Henri Bauer, Cusco, Perou2003-07
Présentation de quelques initiatives de paix face aux conflictualités dans la région andine de Machu Picchu
Comment les péruviens abordent-ils leurs intérêts apparemment contradictoires de l’économie et de l’écologie ? Comment établissent-ils une cohérence entre leurs aspirations de « développement économique » venant répondre en même temps à leur situations de pauvreté et à leur culture de protection de la nature ?
Des conflits verts dans la région andine, l’exemple de la région de Machu Picchu
Vendredi 18 juillet 2003. L’avion qui de Lima me conduit à Cuzco est rempli de touristes étrangers. Il veulent visiter Cuzco et Machu Picchu. Un autre vol est parti une demi-heure avant, le suivant partira dans une demi-heure… Les conversations sont en plusieurs langues : espagnol, anglais, français, allemand, hollandais, italien, japonais… Nous arrivos à Cuzco, il fait froid. Hébergé à « la casa campesina » je prépare mon séjour en buvant un thé de coca en compagnie de paysans de la région également hébergés ici.
Cuzco est aujourd’hui une ville impressionnante. Ville indienne, inca, séculière. Colonisée au XVIe siècle par les conquistadors espagnols. La ville reflète bien, encore aujourd’hui, cette double réalité non seulement dans son architecture mais surtout dans sa population. Elle est habitée par des descendants des Incas, travaillant en majorité la terre, une petite minorité travaille dans la ville au service des élites locales et des touristes. La plupart vivent dans des conditions socio-économiques assez difficiles. Mais Cuzco est également habitée par une minorité qui gère le commerce, de plus en plus florissant, grâce au passage de milliers de touristes par an. Le centre-ville est consacré presque entièrement à l’accueil des touristes qui se rendent à Machu Picchu (restaurants, magasins, agences de voyages…).
Le sanctuaire « Machu Picchu » : des conflictualités vertes
Dès que Machu Picchu a été connu dans le monde, il évoque des images d’un monde spectaculaire, mystérieux, mythique et mystique. Le monde occidental se dit ébloui du charme naturel d’un tel lieu. En effet, il s’agit d’une région très riche grâce à son histoire et à son architecture mais aussi grâce aux différents habitats qu’elle possède et à la grande biodiversité qu’elle contient. Les scientifiques ont classé dix habitats différents, allant des 6721 mètres des montagnes enneigées jusqu’à la forêt tropicale amazonienne. Afin de préserver de telles richesses, le gouvernement péruvien a établi le « Sanctuaire historique Machu Picchu » comprenant plus de 32 000 hectares. En 1983, l’UNESCO le désigna comme patrimoine mondial de l’Humanité.
Cette image idyllique masque une réalité de plus en plus dramatique. Les touristes arrivant dans la région sont de plus en plus nombreux. Les populations locales s’ouvrent et s’adaptent à cette population touriste passant sans cesse avec sa culture, ses habitudes, ses capitaux. Les autorités locales tentent aussi de s’adapter et de répondre aux nouvelles exigences concernant la gestion des lieux.
De multiples conflits se développent entre différents domaines : la nécessaire préservation des ressources naturelles, les envies des touristes, les situations socio-économiques des populations locales, la préservation archéologique des lieux historiques, les exigences de l’administration, les intérêts commerciaux, etc. Les intérêts des différents acteurs qui se rencontrent à Machu Picchu sont aussi nombreux, différents et imbriqués que les habitats qu’ils prétendent protéger.
En 1988 puis en 1994, le ciel de Cuzco était devenu gris et la ville était couverte d’une couche de cendres provenant des nombreux incendies de la région. Des milliers d’hectares furent embrasés par le feu qui emportait avec lui des milliers de plantes et d’animaux. Les incendies provoqués par les paysans ravagent chaque année des milliers d’êtres vivants entre juillet et août. Un sol de plus en plus appauvri par l’érosion et brûlé chaque année ne fait que perdre ses capacités de régénération. Cette destruction de l’environnement naturel de la région, en raison de la situation socio-économique des populations locales indiennes contraintes de cultiver des produits agricoles sur des terres de moins en moins fertiles qui seront par la suite vendus sur le marché à des prix dérisoires, est l’un des conflits majeurs pour la région andine.
