des droits de l’homme. Elle déclare elle-même dans sa présentation (12) son refus de l’idéologie d’une nation à ethnie unique, son engagement pour la reconstruction d’une société civile, où chacun dans sa différence s’engage dans le vivre-ensemble. Dans un tel contexte, cette position est particulièrement subversive.
Le centre CEMIR pour la paix et le développement de la démocratie à été créé par des serbes, pour manifester le refus de la guerre. C’est un véritable engagement citoyen pour la Justice et le respect des diversités. Par activisme et militantisme, il donne une voix aux citoyens refusant la guerre et ses raisons. La démocratie ici prend le sens de l’engagement pour la diversité et la justice, ainsi que pour la non-violence.
Quant au Centre EDCR – Centre de Ressources pour la Diversité Ethnoculturelle -, il ne présente pas son engagement au sein d’un contexte particulier. Cela ne signifie pas pour autant que cet engagement est neutre : après la dictature communiste de Ceausescu, dictature particulièrement autoritaire et destructrice, l’EDCR s’engage pour la construction de la démocratie en Roumanie. Cette association se tourne alors directement vers la favorisation des échanges et du dialogue interethnique. Nous observons ici la participation du philosophe politologue Will Kymlicka, dans la promotion des droits des minorités vers un multiculturalisme.
Enfin, la SCAF s’engage pour la société civile en tant que participation active vers la paix. La Biélorussie, ou Etat du Bélarus a connu plusieurs occupations successives au cours des siècles. Depuis la Deuxième guerre mondiale, elle a connu l’occupation nazie, lors de laquelle plus de 9000 villages furent brulés, 380 000 personnes déportées et les communautés juives presque entièrement décimées, puis l’occupation soviétique, et en 1986, la catastrophe de Tchernobyl contamina plus de 50 000m2 et 24 700 Biélorusses furent déplacés (13). Dans ce contexte et malgré de nombreux engagements populaires, la société civile a été affaiblie. Le SCAF encourage donc toutes les initiatives de Société Civile pour la paix, au sens « onusien » du terme, c’est-à-dire d’organisation citoyenne vers un objectif commun.
Nous avons étudié les valeurs de paix que sont la démocratie et la société civile dans une situation de réaction face à un régime politique et des idéaux particuliers, et dans une époque spécifique, dans la mesure où la démocratie apparaissait comme la valeur de paix la plus évidente. Mais les acteurs de paix étudiés cherchent à dépasser la réaction face à un régime, vers l’action elle-même. Ces acteurs sont désormais engagés face à de nouveaux enjeux de paix. Ainsi, on ne saurait limiter la démocratie à une réaction dans contexte politique et historique particulier.
Les acteurs européens de terrain qui soutiennent la démocratie montrent par le contexte de leur action tout ce que cet engagement implique, au-delà du simple système électoral. Corrélativement à la valeur politique de la démocratie se pose une valeur juridique essentielle pour la majorité des acteurs de paix européens : les droits de l’homme.
Cadre juridique de la paix : les droits de l’homme
Les droits de l’homme sont posés par la majorité des acteurs de paix dans les pays d’Europe, y compris par ceux qui ne s’engagent pas spécifiquement pour la démocratie. Les droits de l’homme sont un outil et une valeur de paix qui semble plus évidente que la démocratie, dans la gestion du vivre-ensemble, dans la mesure où elle assure la protection, la justice, l’égalité.
1. Les droits de l’homme : signification de la notion.
Pour comprendre la corrélation entre la démocratie, valeur politique de paix, et les droits de l’homme, valeur juridique de paix, il faut revenir aux contextes de création de la notion des Droits de l’homme.
Les droits de l’homme sont nés à travers plusieurs étapes historiques, et plus particulièrement à travers trois dates :
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La Déclaration d’Indépendance des Etats-Unis, en 1776 ;
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La Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, lors de la Révolution française en 1789 ;
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La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et du Citoyen, élaborée par l’ONU en 1948.
Ces trois déclarations témoignent de l’évolution de la notion même des droits de l’homme, et si les deux premières n’ont pas une finalité de paix déclarée, la troisième pose le cadre juridique pour une paix positive.
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La première déclaration des droits de l’homme est contenue dans la Déclaration d’Indépendance des Etats-Unis d’Amérique du 4 juillet 1776 élaborée par Thomas Jefferson. Son objectif est celui de l’indépendance du peuple américain face aux britanniques. Elle se joue donc sur la scène internationale, et s’adresse à l’humanité entière. Le droit de l’homme fondamental est ici celui de l’indépendance, il est un droit du peuple.
