Claske DIJKEMA, Saint Martin d’Hères, octobre 2006
L’Europe, une puissance douce
Thème de la première session de l’Université populaire européenne de Grenoble.
Le 2 octobre 2006, lors de la première session de l’Université populaire européenne de Grenoble (l’UPEG), 4 intervenants se sont réunis afin de donner leur avis sur la question suivante : «L’Union européenne, qu’est-ce c’est et quelle est sa puissance, dur, douce ou molle ? »
Les intervenants étaient :
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Jean Quatremer, correspondant permanent du quotidien « Libération » auprès de l’Union européenne et animateur d’un blog.
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Fabien TERPAN, maître de conférences à l’université de Toulouse II.
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Henri OBERDORF, directeur du Master Europe à l’Institut d’Etudes Politiques de Grenoble, Président de l’UPEG.
Henri Oberdorf commençait avec la remarque que la puissance douce est un paradoxe en citant Berttrand Badie : «L’impuissance de la puissance » est évidente en Iraq et Afghanistan où les Etats-Unis sont impuissants désormais leur puissance militaire. Donc une puissance militaire ne garantit pas nécessairement une influence importante ou la capacité d’imposer une politique. L’Union européenne est marquée par une énigme de la puissance. Ella a déjà une puissance, mais différente de celle des Etats-Unis. En quoi existe-elle ?
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Force économique
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Force normative
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Puissance des valeurs
Henri Oberdorf met alors en juxtaposition la puissance forte incarnée par les Etats-Unis et la puissance douce incarnée par l’Union européenne. Il réfère à Robert Kagan (auteur de « Of Paradise and Power ») qui lui aussi met en avant les différences entre les deux régions, qui ne partagent pas nécessairement la même vision du monde. Mais il n’en tire pas les mêmes conclusions. La question-clé selon lui est de savoir si la puissance douce est une décision positive ou négative à part de l’Union européenne ? Pouvait-elle alors faire autrement ou était-ce une question de nécessité après l’échec de la Communauté européenne de la défense, comme dit Fabien Terpan. Comment se développera sa puissance pendant les prochaine 50 années, sera-t-elle encore douce ou va-t-elle dans le sens des Etats-Unis, va-t-on de puissance douce vers puissance dure?
Quatremer précise que la puissance est « douce » à l’intérieur de l’Union parce que ses normes sont acceptées volontairement, sans l’utilisation de la force. Sa puissance à l’extérieur, mérite l’adjectif « douce » parce que nous n’aurons jamais une armée européenne avec le drapeau européenne.
L’une des raisons pour lesquelles l’Europe se ne développera jamais comme les Etats-Unis est liée à son historique. Svetla Todorov a comparé la construction européenne avec les Etats-Unis et conclu que la première se base sur l’inclusion de beaucoup de cultures différentes et est alors plus apte à traiter la complexité. Tandis que les Etats-Unis ont pris l’approche de « melting pot » (comme un pot-au-feu) qui mélange tous les cultures est en fait une soupe ; l’identité américaine remplace les identités culturelles distinctes. Quatremer stresse la particuliarité du phénomène de l’Europe, qui ne connaît pas de précédent dans l’histoire. Depuis janvier 2007, 27 Etats partagent pacifiquement leur souveraineté. Ils préservent leur propre souveraineté mais le partagent en créent une structure au-dessus. Comment décrire cette structure? Est-ce une fédération, une confédération, objet sui generis ? La seule description adaptée est la quête de compromis permanents.
Les compromis réalisés font l’objet d’un paradoxe. Les décisions prises sont souvent influencées par les incidents du passé qu’ont oublié les citoyens mais pas les institutions. Les citoyens ont alors une mémoire courte tandis que les institutions disposent d’une mémoire longue. Un évènement révélateur de ce paradoxe de mémoire date de mars 2002, quand les responsables politiques ont voté à l’unanimité à Barcelone une loi qui pousse la retraite à 67 ans. France à l’époque aussi, sous règne du socialiste Jospin ! La population est critique à l’égard de l’Europe qu’elle accuse de lui avoir imposé de travailler jusqu’à 67 ans. L’Europe en réalité, est innocente, ce sont les dirigeants politiques qui ont pris cette décision, des dirigeants qui ont été élus par ladite population.
Un exemple inverse où les institutions disposent d’une mémoire courte tandis que les citoyens agissent selon leur mémoire longue : celui des Balkans. Avec la montée des tensions là-bas, l’Union européenne aussi a connu des moments fortement tendus. Les mêmes préjugés ont resurgis et poursuites par les représentants des Etats qui ont marqué leurs rapports avant l’adhésion à l’Union. L’institution est là pour encrer les émotions dans des valeurs et des objectifs en commun.
Les questions posées au début de la conférence n’ont pas toutes trouvé de réponse. Des documents susceptibles d’apporter des éléments de réponse sont :
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La Norme sans la force, l’énigme de la puissance européenne.
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Le livre est un décryptage d’une construction plus encline à penser ses normes qu’à s’imposer par la force. Ecrit par Zaki Laïdi, éditions des Presses de Sciences Po, 2005.
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La Politique européenne de sécurité et de défense, L’UE peut-elle gérer les crises ? dirigé par Fabien Terpan, éditions des Presses de l’Institut d’Etudes Politiques de Toulouse.
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La Politique étrangère et de sécurité commune de l’Union européenne, Fabien Terpan, éd. Bruylant, 2003.
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Les Maîtres de l’Europe, de Jean Quatremer et Yves Clarisse, éditions Grasset, mai 2005.
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Of Paradise and Power : America and Europe in the New World Order Robert Kagan, Random House Inc, New York, 2003.
Commentaire
Pour écouter des extraits de la conférence, allez sur le site suivant: www.upeg.eu/conferences-archives/conf01-20061002.html#