Cependant les conflits provoqués par les situations socio-économiques des populations pauvres ne sont ni le seuls ni les moins importants. L’exploitation du bois d’œuvre mise en œuvre par des agents industriels ou par des gros propriétaires terriens avec des moyens détruisant profondément l’écosystème, par exemple lorsqu’ils abattent des centaines d’arbres pour n’en récupérer que quelques-uns « économiquement intéressants », ravage les forêts laissant les sols à nu et impropres à la culture.
La quantité des touristes qui se rendent tous les ans dans la région provoque de plus en plus un conflit à grande échelle. Les besoins en nourriture, en services, en produits de consommation, en infrastructures, en énergie, suivent l’augmentation constante de la quantité annuelle de touristes. Les modes de vie des populations locales se trouvent bouleversés. Celles-ci tentent de s’adapter en remplaçant l’agriculture par les services aux touristes : les paysans deviennent hôteliers, restaurateurs, traducteurs, guides touristiques, les villages se transforment, les mentalités locales connaissent des phénomènes d’acculturation et de contre-acculturation, les rapports sociaux changent et des nouveaux conflits émergent. Le village de Aguas Calientes consitue un bon exemple, avec le passage obligé des touristes se rendant à Machu Picchu. Au départ ce village était à 100 % agricole. Aujourd’hui ses habitants se tournent vers le tourisme. Ils sont contraints d’accueillir des populations agricoles venant d’ailleurs pour chercher d’autres possibilités économiques. La croissance de la population et des services qu’ils rendent aux touristes les pousse à remplacer la forêt par des plantations et par l’élevage…
Cet écosystème connaît une dégradation continue du fait du développement sans cesse accéléré des activités humaines, à tel point que la relation de dépendance réciproque qui prévalait il y a cinquante ans entre les populations et leur environnement naturel laisse place à des relations de domination des premiers sur le second.
L’administration d’une telle complexité de relations est devenue à son tour conflictuelle. L’autorité sur le sanctuaire est distribuée entre des communautés indiennes locales, des entreprises, des institutions gouvernementales qui, en raison de leurs intérêts divergents, sont à leur tour dans une dynamique de concurrence interne…
Les conflits sont de plus en plus nombreux, entre des populations locales, ayant des modalités particulières de gestion de la terre chargées d’éléments culturels et religieux, des intérêts privés portés par des entreprises développant des démarches rationnelles guidées par les valeurs du capitalisme, et les administrations mettant en place des politiques et des mesures concrètes guidées, le plus souvent, par les gains touristiques et commerciaux que la région peut produire.
La notion de « protection de l’environnement » trouve d’importantes difficultés à être acceptée dans une région où s’affrontent un projet économique global visant à la mettre sur les voies du « développement » et une population vivant des conditions de pauvreté très importantes.
La Bolivie, un conflit pour les ressources naturelles
La région de Cuzco s’étend historiquement jusqu’à l’actuelle Bolivie. Les conflictualités ne sont pas très différentes. Alors que le sous-sol de la Bolivie renferme les plus vastes réserves de gaz naturel d’Amérique du Sud après celles du Venezuela, la pauvreté frappe 60 % des 8,3 millions de Boliviens, dont plus de 60 % sont amérindiens.
Des indiens qui, en raison de leur valeurs culturelles, portent une vision sacrée de la terre et de ses ressources : la Terre, mère de la vie et de tous les hommes, garde en son sein les ressources nécessaires à l’épanouissement de la communauté humaine. Ces ressources ne sont la propriété de personne, elles font partie des éléments vitaux de l’univers. L’homme, quant à lui, n’est pas au « centre » de l’univers, il n’est pas non plus sur terre pour la dominer, il fait partie d’elle, il doit vivre en harmonie profonde avec la nature et tous les êtres vivants. L’homme et les ressources naturelles sont dans une relation originale d’enrichissement et de dépendance réciproques. Si l’homme prétend dominer la nature, celle-ci a le droit de se venger par des catastrophes naturelles. La relation aux ressources naturelles doit se faire dans le plus grand respect envers : celles-ci ne pourront jamais servir à diviser les hommes, voire à provoquer des malheurs.
