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En librairie

Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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, Paris, 2002

Action humanitaire

Comme l’explique Pierre de Sénarclens, ancien directeur de la division des droits de l’homme à l’Unesco, « la problématique humanitaire a envahi, depuis la fin de la guerre froide, le champ de la politique internationale ». On peut ainsi penser aux actions menées en Somalie, au Rwanda, en ex-Yougoslavie… Cependant, devant le flou qui entoure parfois ce terme, il est nécessaire d’en préciser certains éléments.

D’une manière générale, “l’humanitaire” se caractérise par l’ensemble des actions qui, en situation de crise (guerres, famines, catastrophes naturelles) visent à soulager les souffrances des populations. L’acteur humanitaire intervient donc dans les situations de détresse, lorsque des vies innocentes sont en danger. A ce titre, il participe de la solidarité qui s’exerce au nom de la dignité de l’homme. Trois domaines sont plus particulièrement représentatifs de l’action humanitaire, et traduisent une sorte de hiérarchie des besoins essentiels : la santé, l’alimentation et l’accueil des populations constituent ainsi les priorités auxquelles il faut répondre afin de rétablir un niveau minimal de sécurité humaine.

L’action humanitaire repose sur quelques fondements irréductibles qui en font la spécificité :

  • Le secours porté à l’individu ;

  • La capacité à répondre aux situations d’urgence ;

  • La gratuité de la démarche (ce qui notamment distingue l’humanitaire du développement).

Dans le cadre d’une intervention en temps de guerre, se pose la question du rapport des acteurs humanitaires avec l’environnement conflictuel. On peut difficilement parler de neutralité (c’est-à-dire l’absence d’effets sur l’évolution du conflit) dans la mesure où les humanitaires, défendant les intérêts des victimes, peuvent indirectement contribuer à modifier le déroulement d’un combat ou l’intensité de la violence ; l’idée d’un acte non-partisan est plus appropriée. Leur impartialité quant au traitement des populations, en revanche, ne peut normalement pas être contestée. Quels que soient son camp, sa religion, sa race, sa nationalité, sa condition sociale ou son appartenance politique, la victime est avant toute autre chose une personne en danger, un humain à secourir.

Les acteurs humanitaires les plus emblématiques sont bien sûr les organisations non-gouvernementales : Médecins Sans Frontières, Médecins Du Monde, le Comité International de la Croix-Rouge. Parallèlement à ceux-ci, l’Organisation des Nations Unies s’est montrée, au cours des années 1990, plus présente, à travers notamment le Haut Commissariat pour les Réfugiés, qui a mené de nombreuses opérations partout à travers la planète (les opérations de paix, quant à elles, ne relèvent pas à strictement parler de l’action humanitaire).

L’action humanitaire ne va bien entendu pas sans difficultés, opérationnelles notamment, mais pas seulement. En effet, elle se heurte parfois au principe fondamental de la souveraineté d’un Etat sur ses affaires intérieures : en fonction de quelle légitimité des acteurs extérieurs sont-ils habilités à agir ? Cette question s’est posée avec acuité aux différents protagonistes. Pour y répondre a été élaboré, en 1988, le “droit d’ingérence” selon lequel la souveraineté nationale doit s’effacer dès lors que l’existence même des populations est menacée. C’est au nom de la dignité fondamentale de l’homme, de son droit à la vie dans des conditions de décence minimale que l’intervention humanitaire se justifie.

Trois dangers, enfin, menacent l’action humanitaire :

  • Le poids des médias et de l’opinion publique, qui peuvent nuire au discernement et à l’analyse nécessaires, même dans l’urgence ; un triple danger : porté avec lucidité par Mario Bettati « l’inflation humanitaire… »

  • Le statut de palliatif à l’action politique, comme le souligne Mario Bettati : « l’inflation humanitaire dissimule la carence politique, qui s’esquive derrière l’humanitaire » ;

  • La contre-productivité de l’action, par exemple lorsque l’aide alimentaire est détournée, qu’un réseau parallèle de distribution se crée…

Au-delà de ses enjeux et de ses limites, l’action humanitaire place la communauté internationale face à ses responsabilités.