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En librairie

Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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Fiche de notion

, Grenoble - France, mai 2006

La culture de la paix

Si la préoccupation pour la paix est inscrite dans l’histoire même de l’humanité et accompagne l’activité humaine depuis les origines, le concept de « culture de la paix » est le fruit d’une élaboration beaucoup plus récente. On peut pratiquement considérer que son apparition est contemporaine de cette période charnière importante qu’a constitué la fin des années 80 coïncidant avec la fin de la guerre froide. Ces changements se sont eux-mêmes produits après les grands conflits et les grands bouleversements qui ont fait du XXème siècle un siècle de fer et de sang mais aussi un moment particulièrement riche en efforts de construction et d’organisation de la communauté mondiale. C’est ainsi que la décolonisation et la construction européenne ont pu être perçues par certains comme de véritables révolutions à la fois politiques et culturelles. C’est pourquoi, à l’opposition sèche et réductrice : « guerre - paix »  - qui oblige à affirmer que la paix n’est pas uniquement l’absence de guerre – nous avons très rapidement préféré l’opposition plus féconde « culture de guerre - culture de paix » qui fait plutôt appel à l’idée de processus et rend davantage compte de la complexité des comportements humains, sans éliminer, d’ailleurs, « l’ambiguïté que cet état [de paix] comporte » comme l’écrivait en janvier 1994, Raymond Rehnicer, cet intellectuel qui voulait rester yougoslave mais qui avait fini par devoir fuir sa ville Sarajevo et qui était resté traumatisé par son siège.

Les racines du mot culture sont liées aux premières sédentarisations : il s’agit d’habiter, donc de cultiver le sol, de produire et de se nourrir… mais aussi d’honorer les morts. Au même titre que la culture produit pour nourrir, donc pour faire vivre, la culture de la paix va produire la paix, la vie. Les lois de la physique constatent que tout système, sans apport d’énergie extérieur, est voué à se dégrader ; le régénérer suppose donc un travail et la vie implique donc de … cultiver et de se cultiver. Le dictionnaire définit aussi la culture comme : « l’ensemble des formes acquises de comportement dans les sociétés humaines ». Notre volonté, à l’Ecole de la paix, et l’objet de notre association étant bien de faire évoluer des mentalités pour que des comportements changent et que s’instaurent, selon nos statuts, des « relations sociales plus pacifiques », promouvoir la culture de la paix, ce sera pour nous, logiquement, créer les conditions favorables au vivre ensemble. A noter que le Cheikh Khaled Bentounès, maître soufi, à l’occasion d’une manifestation des Scouts musulmans de France en 2003, définissait la paix comme étant « la consolidation des liens entre les hommes et le partage des biens communs » .

L’UNESCO qui, dans la famille des agences spécialisées de l’Organisation des Nations Unies, a en charge, à la fois, l’éducation, les sciences et la culture, et dont la création s’est faite sur la conviction inscrite dans sa constitution de 1945 que « les guerres prenant naissance dans l’esprit des hommes, c’est dans l’esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la paix », a logiquement œuvré pour promouvoir cette notion de culture de la paix et faire que la communauté mondiale s’y réfère les plus systématiquement possible et en tire les conséquences. C’est grâce à elle que l’Assemblée générales des Nations Unies adopte en sa 53ème session, en octobre 1999, le texte qui stipule, en son article premier :

« La culture de la paix peut être définie comme l’ensemble des valeurs, des attitudes, des traditions, des comportements et des modes de vie fondés sur :

  • le respect de la vie, le rejet de la violence, la pratique et la promotion de la non-violence,

  • le respect des principes de la souveraineté, de l’intégrité territoriale et de l’indépendance politique des Etats et de la non-intervention… conformément à la Charte des Nations Unies et au droit international,

  • le respect des droits de l’Homme et des libertés fondamentales et leur promotion,

  • l’engagement de régler pacifiquement les conflits,

  • l’effort de répondre aux besoins des générations actuelles et futures en ce qui concerne le développement et l’environnement,

  • le respect et la promotion du droit au développement,

  • le respect et la promotion de la parité hommes/femmes,

  • le respect et la promotion des droits de chacun à la liberté d’expression, d’opinion et d’information,

  • l’adhésion aux principes de liberté, justice, démocratie, tolérance, solidarité, coopération, pluralisme, diversité culturelle, dialogue et compréhension (dans la société et entre les nations) ; encouragés par un environnement nationale et international favorisant la paix » .

L’article second précise : « L’épanouissement d’une culture de la paix est fondé sur la transformation des valeurs, des attitudes et des comportements de telle sorte qu’ils contribuent à promouvoir la paix entre les individus, les groupes et les nations. »

Le Manifeste 2000 pour une culture de la paix et de la non-violence, élaboré par un groupe de Prix Nobel de la paix à l’occasion de la célébration du 50e anniversaire de la Déclaration universelle des droits de l’homme, dresse la liste des engagements correspondants :

  • 1 – Respecter toutes les vies

  • 2 – Rejeter la violence

  • 3 – Libérer sa générosité

  • 4 – Ecouter pour se comprendre

  • 5 – Préserver la planète

  • 6 – Réinventer la solidarité

Face aux réalités, à des situations et à des crises, voire à des conflits particuliers, le concept de culture de la paix fait l’objet d’une définition qui peut être formulée différemment selon les circonstances ou les sensibilités qui s’expriment. Deux exemples permettent d’en juger :

  • La grille de lecture créée par l’Ecole de la paix pour analyser la situation au moment de la guerre du Kosovo, en 1999, et reprise pour le forum Internet de l’après 11 septembre 2001 « Comprendre pour agir » a retenu les quatre composantes suivantes :

    • Les droits de la personne

    • La démocratie

    • Le développement durable

    • Le vivre ensemble

  • Andrea Riccardi, le fondateur de la Communauté de Sant’Egidio, qui a la réputation d’un savoir faire en matière de médiation internationale pour la résolution des conflits, déclarait en mai 2003, à propos du regain de violence guerrière que constituait objectivement l’action militaire conduite par les Etats-Unis d’Amérique en Irak : « Il reste à construire une culture de paix fondée sur : le discours de la solidarité, une Europe politique et militaire, la lutte contre la pauvreté, le consensus des opinions publiques. »