Cette représentation que les populations indiennes boliviennes se font des ressources naturelles est doublée de leur condition de pauvreté matérielle. Elles pensent que les hommes ayant des valeurs différentes des leurs ont prétendu dominer la nature en exploitant ses ressources dans une démarche économiquement mercantiliste et politiquement discriminatoire : les ressources ainsi exploitées par des entrepreneurs et par des dirigeants politiques ont servi à enrichir une minorité et à maintenir la grande majorité de la population du pays en conditions de pauvreté.
C’est dans ce contexte que le conflit lié à la gestion des ressources naturelles a explosé en 2003.
Faisant suite à la loi de libéralisation des hydrocarbures, privatisant l’extraction et la distribution du gaz naturel et du pétrole boliviens et mettant une grande partie des ressources naturelles de la Bolivie à la disposition de sociétés américaines et européennes, il était prévu d’exporter du gaz naturel bolivien liquéfié vers les États-Unis et le Mexique à partir de 2006, via le Chili, la Bolivie n’ayant pas de sortie maritime.
Les populations indiennes se sont senties immédiatement concernées par l’exploitation des ressources naturelles de leur pays pour l’exportation : elles ont voulu exprimer leur mécontentement vis-à-vis de l’initiative gouvernementale.
Un mouvement de protestation s’est rapidement développé depuis la mi-septembre 2003 à coup de barrages routiers et de manifestations dans les rues. La Confédération syndicale des travailleurs agricoles, dirigée par l’Indien aymara Felipe Quispe, les cocaleros (cultivateurs de coca) dirigés par le charismatique Indien quechua Evo Morales, député du Mouvement vers le socialisme (MAS, deuxième force parlementaire) et surtout, porte-parole de 30 000 familles de cultivateurs de la coca (matière première, entre autres, de la cocaïne) et la Centrale ouvrière bolivienne (COB, principal syndicat) ont été rejoints progressivement par des collectifs de professeurs, d’étudiants, de commerçants, de mineurs, etc. ainsi que des comités de quartier, surtout à El Alto, ville satellite de La Paz.
Les principales revendications du mouvement sont alors au nombre de cinq.
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La participation effective à la gestion des ressources naturelles boliviennes afin que leur culture soit prise en compte dans l’élaboration des décisions nationales. Les Indiens affirmaient qu’il était injuste d’exporter le gaz bolivien sans en faire bénéficier auparavant ou simultanément les populations boliviennes elles-mêmes, notamment les plus pauvres, par des infrastructures domestiques et industrielles qu’il était urgent de créer. Ils exigeaient un référendum sur la question.
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La protestation contre la situation de pauvreté économique et d’exclusion politique dans laquelle les populations indiennes sont obligées de vivre. Concrètement, ils exigeaient la tenue d’une nouvelle Assemblée nationale constituante chargée d’élaborer une nouvelle constitution afin de refonder la société bolivienne sur des valeurs tenant compte des cultures indiennes.
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La non participation de la Bolivie à la future Zone de libre-échange des Amériques (ZLEA ou, en espagnol, ALCA), comme un geste d’opposition aux effets négatifs de la mondialisation économique qui se faisait, à leurs yeux, sans et contre eux.
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L’arrêt de la répression contre les cultivateurs locaux de coca. L’éradication forcée des cultures de coca « la feuille sacrée des Incas », soutenue par les États-Unis, a facilité la mobilisation des cocaleros. La loi bolivienne autorise une production de 12 000 hectares de coca dans la région des Yungas pour satisfaire la demande du secteur pharmaceutique et la coutume ancestrale consistant à mâcher ses feuilles. Toute production excédentaire est considérée comme alimentant le narcotrafic et est mise hors-la-loi. Par l’action de l’armée, 40 000 hectares de coca ont été éliminés dans le Chaparé depuis la fin des années 1990. En 2000 déjà, la coca bolivienne n’employait plus que 16 000 personnes, contre 67 000 en 1997.
