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Transformation de conflit, de Karine Gatelier, Claske Dijkema et Herrick Mouafo

Aux Éditions Charles Léopold Mayer (ECLM)

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Fiche d’expérience Dossier : Les Organisations Non-Violentes en France

Guillaume Gamblin, Paris, janvier 2007

Cun du Larzac - une activité de formation

C’est la diversité des thématiques qui s’entrecroisent étroitement au Cun qui frappe d’abord et en fait un lieu et une expérience littéralement « foisonnant », tout en respectant une unité d’histoire et de valeurs fondatrices. Pour mieux comprendre cette diversité, nous avons choisi de présenter les activités du Cun comme pôle de formation.

Mots clefs : Théorie de la non-violence | Education à la non-violence | Organisation non-violente | Former de nouveaux acteurs de paix | Soutenir l'organisation de sociétés civiles locales | Apprendre une culture de paix | Promouvoir une culture de paix | Eduquer à la prévention des conflits | France

I. Plusieurs étapes de développement

A. La formation militante.

Dès ses débuts l’une des activités du Cun a été la formation à la non-violence. Formation militante dans ses buts (donner des outils de combat non-violent aux personnes engagées dans des luttes sociales) comme dans ses racines (l’expérience militante acquise sur le tas par ceux qui la prodiguent) et ses moyens (très précaires). Cette formation est dès le départ essentielle en ce qu’elle contribue à faire du Cun un pôle de diffusion de la non-violence, de manière concrète. Des groupes de militants non-violents viennent sur place suivre des stages de formation sur des thèmes tels que la désobéissance civile, la défense populaire non-violente, etc…

B. Une dimension internationale.

La seconde partie des années 80 connaît en France un essoufflement général du militantisme. En conséquence la demande de formation se raréfie elle aussi. Mais dans le même temps des demandes de plus en plus nombreuses venant d’autres pays viennent équilibrer ce secteur de l’activité du Cun. A partir de 1985 et durant toute la décennie qui suit, Hervé Ott fait de nombreux voyages de formation à la non-violence et à la résolution des conflits dans des pays du Sud. Il se rend principalement en Nouvelle-Calédonie, où il intervient à 8 reprises auprès de mouvements d’émancipation kanak, ainsi qu’au Maghreb (Maroc, Algérie), au Liban, au Sénégal ou encore au Tchad. A partir de 1987 se développent de plus en plus les relations avec le Maghreb, et de nombreux stagiaires viennent de cette région pour suivre des formations au Cun. En 1993, 94, 95, sont organisés au Cun des stages sur la non-violence dans les luttes pour les droits humains, à destination de militants des pays du Sud. L’impact de ces formations est difficilement mesurable, il est qualitatif et se traduit principalement par des modifications dans l’organisation des mouvements et des stratégie qu’ils emploient. Mais d’une manière générale l’impact est d’autant plus important que l’initiative et la demande de formation viennent des mouvements eux-mêmes, et pas d’une proposition du Cun.

C. Le secteur social

Dans le même temps en France, une mutation de la demande de formation à la non-violence s’est déroulée, on pourrait dire que celle-ci est passée – partiellement - du secteur politique et militant au secteur social. Cela se traduit pour le Cun, à partir du milieu des années 90, par des interventions auprès de travailleurs sociaux, sur des thèmes tels que les conflits interpersonnels et interculturels. Il s’agit de travailler sur ses émotions et ses réactions face aux situations vécues comme violentes, pour pouvoir à son tour influer sainement sur le milieu d’intervention. Interventions fréquentes en banlieue parisienne entre autres, sur la question des violences sociales, auprès de MJC, d’éducateurs, assistants sociaux, gardiens d’immeubles, policiers, etc… En tout, plus de deux cent personnes ont été formées dans ce cadre depuis 1995. Cela a conduit les formateurs du Cun a travailler en profondeur sur la médiation interpersonnelle, interculturelle, et la dynamique et le fonctionnement des groupes notamment. Cette expérience sociale a sans doute constitué un pas essentiel vers les nouvelles orientations de son activité de formation actuelle.