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La Déclaration des Droits de l’Homme et du citoyen de 1789 est née au sein de la Révolution française. Contrairement à la Déclaration d’Indépendance des Etats-Unis, les droits de l’homme ne se jouent pas ici sur la scène internationale, mais nationale, dans l’opposition d’un peuple à son souverain. Son objet est la liberté, dans toutes ses dimensions et plus particulièrement dans ses dimensions politique et juridique : le peuple se déclare libre dans l’établissement des lois et de la Constitution.
Le lieu de convergence de ces deux déclarations est la liberté, contenant les notions d’indépendance et de souveraineté. De plus, ces deux déclaration sont des préambules à la constitution : aux Etats-Unis, encore aujourd’hui, la Déclaration des Droits de l’Homme est le fondement juridique du droit.
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La Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et du Citoyen est née au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale, en 1948. Par elle, l’ONU proclame l’universalité des droits fondamentaux, dont le premier, l’égalité parmi les hommes, sans distinction de race ou de sexe. Elle s’impose comme un vœu qu’advienne dans l’ordre international un système juridique qui protège les droits de l’homme. Elle définit clairement les droits humains fondamentaux, contrairement aux deux déclarations précédentes. Les Droits de l’Homme et du Citoyen se posent alors comme valeur universelle de paix : pour préserver les hommes des horreurs des guerres, l’ONU réclame l’établissement des droits de l’homme.
Les éléments principaux des droits de l’homme sont donc l’indépendance, la liberté, l’universalité. L’indépendance et la liberté, appréhendées sous leur forme politique sont des valeurs corrélatives à la démocratie. On retrouve une condition sine qua non de la paix positive, c’est-à-dire la possibilité pour les hommes de co-construire leur vivre-ensemble, comme nous l’avons étudié par la démocratie.
Les Droits de l’Homme sont une valeur politique et juridique de paix commune aux pays européens. Plus qu’un outil, ils sont une condition de paix positive, de par l’égalité, la justice et l’universalité. Ainsi, toutes les acteurs de paix, gouvernementaux comme non gouvernementaux, qui posent un cadre juridique à la paix posent les droits de l’homme, et défendent la justice.
Le principe fondateur des droits de l’homme est celui de l’égalité en droit. Le première article de la déclaration pose tous les hommes comme libres et égaux en droit. Poser cette égalité juridique est une valeur de paix essentielle, corrélative à la valeur de justice que l’on retrouve souvent chez les acteurs de paix. L’égalité ne prend sa pleine valeur de paix qu’avec l’universalité. En effet, qu’en serait-il d’une paix où certains hommes seulement seraient égaux en droit entre eux ? L’égalité universelle est fondamentale pour une paix positive. Cette même universalité est pourtant critiquable, comme nous l’étudierons en troisième partie. En effet, la déclaration des droits de l’homme et du citoyen est inscrite dans un contexte occidental spécifique, et présente alors le risque d’imposer une vision culturelle spécifique de la nature humaine, dans sa prétention à l’universel (14).
Dans les Origines du totalitarisme, Hannah Arendt soulève une aporie dans l’universalité des droits de l’homme (15). Ils se veulent au-dessus des Etats, mais ils sont toujours compris dans une citoyenneté. Ils prennent effet et sens à l’intérieur d’un cadre politique, dans un Etat donné. Le danger est alors le risque de perdre ses droits d’être un homme dès lors qu’on perd sa citoyenneté : ce peut être le cas des apatrides, des minorités, des déplacés. Les personnes qui ne sont plus dans un cadre citoyen ne bénéficient plus de la protection juridique des droits de l’homme. Arendt en appelle alors à un cadre juridique dépassant le cadre politique du pays, un droit qui précéderait les droits de l’homme : le droit d’avoir des droits, c’est-à-dire le « droit d’exister au sein d’une communauté politique et d’être reconnu ». Ce droit, qu’on pourrait appeler avec Arendt un « droit à la condition humaine » est plus fondamental, c’est lui qui assure le droit au droits de l’homme. Nous reviendrons par la suite au questionnement critique des droits de l’homme.
Les droits de l’homme se posent donc comme une valeur de paix positive, et peuvent être appréhendés alors comme une finalité en elle-même, par l’égalité et la justice, ou encore comme un outil dans la protection qu’elle assure. Les droits de l’homme s’imposent comme un outil de paix, comme en témoignent de nombreuses actions pour la défense des droits de l’homme. Les droits de l’homme se lient ici à la question de la sécurité.
