Pour ce faire, les quatre questions suivantes sont proposées :
Le fondement théorique de l’outil proposé met en lumière la complexité des conflits, caractérisés par la coexistence de différentes phases impliquant la construction de la paix (maintien, établissement, et consolidation de la paix). Le défi consiste à développer une stratégie complexe qui serait simultanément capable de « contenir » les effets négatifs du conflit, d’ « établir » la paix « contenir » les effets négatifs du conflit, d’ « établir » la paix (en contribuant aux processus de négociations nécessaires à sa mise en place), et de la « consolider » après l’obtention d’un accord entre les opposants (afin de préserver les acquis et de prévenir le retour de la violence).
En d’autres termes, il est nécessaire de répertorier les différentes périodes du conflit et de la paix, et d’établir en même temps des connexions entre elles. Il faut non seulement faire la distinction entre les dynamiques structurelles à long terme, mais aussi être attentif aux différentes phases du conflit, coexistant de diverses manières dans les différentes zones d’un contexte de conflit donné. On parle ici des situations où le conflit est latent, de celles où le conflit a connu une escalade de la violence, des situations où les populations cherchent des moyens de contenir le conflit, proposent des accords humanitaires, ou souhaitent démarrer des négociations de paix, et des situations post-conflit, impliquant la reconstruction et la réconciliation de la société, à traiter par un processus de consolidation durable de la paix qui, à son tour, évitera l’apparition de nouveaux rapports violents.
A partir d’une compréhension des différentes temporalités du conflit s’ensuit le besoin d’actions diversifiées de consolidation de la paix : la prévention, l’endiguement du conflit, la négociation, et les actions post-conflit.
L’analyse des initiatives de paix, et des contextes conflictuels où elles ont lieu, doit tenir compte des changements dans les relations entre différents acteurs (certains parmi ces derniers étant à l’origine du conflit et d’autres ayant permis de le transformer par des moyens non-violents).
Pour comprendre les relations entre les différents acteurs dans un conflit, il est nécessaire d’interpréter les visions de la paix et les théories du changement qui sous-tendent ces initiatives. Comme démontré par Jean Paul Lederach (1983 : 24), « Le concept de paix est généré et façonné par le contexte, la culture et les politiques dominantes desquels il émerge ».
En résumé, les étapes recommandées pour l’analyse des initiatives de paix dans un contexte conflictuel sont les suivantes :
Dresser l’inventaire des différents conflits en cours, en décrivant les phases dans lesquelles ils se trouvent, les acteurs impliqués et les intérêts ou tensions en jeu. Définir les intersections entre les différentes manifestations du conflit et leurs effets sur les différents acteurs dans un contexte donné.
Répertorier les faits et les événements ayant changé les rapports entre les différents acteurs d’un contexte donné. Examiner comment et pourquoi les relations ont changé, et quels furent les conflits ou situations violentes générés par ces changements. Identifier, par exemple, les ressources ou intérêts en jeu, les types et champs de discorde entre les rivaux, etc.
Identifier, parmi les acteurs impliqués dans le conflit, ceux qui promeuvent des initiatives de paix (Voir « Contexte » pour une explication du concept élargi des « initiatives de paix » utilisé par le CINEP). Déterminer les types d’initiatives mises en oeuvre et leur pertinence en fonction des phases du conflit où elles sont déployées.
Distinguer les différentes visions de la paix et les théories du changement qui sous-tendent chacune des initiatives de paix, et évaluer le degré de divergence entre ces différentes conceptions. Examiner les avancées de chacune de ces initiatives dans la transformation du conflit.
Dialoguer avec les acteurs engagés dans les efforts de paix afin d’analyser les dynamiques du conflit, ainsi que la pertinence et l’exhaustivité des efforts de paix dans un contexte donné. Fournir des recommandations qui renforceront leurs initiatives et leur capacité à dépasser un conflit violent grâce à une vision globale de la paix.
[1] Une théorie du changement peut se définir par un ensemble de croyances sur la manière dont apparaît le changement. Notre propre traduction s’appuie sur le texte : Designing for Results : Integrating Monitoring and Evaluation in Conflict Transformation Program, de Church et Rogers, p. 11
[2] Selon Moyer, la complexité des processus et des aspects du changement nécessite trois dimensions distinctes : les dimensions et les aspects à modifier, les différents rôles à jouer par les activistes et les organisations, et les phases ou périodes de besoin de changement social.
[3] Une théorie du changement peut se définir par un ensemble de croyances sur la manière dont apparaît le changement. Notre propre traduction s’appuie sur le texte : Designing for Results : Integrating Monitoring and Evaluation in Conflict Transformation Program, de Church et Rogers, p. 11
[4] Selon Moyer, la complexité des processus et des aspects du changement nécessite trois dimensions distinctes : les dimensions et les aspects à modifier, les différents rôles à jouer par les activistes et les organisations, et les phases ou périodes de besoin de changement social.