D’une manière générale, il est difficile de mesurer l’impact réel qu’ont eu ces sessions de formation dans leurs contextes respectifs. Mais le nombre de personnes en ayant bénéficié est estimé à environ 150 personnes par an depuis vingt ans. La difficulté à mesurer cet impact s’accroît aujourd’hui avec l’orientation vers un public institutionnel et le travail sur des structures.

II. La formation aujourd’hui : professionnalisation, homologation et dimension européenne.

A. Professionnalisation.

L’activité de formation s’est, comme les autres, détachée de la structure Cun, dans la cadre du renouvellement de celle-ci et de l’autonomisation de chaque activité implantée dans ce lieu. C’est en 2001 qu’Hervé Ott créé l’Institut Européen Conflits Cultures Coopérations (IECCC), qui désormais la prend en charge et l’ organise. Ce nom vient de la philosophie selon laquelle « les conflits sont notre point de départ », les cultures, le terrain où ils se travaillent, et la coopération, l’objectif visé.

L’un des intérêts de la création de cette structure, est de pouvoir poursuivre les activités « délesté de la référence au Larzac militant et à la non-violence, dans une perspective plus professionnelle ». C’est le sens aussi de l’emploi du terme « institut ».

L’approche utilisée en formation est de partir du vécu des personnes, et d’utiliser des méthodes de mise en situation et de théâtre-forum en particulier, dans une optique très proche de celle des Ifman, avec qui une coopération pédagogique étroite est engagée. Face à un public institutionnel ou de travailleurs sociaux, le terme « non-violence » n’est plus employé, même si celle-ci irrigue la démarche de manière essentielle. Dans la présentation de la démarche de formation d’ IECCC, l’expression « non-violence » est remplacée (dans le cadre de l’homologation en cours) par celle d’A.T.C.C., « Approche et Transformation Constructives des Conflits », dans un souci d’ouverture culturelle et économique de cette démarche. Des formations professionnelles de consultants et Entraîneurs à l’Approche et à la Transformation Constructives des Conflits sont organises au niveau européen depuis 1997 (voir plus loin).

Même si le formateur principal est Hervé Ott, d’autres formateurs interviennent ponctuellement avec lui dans le cadre de cet institut.

B. L’impact institutionnel.

IECCC est amené à travailler de plus en plus avec des institutions : - dans le milieu associatif (CCFD, réseau de commerce équitable) ;

  • le secteur public (hôpital) ;

  • l’enseignement privé.

Sur des domaines tels que :

  • l’apprentissage du travail en réseau ;

  • l’articulation de différents niveaux (local, régional, national) ;  - la répartition des responsabilités et du pouvoir dans les groupes ;  - la formulation de fonctions bien définies…

En 2003 l’institut travaille entre autres dans un grand hôpital parisien, avec l’ensemble des cadres du personnel, débouchant sur une restructuration générale des manières de travailler. Les formations ont ainsi un impact institutionnel et une influence structurelle significatifs. Le travail s’est déplacé et se fait donc de plus en plus sur la culture et les valeurs de l’institution. La formation en général prend toujours en compte trois aspects jugés essentiels et complémentaires qui sont:

  • la personne ;

  • la structure ;

  • la culture.

Négliger l’un de ces trois aspects, c’est souvent amputer le conflit d’une dimension essentielle.

C. Homologation et dimension européenne.

L’un des défis majeurs pour ce tournant vers une meilleure reconnaissance professionnelle, est l’homologation des formations à la régulation non-violents des conflits. C’est l’un des chantiers principaux auxquels s’applique Hervé Ott, en coordination avec d’autres instituts de formation à la gestion non-violente des conflits : principalement les IFMAN (Instituts de recherche et de Formation du Mouvement pour une Alternative Non-violente). Il travaille en coopération approfondie avec ce réseau national en vue d’élaborer un modèle d’homologation à la fois adapté aux spécificités des pratiques en France, et compatible avec un modèle européen. L’objectif à moyen terme est en effet l’harmonisation de cette homologation au niveau européen. En lien étroit avec l’EICCC, créé en 2000 en Allemagne par Karl Heinz-Bittl, qui a contribué à l’élaboration d’une homologation en Allemagne, le but est également de soutenir la création d’autres EICCC en Europe, qui est dorénavant « notre horizon de travail ». L’objectif serait de faire de cet institut situé au Cun « le pôle français d’un institut à dimension européenne ». Des contacts seront pris également avec le milieu universitaire afin de faire reconnaître cette homologation dans celui-ci et de pouvoir travailler en lien avec lui.