2. Les actions juridiques pour la paix.
Tous les acteurs de paix européens posent les droits de l’Homme comme valeur et outil de paix, de manière très générale et théorique, sous forme de savoir, de recherche ou de plaidoyer, ou encore de manière beaucoup plus spécifique. On observe une action de paix par les droits de l’homme beaucoup plus pratique dans les associations étudiées précédemment. Leur action juridique est d’autant plus précise et marquée que ces organisations ont été créées dans l’urgence d’une crise.
Le Centre pour la paix d’Osijek en Croatie s’engage très précisément et concrètement pour les droits de l’homme, dans son action juridique directe. En proposant un service d’aide et de conseil juridique, depuis sa création, elle s’engage pour la protection des civils : réfugiés, déplacés, ou citoyens locaux.
Le CEMIR s’engage pour les droits de l’homme par le plaidoyer et le l’activisme. Ses thèmes d’action sont assez précis : jugement de crimes de guerre, contrôle des organismes judiciaires étatiques, et protection du droit des minorités. Nous retrouvons la spécificité du droit des minorités au sein des droits de l’homme dans l’engagement de l’EDCR en Roumanie.
Parmi les organisations plus généralistes sur la question des droits de l’homme, l’aire consacrée par l’organisation espagnole FRIDE à la paix est celle des droits de l’homme. Elle oriente sa recherche vers l’égalité et la justice. FRIDE affirme donc l’égalité et la justice comme valeur de paix. C’est dans la présentation de cette organisation que se remarque plus particulièrement le lien entre la paix et les droits de l’homme.
Nous pouvons donc observer l’importance particulière de l’action juridique dans l’engagement politique pour la paix. Par les droits de l’homme, elle assure la lutte pou l’égalité et la justice, et ce dans une dimension internationale, interculturelle, inter-religieuse, etc. Les droits de l’homme se présentent alors comme outil et comme valeur de paix : ils assurent protection et égalité.
La protection juridique nous laisse entrevoir un thème important de la paix politique, celui de la sécurité.
Sécurité et paix.
Dans le cadre des actions politiques pour la paix, le thème de la sécurité est relativement peu abordé, même si la relation entre la paix et la sécurité apparaît comme une question essentielle. Les acteurs de paix européens abordant cette question sont généralement spécialisés, soit sur la sécurité en général, soit sur des thèmes précis de la sécurité.
Avant d’observer les actions pour la sécurité, nous devons étudier ce thème et sa relation avec la paix.
1. La sécurité comme outil et enjeu de paix.
Nous avons distingué les valeurs des outils de la paix politique. La sécurité, quant à elle, apparaît davantage comme un outil que comme une valeur.
En tant qu’outil de paix, elle se place dans le rapport avec le conflit, dans sa prévention et dans ses effets. En effet, l’insécurité est à la fois une cause de conflit, comme une conséquence, et l’outil de la sécurité se situe dans la prévention, au cœur du conflit, ou encore dans la reconstruction post-conflit. La pauvreté, la discrimination, les maladies, les antagonismes sociaux, sont autant de causes d’insécurité pouvant conduire, être présent ou suivre le conflit. La question de la sécurité touche directement les populations civiles en prise avec des conflits, mais a également une échelle internationale.
L’approche par la sécurité est donc une approche spécifique du conflit. Sur le plan des actions politiques, on pourrait dans ce sens établir une connexion avec la gestion du conflit et le peacebuilding. Cette approche de la paix est apparue dans un contexte mondial assez particulier, contexte qui explique l’émergence de cette notion dans les processus de paix au niveau national comme international. Les recherches théoriques autour de la sécurité posent l’émergence d’un nouveau contexte mondial, éclatant en plein jour le 11 septembre 2001 (16). De nouvelles formes de violence éclatent à l’intérieur des pays et de nouveaux acteurs entrent en jeu sur la scène internationale : les ONG, les pays émergents. Les attentats du 11 septembre 2001 ont révélé une nouvelle menace et ont donné lieu au développement d’un sentiment international d’insécurité. Des fractures se révèlent entre les Pays du Sud et les pays du Nord, l’Orient et l’Occident, faisant naître une ambiguïté de sentiment face aux problématiques de sécurité et d’insécurité : les pays puissants occidentaux réalisent à la fois leur vulnérabilité face à toute une part du monde qu’ils ne connaissaient pas, et leur responsabilité face aux besoins « développementaux » et humains. Ainsi, le sentiment de sécurité induit à l’absence de peur les uns face aux autres, mais aussi, la subvention aux besoins vitaux, l’absence de manques face aux nécessités vitales.
