Gaël Bordet, Sénégal, Proche Orient, Paris, 2002
L’IRCSA (International Rainwater Catchment Systems Association) : les moissonneurs d’eau
La collecte de l’eau pluviale comme solution aux déficits hydriques ?
Association internationale constituée en 1982, l’IRCSA n’a qu’un but, placer l’eau à portée de toutes les mains, et un credo : le salut doit venir du ciel.
Partant du principe que tous les moyens sont bons pour assurer un approvisionnement en eau permettant de couvrir les besoins primaires, mais également et surtout, les besoins de l’agriculture car il n’est pas nécessaire pour cette activité d’avoir de l’eau d’une qualité optimale, l’IRCSA a pris le pari de faire de la collecte d’eau de pluie la solution aux pénuries d’eau et aux litiges concernant les propriétés sur les sources et cours d’eau en tous genres…
La petite histoire semble vouloir lui donner raison, puisque, lorsque au cours des discussions de paix avec la Jordanie (1993-1994), les Israéliens annoncèrent, pour preuve de leur bonne foi, qu’ils cesseraient dorénavant de recourir aux procédés chimiques pour faire pleuvoir, les Jordaniens les prièrent au contraire de poursuivre leurs expériences car leur taux de pluviométrie s’en trouvait amélioré. Au-delà de sa symbolique, cette anecdote montre bien que la captation de l’eau de pluie est une pratique très sérieuse qui mobilise le savoir faire des plus grands scientifiques, des physiciens jusqu’aux microbiologistes.
En effet, si la collecte, pose en soi peu de problèmes, puisqu’il suffit de disposer de citernes en ferrociment, il en va tout autrement lorsqu’il s’agit, en régions à faible pluviométrie, de provoquer la chute des précipitations. L’idée force de ces recherches scientifiques consiste à « ensemencer » les nuages pour accroître leur « productivité » (les nuages étant composés de petites particules d’eau, le procédé consiste dans tous les cas à accroître le diamètre de ces particules afin d’obtenir une réaction physique et faire ainsi en sorte que ces gouttelettes atteignent le sol sans s’évaporer).
Le travail de l’IRCSA consiste donc à promouvoir ces méthodes alternatives d’approvisionnement en eau potable. Lors de sa 10e conférence qui s’est tenue à Mannheim (Allemagne) du 10 au 14 septembre 2001 et a regroupé plus de 400 participants venus de 68 pays, l’association a notamment développé ces quelques priorités pour l’avenir :
-
Elargir à davantage de pays menacés par les pénuries les pratiques de collecte d’eau de pluie ;
-
Permettre par ces procédés alternatifs de préserver les ressources en eau dans les régions de stress hydrique* ;
-
Valoriser les connaissances et techniques traditionnelles et les associer aux procédés modernes de gestion des eaux ;
-
Peser politiquement lors des conférences internationales afin de sensibiliser les acteurs politiques aux avantages des techniques de captation d’eau de pluie, et pour que prenne forme une politique rationnelle concernant ce procédé.
L’IRCSA n’est pas le seul organisme à promouvoir les techniques de captation d’eau de pluie, puisque par exemple le Centre de Recherches pour le Développement International (CRDI, centre canadien) a développé un programme en Tanzanie et un autre à Gaza, conjointement avec le Centre international des ressources en eau de l’université d’Ottawa et le Groupe d’hydrologie de la Palestine.
Commentary
Les procédés les moins coûteux et les plus rudimentaires se révèlent souvent les plus efficaces. Nul doute que La Fontaine eût écrit une belle fable sur ce principe ou que Don Quichotte eût délaissé un instant ses moulins et bâté sa Rossinante d’une barrique à eau pour la juste cause…
Pourtant, l’évidente simplicité des moissons de pluie ou de brouillards est souvent trompeuse, car de graves menaces pèsent sur l’atmosphère – donc sur les eaux de pluie et, plus encore, sur les brouillards – du fait notamment des pesticides épandus dans les airs ou appliqués à même les récoltes et entraînés par les vents. C’est ce que montrent plusieurs analyses récentes, dont une étude menée en France par l’Institut National de la Recherche Agronomique (INRA) qui insiste sur le fait que les régions d’agriculture intensive ne sont pas les seules concernées, mais que ce fléau touche l’ensemble des habitats…