Evo Morales, leader des cocaleros, affirmait dès 2001 que les propositions de culture de substitution de la coca ne seraient que du brouillard servant à masquer l’ingérence des États-Unis, ainsi que la mise en place de programmes basés sur une rentabilité douteuse. En effet, disait-il, le refus des États-Unis et de l’Europe d’importer davantage de produits agricoles des pays en développement (l’une des raisons les plus importantes de l’échec de la 5e Conférence ministérielle de l’Organisation mondiale du commerce (OMC), à Cancun en 2003) oblige les cocaleros à se poser une question de fond : à quoi bon se lancer dans d’autres cultures, que les États-Unis et l’Europe refusent d’acheter ou n’achètent qu’à bas prix ?
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La démission de « Goni », le président Gonzalo Sanchez de Lozada, un libéral multimillionnaire qu’ils qualifiaient de « vendeur de la patrie ».
Même si des éléments sociaux, économiques et politiques faisaient partie des revendications du mouvement, ce dernier était appelé « la guerre du gaz ». « Gaz » en raison du motif de déclenchement, « Guerre » car le mouvement n’a trouvé en face que la répression sanglante de la part du gouvernement. La télévision montrait les forces de l’ordre réprimant les manifestants ainsi que des paysans brandissant de vieux fusils. Durement réprimée par l’armée, cette mobilisation contre la gestion néo-libérale des ressources naturelles a fait plus de 80 morts et quelque 400 blessés. Accusés de tentative de coup d’État, des opposants passaient à la clandestinité.
Le chef de l’État ne voulait voir en la « guerre du gaz » qu’un conflit local et marginal. Il mettait en avant les divisions séculières entre Indiens quechuas et aymaras, ainsi que les différences entre les populations andines, plus agricoles et traditionnelles et celles de l’Est bolivien, plus occidentalisées et plus tournées vers l’exportation. Mais la « guerre du gaz » a réussi à mettre le régime au bord du précipice. Conclue ou pour le moins suspendue par la fuite à Miami du président bolivien Sanchez de Lozada, remplacé par le vice-président Carlos Mesa Gisbert, la « guerre du gaz » a duré 32 jours. À peine investi à la Présidence de la République, le nouveau Président déclarait à la tribune du Congrès : « La Bolivie n’est toujours pas un pays égalitaire. Nous devons comprendre nos peuples, nos Quechuas et Aymaras ».
Il s’agit du premier conflit latino-américain ayant entraîné la démission d’un chef d’État à la suite d’un mouvement populaire et indien mobilisé autour de la gestion des ressources naturelles.
Économie, écologie et paix, quelles relations ?
Concernant les relations entre écologie et économie, deux systèmes de pensée s’affrontent de plus en plus dans la région de Machu Picchu, celui qui privilégie les critères économiques sur les réalités écologiques, et celui qui tente de maintenir un certain équilibre entre réalités écologiques et pratiques économiques. Si une partie de la population indienne veut entretenir, pour des raisons culturelles et religieuses, des relations d’harmonie avec la terre et tout être vivant, une autre façon de penser ces relations envahit de plus en plus les mentalités et les pratiques : celle qui cherche, d’abord, le profit économique à court terme et qui produit, par là même, des décalages de plus en plus importants et dramatiques entre la société et les écosystèmes dont elle dépend.
L’approche de la domination de l’écologie par l’économie qui se met en place à pas de géant dans la région de Machu Picchu peut provoquer de graves désastres écologiques, d’abord, l’effondrement de l’économie, ensuite. Aujourd’hui, les autorités politiques, des entrepreneurs, des masses de touristes et de plus en plus de populations locales privilégient le « développement » économique de la région sans égard pour les fragiles équilibres de la biosphère.
La question de la mentalité économiciste se pose, qui, concernant les relations de l’homme avec la biosphère, a élaboré des indicateurs exclusivement économiques en prenant en compte les « produits » que l’homme peut tirer de la nature mais pas les « services » que cette dernière rend à l’humanité. Lorsque ces indicateurs économiques servent de critères pour la prise de décisions concernant les relations entre l’homme et la nature, des conflits s’ensuivent.