La sécurité va alors se poser comme outil politique de paix sur différent points. Elle est un outil militaire de paix, par la protection physique des civils, elle est également un outil juridique, pour une protection juridique des victimes, ce qui la rapproche du thème des droits de l’homme. On peut également l’aborder sous son aspect développemental et humanitaire, en considérant par exemple que les actions de prévention dans les domaines médicaux, comme pour le VIH, ou agricoles, etc. sont des actions de paix. Dans ce cas, nous pourrions caractériser la sécurité par la durabilité, dans le sens anglophone de «sustainable ».
La sécurité peut donc être abordée dans ses aspects :
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Militaires ;
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Juridiques ;
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Durables (sanitaires, sociaux,…).
Le rapport entre la paix et la sécurité est assez ambigu. Certes, ils se posent forcement, lorsque l’on considère la vie des populations lors des conflits. Plus qu’un simple outil de paix, la sécurité est un enjeu de paix. En effet, la paix peut se définir comme une absence d’insécurité. Paix et sécurité se lie de la même manière que la paix se lie à l’absence de conflit. Nous pouvons observer un certain antagonisme dans la relation entre la paix et la sécurité. La question de la sécurité peut mettre en scène deux points de vus opposés. D’une part, on peut considérer qu’elle implique défense et protection par les armes. Cette vision n’implique pas nécessairement l’absence de violence. La protection des uns face aux autres peut être le lieu de violences extrêmes. Cette position pourrait être appelée « sécuritaire ». Au contraire, on peut considérer que la sécurité implique nécessairement une absence d’armes, dans la mesure où les armes elles-mêmes impliquent la violence. Cette deuxième pose la sécurité comme nécessairement non-violente. Dans le cadre de la politique de sécurité nationale et internationale, il est intéressant d’interroger le rapport entre l’action militaire et la sécurité non-violente. L’action militaire implique-t-elle nécessairement une sécurité violente et armée ?
Ces deux visions antagonistes peuvent s’étendre à la notion de paix : d’une part, la paix dans le sens de la protection contre la violence contre soi, et d’autre part dans un sens plus collectif, d’une paix commune et partagée, et non dans un rapport de l’un contre l’autre. Cette dernière vision présente une paix plus positive et constructive que la première.
La sécurité dans son rapport à la paix se doit donc de considérer les valeurs politiques de paix pour une durabilité : plutôt qu’une simple sécurité physique, et dans une responsabilité, elle se doit d’invoquer les droits de l’homme, les différents aspects du développement, la société civile, et les aspects de co-construction et de coopération dans le vivre-ensemble.
2. Les actions pour la sécurité.
Parmi les acteurs de paix qui travaillent pour la sécurité, on observe que certains ne montrent qu’un aspect militaire et juridique, sans présenter l’aspect développemental, tandis que d’autres, en s’attachant à des thématiques de sécurité plus spécifiques, s’engagent pour une sécurité durable et partagée. Nous étudierons donc les acteurs de sécurité du plus généraliste au plus spécifique, en évoluant d’une sécurité plutôt neutre à une sécurité non-violente.
Le Centre pour la Paix et la Sécurité Humaine en France, et l’Institut Européen pour la Sécurité de l’Union Européenne, ont une approche globale de la sécurité, où elle est appréhendée comme internationale. Les thèmes tels qu’ils apparaissent dans la présentation des instituts sont surtout ceux de la sécurité militaire et légale. Ces deux centres posent tout deux un nouvel ordre mondial : le CPHS insiste sur les nouvelles menaces et l’IESUE réfléchit sur les conséquences de la mondialisation. Si ces deux instituts posent les mêmes problématiques, ils travaillent différemment : Alors que le CPHS base son action sur le savoir, la connaissance, dans une visée théorique, l’IESUE travaille directement pour les acteurs institutionnels européens. Ces deux acteurs sont assez généralistes, et « institutionnels » : la recherche sur la sécurité apparaît comme théorique. De cette généralité par la théorie, le lien entre la sécurité et la paix se fait assez difficilement. Les visions restent neutres, dénuées des valeurs de paix. Si le CPHS pose dans ses thématiques les droits de l’homme, il ne les avance pas réellement comme une valeur de paix.
Nous voyons apparaître des valeurs de paix liées à la sécurité dans l’engagement du CMI, en Finlande. Le Crisis Management Initiative, ou « Initiative de gestion de crise » pose la nécessité d’une sécurité durable, sans poser un nouvel ordre mondial. Cela montre un engagement certain vers une finalité précise, celle de la résolution de crise. Il a une visée internationale, et son action se centre sur l’analyse, l’action de terrain et le plaidoyer. La sécurité passe ici par les processus de peacebuilding, et de gestion de crises civiles. Pour la « durabilité », elle se lie au développement, à la justice, à la gouvernance et à la réconciliation. Son approche de la sécurité est donc assez globale mais reste liée à des valeurs de paix fondamentales.
