Christophe Garda, Paris, 2003
Paix
Les raisons pour lesquelles une société ou une culture tend plutôt vers la guerre ou plutôt vers la paix, ou bien passe de l’une à l’autre, sont finalement assez mystérieuses et dépassent en tout cas l’analyse causale stricto sensu. En revanche, il faut être au clair avec ce que définit derrière ces termes.
Concernant la paix, on peut retenir deux types de conceptions :
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{{Si l’on en croit Thomas Hobbes, “l’homme est un loup pour l’homme”, naturellement tourné vers le conflit avec ses semblables, et seul l’établissement d’un contrat social lui permet de préserver sa sécurité.}} Ce problème de la nature des rapports humains se posent aussi au niveau des Etats qui disposent du monopole de la violence légitime et sont soucieux d’exercer leur souveraineté. Cela ne signifie pas qu’ils ne sont jamais en paix, mais que celle-ci résultera davantage d’un rapport de forces consécutif à la poursuite d’objectifs internes tels que la stabilité politique, la prospérité économique ou l’harmonie sociale. Autrement dit, la paix se fonde sur la puissance des Etats plus qu’elle n’est portée par un véritable projet de vivre ensemble. Parcourir l’histoire permet en effet d’établir une classification de situations répondant à ces critères : la paix d’équilibre, la paix hégémonique, la paix impériale ou encore la paix reposant sur la terreur. Cette approche relève d’une vision purement réaliste des relations internationales selon laquelle les Etats qui structurent le système n’agissent qu’en fonction de leurs intérêts et poursuite des buts souvent antagonistes.
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La paix peut s’envisager sous un jour plus positif, comme construction sociale, revêtant un caractère moins aléatoire et plus durable : on la définira alors comme le fonctionnement régulier et pacifique d’une société qui s’est construit autour d’un système de valeurs, d’institutions, de comportements, excluant le recours à la force comme mode d’expression. On retrouve les thèmes de la paix démocratique, garantie par l’Etat de droit, la liberté des individus, le respect de l’identité de chacun, et de la paix économique, soutenue par un niveau de développement et de richesses partagé par le plus grand nombre. La paix traduit alors un état social où s’est produit une intériorisation de mœurs, de comportements, d’idées excluant la violence comme mode de règlement des conflits.
La période contemporaine illustre les deux situations, dans la mesure où certaines régions (les Balkans par exemple) ne connaissent que des périodes de paix transitoires, alors que d’autres semblent avoir construit une paix durable (ce qu’illustre l’Union Européenne). Et au-delà, elle interroge finalement sur la valeur de la paix pour l’homme et pour la société.