Il faut noter qu’il s’agit d’un organisme de formation et de recherche, et cette dernière dimension est essentielle, par l’élaboration constante d’outils et de pratiques pédagogiques en particulier.

D. Les « prestations » d’IECCC

L’institut propose un ensemble varié d’interventions répondant à des besoins très divers. Au niveau de la formation proprement dite, trois grands types de prestations sont proposées :

  • Des journées de sensibilisation (médiation, différence culturelle, connaissance de soi,…).

  • Des stages d’approfondissement de 4 à 7 jours (« le jeu comme outil pédagogique », « approfondissement de la pratique de la médiation », « vivre avec nos émotions », « coopérer et prendre des décisions en groupe », « cultures et conflits »,…), qui comme les premières sont ouverts à tous. C’est dans ce cadre qu’ IECCC a été amené à intervenir avec ses partenaires des mouvements non-violents français dans le cadre de la Formation à l’Intervention Civile de Paix.

  • Des formations professionnelles diplômantes en ATCC avec les spécialisations suivantes : « Intervention-animation », « Conseil et médiation », et « Entraînement-formation ». Ces formations longues sont réparties chacune sur deux ans moyennant généralement 20 jours de stage par an soit 310 heures au total, plus 50 heures de supervision encadrée entre les stages et des expériences pratiques en cours de route. Elles sont sanctionnées par un certificat. Elles sont réalisées généralement dans un contexte interculturel franco-allemand en lien avec l’EICCC de Nuremberg en Allemagne, et s’adressent à un public de professionnels engagés dans les secteurs de l’animation, l’interculturel, les relations humaines, le travail dans des contextes de violence récurrente, qui sont amenés à intervenir à leur tour en tant que formateurs sur le terrain..

Outre ces formations qui sont proposées d’une manière déjà élaborée, l’institut Conflits Cultures Coopérations intervient également et de plus en plus à la demande d’associations, établissements, institutions, entreprises, dans des formations « sur site ». Les prestations sont alors élaborées en concertation avec les organismes demandeurs, en fonction des enjeux spécifiques, dans les domaine de l’acquisition de compétences relationnelles, de l’amélioration du fonctionnement interne, de la mise en œuvre de processus de changement, de la gestion personnelle des émotions et des situations de crise, etc…

Les autres interventions d’IECCC sont des actions de médiation (personnelle, institutionnelle, culturelle), de supervision, des conférences ou animations de tables-rondes, ainsi que des articles et publications.

L’institut a entamé un travail de capitalisation de l’expérience de formation au Cun avec la publication d’un premier dossier de capitalisation et de recherche sur « Le courage civil. Face aux incivilités » et la recherche de partenaires pour la publication de dossiers similaires sur les expériences de formation en Nouvelle-Calédonie, au Maghreb et en Afrique Noire respectivement.

Coordonnées :

  • Le Cun du Larzac

  • Tel : 05 65 61 33 26

  • E-mail : cuninstitut@wanadoo.fr

  • Site web : www.ieccc.org

Commentaire

Dès ses débuts l’une des activités du Cun a été la formation à la non-violence. Récemment l’activité est passée sous la charge de l’Institut Européen Conflits Cultures Coopérations (IECCC). Trois grands types de prestations sont proposées : des journées de sensibilisation (médiation, différence culturelle, connaissance de soi,…), des stages d’approfondissement de 4 à 7 jours et des formations professionnelles diplômantes en ATCC avec les spécialisations suivantes : « Intervention-animation », « Conseil et médiation », et « Entraînement-formation ».

Notes

Sources :

  • Entretien avec Hervé Ott du 26 Juin 2003.

  • Brochures de présentation du Cun et de IECCC.

  • Dossier « Médiations. Démarches citoyennes ».

  • Numéros du bulletin mensuel « Le Cun du Larzac ».

  • Charte et statuts du Cun.

  • Dossier ’Approche et Transformation Constructive des Conflits (A.T.C.C.)".

  • Brochure de présentation de la formation de « Consultant en A.T.C.C ».

  • Dossier"Le courage civil ».