Experience file Dossier : L’imaginaire au service de l’éducation à la paix

, Grenoble, February 2006

Intervention du pôle pédagogique de l’École de la Paix dans le cadre des mesures de réparation pénale

Apporter une réponse pénale éducative à des actes de violence effectués par des mineurs

Keywords: | | | | | | France

Le pôle pédagogique de l’Ecole de la Paix a été sollicité par l’AREPI (association grenobloise habilitée par la Protection Judiciaire de la jeunesse qui met en œuvre des mesures de réparation ordonnées par le parquet ou des Juges pour enfants) pour réfléchir à des interventions pédagogiques dans le cadre des mesures de réparation pénale. La mesure de réparation pénale a été introduite dans le code pénal par la loi de janvier 1993 (article 12-1 de l’ordonnance de 1945) qui nous dit :

« …vis à vis des mineurs auteurs des faits, pour qui cette mesure, tout en étant une réponse pénale, revêt un caractère éducatif certain. Elle permet, en effet, de leur faire mieux comprendre la portée de leur acte et s’appuie sur leur propre capacité à réparer le tort causé aux victimes ;

….vis à vis des victimes, qui trouvent ainsi une réponse rapide et adaptée aux dommages subis ;

….vis à vis de l’environnement, qui peut être associé à la mise en œuvre de cette mesure, ce qui peut contribuer à modifier sa perception de la délinquance des mineurs » .

L’acte délictueux, comme tout passage à l’acte , exprime une incapacité à respecter les règles du jeu social. Les récits de ces jeunes autour des actes qui les ont amenés jusqu’à ce temps de la répara tion racontent souvent la même histoire sans parole. « Il m’a regardé….et la bagarre a commencé… »

La mesure de réparation permet de prendre en compte l’acte délictueux comme une opportunité pour le jeune. Le temps de la réparation, tel que nous le proposons à l’Ecole de la Paix, est un temps d’arrêt. Arrêt sur image. Pendant 20 heures, 7 à 10 jeunes vont se retrouver pour mettre des mots sur leurs actes, leurs victimes, eux, la société, leurs craintes, leurs espoirs.

Deux adultes vont être disponibles pour les accueillir, les contenir, les aider à parler leurs émotions, les écouter.

Dans ce cadre là, nous invitons un artiste à nos côtés et c’est par le media de l’expression théâtrale ou du graff que le silence fait place aux mots cris, mots rebelles, mots repères, mots réfléchis, mots émus, mots vers l’autre…. alors les émotions et les mots se partagent dans une écoute mutuelle qui force le respect.

Nous demandons un engagement de chacun et nous déterminons ensemble les règles de fonctionnement du groupe (horaires, régularité, prise de paroles, respect, confidentialité…). Dur et riche apprentissage de la négociation, du compromis, de la démocratie active, de l’expression de soi dans le respect de l’autre. Notre rôle sera de favoriser la prise de conscience de l’espace de liberté généré par ces règles co-établies.

Nous insistons sur le fait que nous nous trouvons dans de cadre d’une réponse pénale éducative et que le résultat de ce temps de réparation sera présenté au juge pour enfants et aux responsables de l’AREPI.

Ce temps de « réparation » au sein du groupe est un chemin vers l’autre. Le jeune se décentre, il prend conscience que les autres peuvent avoir d’autres façons de vivre les événements. C’est un temps d’enrichissement de nos représentations mentales.

« Moi, je ne ferai pas comme ça… »

« Ok, va – montre nous comment tu ferais, toi… »

Grâce à ces interactions, une œuvre commune émerge. Chaque jeune, pour aboutir à cette co-création a dû : s’individuer, devenir son propre héros, oser prendre la parole tout en respectant les règles élaborées en commun, s’intérioriser, reprendre assez confiance en lui pour partager au sein du groupe, réfléchir donc mettre en action sa capacité à penser et proposer des alternatives au passage à l’acte violent.

« C’est le temps de la transformation de l’angoisse en création, de la dette en don, de la haine en pardon. » Maryse Vaillant - La réparation – de la délinquance à la découverte de la responsabilité –

Commentary

Ces modules nous ont permis de valoriser la notion de « travailler ensemble » . Il nous semble impératif de fédérer les acteurs de terrain autour d’actions de prévention et c’est ce que nous tentons de développer. Le travail en lien avec des artistes, nous permet d’ouvrir un chemin vers l’expression des émotions et la dimension symbolique. La paupérisation du vocabulaire émotionnel ainsi que la perte de la dimension symbolique semblent être des terreaux privilégiés de la violence