La Société Suédoise de Paix et d’Arbitrage - SPAS - a une approche de la sécurité beaucoup plus spécifique et orienté que les premiers acteurs de sécurité présentés : l’action non-violente, par la réflexion, la coopération et le plaidoyer. La sécurité passe ici par le désarmement, vers le développement et la démocratie. Le SPAS s’engage donc dans des valeurs précises, contre une sécurité armée. La sécurité devient ici un outil de paix positive et durable, lorsqu’elle est une sécurité sans armes, c’est-à-dire non-violente. La valeur de la non-violence en fait un outil de paix fondamental.
Enfin, le Centre de Soutien pour les Associations et les Fondations - SCAF - a une action de sécurité beaucoup plus spécifique, intégrée dans une action de promotion de la démocratie et de société civile. Intégrée dans un tel projet, la sécurité est spécifiée comme l’action contre les mines anti-personnelles et contre les armes légères. La sécurité est intégrée dans l’unité d’une action politique pour la paix.
Nous pouvons remarquer que le thème global de la sécurité est davantage présent dans les centres plus « institutionnels » que de terrain. Ces Centres sont français, suédois, finlandais : les Centres de Etats puissants semblent s’attacher davantage à une approche globale et internationale de la sécurité, tandis que les ONG de terrain, nées dans des conflits récents, s’engage pour la sécurité de manière plus spécifique, juridique ou pour le désarmement par exemple.
En étudiant les différents thèmes de l’action politique des acteurs de paix des pays européens, nous avons pu mettre à jour, derrière les outils, de multiples valeurs de paix. Les outils de paix tels le Peacebuilding, le cadre juridique ou encore la sécurité nous révèles les valeurs de paix fondamentales : la démocratie, la société civile, les droits de l’homme, pour une paix positive.
Des outils au valeurs politiques de paix, nous avons découvert une notion positive de la paix : nous passons de la simple résolution de conflit, où la paix est une absence de conflit, aux valeurs de démocratie, de société civile et de droits de l’homme, où la paix devient une paix positive et durable. La sécurité, par son danger, renforce l’importance et les enjeux d’une paix positive.
Les valeurs de paix positives se réunissent dans un vivre-ensemble, dans la co-construction vers une finalité commune. De nouveaux outils et de nouvelles valeurs de paix vont alors intervenir dans ce vivre-ensemble. Après avoir considéré la paix dans ses aspects politiques, nous devons désormais considérer la paix dans ses aspects culturels.
Notes
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(1) : Site internet : www.beyondintractability.org Document : www.beyondintractability.org/essay/peacebuilding/?nid=5154
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(2) : « Peacebuilding is a process that facilitates the etablishment of durable peace and tries to prevent the recurrence of the violence by adressing root causes and effects of conflict through reconciliation, institution building and political as well as economical transformation” Ibid.
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(3) : www.respond.org
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(4) : Jacques Semelin (dir.), Quand les dictatures se fissurent, résistances civiles à l’Est et au Sud, Paris, Desclée de Brower, coll. Cultures de Paix, 1995, article de Michel Wieviorka, « La démocratie comme état de grâce »
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(5) : Définition « Démocratie » Le Petit Robert
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(6) : Michel Wieviorka, Opus cité, p.233
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(7): Ces deux définitions ne reviennent pas au même, suivant que l’on considère le régime comme une entité en tant que telle, ou au contraire comme un construit.
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(8) : Article 1 de la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme et du Citoyen.
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(9) : Hannah Arendt, Les Origines du totalitarisme, Paris, Fayard Points Essais, 1982
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(10) : Arendt, Tome III Le système totalitaire, Ibid.
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(11) : Opus cité p. 238
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(12) : www.centar-za-mir.hr
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(13) : Article « histoire de la Biélorussie » fr.wikipedia.org/wiki/Histoire_de_la_Bi%C3%A9lorussie
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(14) : Peut-on alors parler de nature humaine ? Doit-on opposer aux droits de l’homme un droit des cultures ?
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(15) : Opus cité, Tome II, L’impérialisme
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(16) : Cf site du CPHS, site de l’IESUE, et fiche « une approche de la prévention des conflits. Les questions de sécurité : une préoccupation d’importance mondiale au XXe siècle » par Emilie Bousquier sur le site de ressources irenees.net.