Nikki HODGSON, Henry TIDY, Grenoble, 2011
Le projet « Eau et Bon voisinage » de Friends of the Earth Middle East
« Friends of the Earth Middle East » rassemblent les municipalités et les collectivités locales pour faire face aux menaces qui pèsent sur leurs ressources naturelles partagées.
Mots clefs : Travailler en Alliance | Conflit israélo-palestinien | Exploitation durable et responsable de l'eau | Etablir le dialogue entre les acteurs et les partenaires de la paix | Israël | Palestine | Moyen Orient
Wadi Fukin, un petit village palestinien de 1.200 personnes en Cisjordanie, se trouve entre Tzur Hadassah, (une communauté israélienne d’environ 5.000 habitants, à l’ouest) et Betar Illit, (une colonie juive orthodoxe à croissance rapide de quelque 35.000 habitants, à l’est). Mis en avant par l’Autorité des Antiquités palestinienne en tant que patrimoine de l’UNESCO, Wadi Fukin, comme beaucoup de villages palestiniens, se trouve à côté de la Ligne verte et risque d’être séparé de ses terres et de ses voisins par le mur de séparation israélien. Cependant, contrairement à de nombreux villages palestiniens, Wadi Fukin bénéficie d’un allié solide dans au moins un de ses voisins israéliens : Tzur Hadassah. Ce village participe, avec Wadi Fukin, au projet « Good Water Neighbors » (Eau et Bon voisinage) géré par « Friends of the Earth Middle East », une ONG israélo-palestinienne-jordanienne qui aborde des problématiques environnementales dans l’objectif de réunir les communautés pour mieux gérer les ressources partagées.
Fondée en 1994, Friends of the Earth Middle East - FoEME travaillent pour la protection des ressources environnementales de la région et la promotion d’une coopération transfrontalière dans la gestion de l’une des ressources qui disparaissent rapidement de la région: l’eau.
Le processus de paix israélo-palestinien étant dans une impasse perpétuelle, de nombreux problèmes sont apparus :
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un manque de traitement des eaux usées,
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le pompage excessif des nappes phréatiques,
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et le détournement excessif des flux d’eau de surface.
Ceux-ci ont créé des risques pour l’environnement et la santé des communautés israéliennes et palestiniennes. C’est dans ce contexte que Friends of the Earth Middle East rassemblent les municipalités et les collectivités locales pour faire face aux menaces qui pèsent sur leurs ressources naturelles partagées. Malgré les tensions transfrontalières, ces communautés travaillent ensemble pour faire pression sur leurs gouvernements respectifs, pour s’attaquer aux problèmes entourant la gestion inadéquate des ressources transfrontalières.
Avec la fermeture des frontières et la construction de la barrière de séparation, le contact entre Israéliens et Palestiniens devient de plus en plus limité, perpétuant ainsi les craintes et les stéréotypes existants et laissant de nombreux Israéliens ignorants de ce que c’est la vie des Palestiniens en Cisjordanie et à Gaza.
Le travail environnemental transfrontalier de FoEME a conduit à la multiplication des contacts entre les communautés, ce qui entraîne un changement subtil dans les perceptions au niveau local et qui se traduit par une action au niveau politique plus élevée. Lorsque les citoyens de Tsur Hadassah ont signé une pétition protestant contre le tracé de la barrière de séparation, ils se sont clairement exprimés sur le fait que les habitants de Wadi Fukin sont leurs voisins et non pas leurs ennemis.
« Nous ne croyons pas que le mur mènera à la sécurité », a commenté le Dr Dudy Tzfati de Tsur Hadassah. « La sécurité réside dans le respect des droits des citoyens de Wadi Fukin, et en particulier, dans le respect de leur droit à poursuivre leur tradition historique de l’agriculture, unique à cette vallée. »
Les questions environnementales constituent une arène plus neutre pour la coopération, dans laquelle les communautés sont plus disposées à se réunir pour discuter de sujets partagés tels que la pollution de l’eau au niveau régional ou la déforestation, malgré les différences politiques plus larges. La pollution des aquifères partagées, par exemple, est un sujet de préoccupation commune à la fois pour les Israéliens et pour les Palestiniens. FoEME compte actuellement 29 communautés qui participent à son projet de bon voisinage autour de l’eau, dont les communautés partenaires jordaniennes, palestiniennes et israéliennes travaillant ensemble pour gérer les ressources locales en eau. Par l’organisation de camps d’été, des programmes scolaires, des conférences, des réunions communautaires et des visites des médias, FoEME fournit aux membres de la communauté des outils de campagne d’éducation environnementale et une plate-forme pour aborder les questions environnementales dans un mode coopératif.
En rassemblant les communautés, sensibilisant le grand public, et sollicitant l’attention des gouvernements aux niveaux local et régional, FoEME a pu générer plus de 120 millions de dollars d’investissement dans ces communautés partenaires, principalement du côté palestinien pour améliorer l’approvisionnement en eau et d’assainissement. Les actions de FoEME pour réhabiliter le Jourdain ont abouti à la construction d’usines de traitement des eaux usées, la création de centres de formation d’écotourisme et d’environnement dans toute la région, l’élaboration de plans pour les parcs et des sentiers de la paix, et même l’empêchement de la construction d’une section du mur, « barrière de séparation », près de Wadi Fukin.
Grâce aux initiatives de FoEME, des communautés comme Wadi Fukin et Tsur Hadassah ont pu travailler ensemble pour protéger leurs ressources environnementales et contester la politique militaire israélienne. Même la colonie de Betar Ilit, qui déversait ses eaux usées sur les terres agricoles palestiniennes proches et les laisser s’infiltrer dans les aquifères partagés, a été contrainte d’arrêter de nuire ainsi au village de Wadi Fukin. Bientôt, grâce à l’appui de la Banque Mondiale, un nouveau réseau d’adduction d’eau sera construit pour Wadi Fukin, doublant l’approvisionnement en eau potable pour le village. Une étude est en cours pour planifier la collecte et le traitement des eaux usées de Wadi Fukin qui polluent actuellement la nappe phréatique partagée.