Experience file Dossier : Du désarmement à la sécurité collective

, Grenoble, France, July 1996

1985-1995 : chute des dépenses militaires dans le monde et dividendes de la paix.

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Les économistes du Fonds monétaire international (FMI) constatent depuis plusieurs années une chute sensible des dépenses militaires dans le monde et s’intéressent à ses effets sur les dividendes de la paix. Deux rapports ont déjà été publiés à ce sujet en 1991 et 1993 et un troisième document paraît aujourd’hui, qui fait suite aux deux premiers.

Ces rapports font ressortir quelques chiffres intéressants: entre 1985 et 1990, les dépenses militaires, à l’échelle planétaire, ont diminué de 1,3 point de pourcentage du produit intérieur brut (PIB) mondial. Cette tendance s’est poursuivie entre 1991 et 1995 avec une chute de 1,2 point de pourcentage du PIB mondial, les dépenses militaires passant de 3,6 à 2,4% du PIB mondial (calcul basé sur un échantillon de 130 pays), par rapport à 1990. Si les dépenses militaires avaient été maintenues au niveau de 1985, en pourcentage du PIB mondial, elles auraient dépassé de 720 milliards de dollars américains leur montant de 1995 (et de $345 milliards au niveau de 1990.)

Si on compare les pays industrialisés, les pays en voie de développement, et les pays en transition économique (ex-bloc communiste) on s’aperçoit que ces derniers ont accompli les transformations les plus spectaculaires : baisse des dépenses militaires de 7,9% du PIB à 3% du PIB, soit une chute de près de 5%, entre 1990 et 1995. Les pays en voie de développement (catégorie comprenant les pays en transition économique) ont vu leurs dépenses militaires passer de 4,9% du PIB à 2,6% du PIB au cours de la même période, soit une baisse de 2,3%. Les pays industrialisés ont quant à eux enregistré une baisse des dépenses militaires plus modeste de 0,8%, et qui est passée de 3,2% du PIB à 2,4% du PIB.

En termes régionaux, les pays d’Amérique latine, qui sont traditionnellement les plus sobres en termes de dépenses militaires, maintiennent un niveau presque identique à celui de 1990, soit 1,2% du PIB en 1995 contre 1,3% cinq ans plus tôt. Les pays asiatiques non plus n’ont pas enregistré de réductions sensibles : seulement 0,5% pour un pourcentage de 2,3 du PIB en 1995 contre 2,8% en 1990. En revanche, les pays africains, qui avaient pourtant augmenté leurs dépenses militaires entre 1985 et 1990, ont réduit celles-ci sensiblement entre 1990 et 1995, passant de 3,2% du PIB à 2%, soit une réduction de 1,2% du PIB sur cinq ans.

Pour résumer, le niveau des dépenses militaires semble se resserrer et s’uniformiser à la baisse à l’échelle de la planète. Il reste à savoir comment cette baisse des dépenses militaires se traduit en dividendes de la paix. S’ils peuvent mesurer avec précision la chute des dépenses militaires, les économistes du FMI sont plus prudents lorsqu’il s’agit de définir concrètement comment la réduction des budgets militaires se transforme en dividendes de la paix. Néanmoins, certaines tendances semblent se dessiner. De manière générale, les pays qui ont réduit leurs dépenses militaires ont également réduit leurs autres dépenses et leurs déficits budgétaires tout en accroissant leurs dépenses sociales. Une partie des dividendes de la paix serait donc utilisée pour les dépenses sociales, le reste étant réinjecté dans le secteur privé, avec pour effet possible l’accroissement des investissements privés. Inversement, les économistes du FMI notent que les pays qui ont augmenté leurs dépenses militaires ont aussi fait grimper le niveau de leurs autres dépenses et celui de leur déficit budgétaire.

En conclusion, les économistes du FMI pensent que la chute des dépenses militaires, due en grande partie aux transformations géopolitiques de l’après guerre froide, en particulier pour ce qui concerne l’ex-bloc communiste, devrait se ralentir

Commentary

Les statistiques compilées par le FMI sont intéressantes, d’autant que si la logique nous laisse entrevoir un ralentissement de la chute des dépenses militaires dans les années à venir, les données actuelles ne démontrent pas encore qu’un ralentissement soit déjà amorcé. Il reste qu’il est bien difficile de savoir où se situe le seuil de "sécurité minimum" que les États choisiront, individuellement et de manière collective, pour fixer leur dépenses militaires par rapport au PIB, et aux autres pays.

Pour ce qui concerne les dividendes de la paix, il est encore trop tôt pour voir avec précision comment se traduit cette baisse brutale des dépenses militaires enregistrée au cours de la dernière décennie mais nul doute que l’avenir nous en apprendra plus.