Enquête de terrain auprès de la population kosovare : démarche du projet et contenu de l’enquête

De janvier à juin 2003, « Equipes de paix dans les Balkans » a participé à une enquête sur le regard porté sur l’action menée par les acteurs internationaux au Kosovo. Ce projet a été réalisé en partenariat avec l’« Agence de la Démocratie Locale du Kosovo », mise en place par le Conseil de l’Europe.

Cette enquête s’intitulait: « les ONG et Organisations internationales parviennent-elles à créer un Kosovo multiethnique ? ».

{{Le projet présentait un double intérêt:

• D’une part la problématique de fond soulevée par l’enquête ;

• D’autre part la démarche pédagogique menée auprès des jeunes enquêteurs, issus des communautés albanaise et serbe, ayant participé au projet.}}

Ce projet s’inscrivait dans un contexte particulier. Depuis 1999, de très nombreux projets dits « multiethniques » avaient été menés par des ONG dans le but de rétablir le dialogue entre les communautés serbe et albanaise du Kosovo.

En janvier 2003, plus de 3 ans après la guerre, il nous a semblé intéressant de faire une première évaluation de ces activités. Nous voulions essayer de faire émerger le regard des Kosovars eux-mêmes, de savoir comment ils percevaient l’intervention internationale.

Nous voulions connaître le niveau de coopération existant entre les différentes communautés kosovares et le rôle des ONG dans cette situation. Nous voulions savoir s’il existait une dynamique spontanée de coopération en dehors des actions menées par les acteurs internationaux. Enfin, ce projet visait à donner la parole aux membres de la population locale, qui, bien que bénéficiaires des activités menées par les ONG locales et internationales, avaient peu l’occasion de s’exprimer ouvertement sur la problématique de la coopération inter-communautaire au Kosovo. Il nous semblait important que les acteurs internationaux se préoccupent de savoir ce que les populations locales pensaient de leur intervention.

Ce projet avait donc un intérêt quant au fond de la question posée. Mais on souhaitait aussi qu’il ait un intérêt par sa forme même, à savoir une enquête de terrain. Nous l’avons envisagée comme un exercice de démocratie par lequel des jeunes kosovars s’interrogeraient sur l’évolution de leur propre territoire et iraient à la rencontre de leur propre communauté.

L’idée était aussi de valoriser l’enquête de terrain comme une démarche scientifique c’est-à-dire comme moyen d’information fiable susceptible de lutter contre les préjugés et la propagande. Cela permet de changer le regard, dans un contexte très investi émotionnellement et affectivement.

La question de l’information, et de la fiabilité de l’information est centrale dans les conflits, car l’information court le risque d’être instrumentalisée. Un tel travail d’enquête permet de penser son rapport à l’information, de développer une distance critique face à l’information.

Enfin, un autre aspect du projet était l’échange entre jeunes issus de régions différentes du Kosovo. En effet, les volontaires d’EpB sur le terrain ont pu remarquer que la mobilité des individus était très réduite au sein du territoire kosovar. La liberté de circulation était quasiment nulle pour les membres de la communauté serbe, mais les jeunes albanais ne semblaient pas circuler davantage. Ainsi, la réalisation de ce projet devait aussi permettre à des jeunes d’aller à la découverte d’une autre région du Kosovo. Nous avons donc recruté des jeunes de Gjilan et de Mitrovica.

Le questionnaire était composé de 27 questions. Celles-ci portaient sur :

• La connaissance que les individus avaient des projets multiethniques menés au Kosovo ;

• Leur éventuelle participation à ces projets.

Les personnes interrogées étaient aussi sondées sur leur perception des différents acteurs locaux et internationaux intervenant dans des projets de rétablissement du dialogue inter-communautaire au Kosovo. Enfin, l’une des dernières questions portait sur la manière dont ils envisageaient l’évolution de la coopération entre les communautés et l’avenir du Kosovo de manière générale.

Commentaire

Mise en place d’une enquête de terrain à intérêt double. Avoir une meilleure connaissance de la perception qu’ont les kosovars de l’intervention d’ONG et acteurs locaux et internationaux, mais aussi ouvrir la porte à une meilleure connaissance entre jeunes de la région, qui se retrouvent isoles par la situation et le conflit.