Des conflits entre le système économique ainsi mis en place et la fragilité des ressources naturelles dont il tire son capital productif. Des conflits aussi entre ceux qui mettent en avant ce système de pensée et ceux qui cherchent plutôt des relations moins violentes entre l’économie et l’écologie.
Si l’écosystème de la région de Machu Picchu, et en général de la région andine, continue à être détruit au nom des besoins économiques, c’est parce que ceux qui en retirent les bénéfices à court terme ne sont pas conscients de l’importance vitale des coûts globaux à payer.
Plusieurs acteurs lèvent leur voix aujourd’hui à Machu Picchu et dans sa région pour pousser un cri d’alarme sur les menaces et la destruction des écosystèmes dans la région, pour demander que des modèles alternatifs de relation entre l’économie et l’écologie soient développés, pour proposer que la culture inca concernant le respect de tout être vivant et les relations harmonieuses entre l’homme et la nature soit prise en compte : selon la culture inca, la nécessité de protéger la nature ne découle ni d’un commandement divin ni d’un principe éthique, il s’agit tout simplement pour l’homme de reconnaître son appartenance à cette terre qui lui donne la vie, le nourrit, le guérit, l’émerveille et l’accueille à la fin de ses jours. Ces acteurs sont les porteurs d’une initiative andine d’« éco-citoyenneté ».
Une telle démarche permettrait que les activités économiques ne soient plus guidées exclusivement par le gain matériel mais par les indicateurs de l’environnement, d’une part, et par la gestion interculturelle, d’autre part.
Car il s’agit aussi de culture : les péruviens qui travaillent pour la protection de l’environnement mettent en œuvre des valeurs et des pratiques essentielles à toute l’humanité. Il ne s’agit pas uniquement de sauver des choses, où la planète, il s’agit de continuer à développer des qualités humaines nécessaires à la survie de l’humanité et de la vie toute entière.
Comment les péruviens abordent-ils leurs intérêts apparemment contradictoires de l’économie et de l’écologie ? Comment établissent-ils une cohérence entre leurs aspirations de « développement économique » venant répondre à leur pauvreté et leur culture de protection de la nature ?
C’est par le choc entre ces questions : modèles de développement économique, protection de l’environnement, culture locale, que j’ai découvert des initiatives de paix vraiment innovantes, comme le travail effectué par les différents membres du Centre Bartolomé de las Casas. Je pourrai le résumer en mettant en lumière trois démarches.
Premièrement, ils mettent en œuvre des tentatives pour agir en commun, pour répondre à la menace de l’isolement en s’alliant. Soutenus par des communautés paysannes de la région et accompagnés par des soutiens internationaux, ils se mettent de plus en plus en dialogue, en échange, en alliance. En effet, le CBC n’est pas un seul organisme, c’est une alliance d’au moins trois initiatives différentes : la Casa Campesina, le Colegio Andino et la maison d’édition Bartolomé de las Casas.
Deuxièmement, ils établissent des valeurs éthiques communes dans le sens, par exemple, du « développement durable » : équité sociale, efficacité économique et respect de l’environnement, de la justice sociale, etc.
Troisièmement, ils travaillent avec les populations locales pour que celles-ci participent activement à l’élaboration et à la prise des décisions qui les concernent afin que leurs initiatives soient le fruit d’une pratique de citoyenneté.
Cette triple démarche « alliance, valeurs communes, projet commun » constitue, à mon avis, une initiative innovante allant dans le sens de « la gouvernance ».
Dans cette perspective, le travail du CBC sur le changement des systèmes de pensée qui sous-entendent et qui justifient les pratiques actuelles de domination de l’écologie par l’économie, dans le sens d’un rééquilibrage des rapports prenant en compte les relations et les conflictualités, entre le social, l’économique et l’écologique, me semble très intéressante. Il en va de même pour le travail qu’ils effectuent sur ces conflictualités de façon transversale, allant de l’établissement du dialogue entre paysans et propriétaires terriens jusqu’à l’élaboration de systèmes de pensée alternatifs portant sur le symbolique. Cette démarche constitue, à mon avis, une modalité nouvelle de construction de paix par le biais notamment de la gestion des conflits.
Notes
Fiche rédigée à la suite d’un séjour au Pérou, en juillet 2003.