Samuel Nguembock, Yaoundé, mai 2009
« Armée et Nation, Ensemble pour consolider la paix et le développement »
Numéro spécial du magazine des forces de défense camerounaises.
Réf. : Numéro spécial du magazine des forces de défense camerounaises.
Langues : français
Type de document :
« Nous devons veiller à ce qu’une dérive du processus démocratique auquel, je le répète, nous sommes profondément attachés, ne vienne compromettre ni la stabilité de nos institutions, ni notre développement économique et social, ni bien entendu notre sécurité. Notre Armée a toujours su faire face à toutes les situations. Elle s’est montrée apte, depuis dix ans, comme par le passé, à remplir les missions qui lui étaient confiées :
- En 1991 – 1992, pendant la période de transition vers le multipartisme, en contribuant au maintien de l’ordre public ;
- Depuis 1994, en s’opposant aux tentatives d’atteinte à notre souveraineté et à l’intégrité de notre territoire ;
- Et ce moment même, en participant aux côtés des autres forces de l’ordre à la lutte contre la criminalité urbaine et rurale."
Cet extrait du discours du Président de la République du Cameroun, Mr Paul Biya constitue pour le numéro spécial de ce Magazine, le socle de la réflexion et de la problématique du rôle de l’Armée camerounaise dans la consolidation de la paix et du développement au Cameroun. Le présent numéro développe les axes majeurs suivants :
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Le statut constitutionnel de l’armée au Cameroun et son rôle dans la construction de l’unité nationale ;
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L’apport de l’armée dans l’édification de la nation camerounaise ;
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La problématique de l’orientation de l’armée camerounaise vers la paix et le développement.
Il comporte les thématiques suivantes abordées par des militaires et universitaires :
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« L’Armée et la Nation : main dans la main pour la consolidation de la paix et du développement » ;
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« L’armée, la constitution et la construction de l’Unité Nationale » ;
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« L’armée et l’édification de la nation camerounaise » ;
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« Une nouvelle ère dans l’autogestion des conflits en Afrique » ;
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« L’Armée de Terre dans le renforcement de la paix et le développement économique » ;
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« Regards sur les interventions de la gendarmerie nationale en faveur de la paix ».
L’Armée et la Nation : main dans la main pour la consolidation de la paix et du développement
En faisant un tour d’horizon des activités récentes de la défense, le Général de Division René Claude MEKA, Chef d’état-major des armées a indiqué en guise d’éditoriale qu’au plan institutionnel, la mise en place de la réforme des forces de défense notamment la professionnalisation des armées camerounaises, est pratiquement achevée et qu’un nouveau règlement de discipline générale a été signé pour s’adapter aux nouvelles dispositions de la réforme. Au plan des activités opérationnelles, le Général de division relève la très bonne prestation des forces de défense camerounaises au cours de l’exercice Barh-el gazel au Tchad en novembre 2007. Dans le cadre des opérations de maintien de la paix, les officiers camerounais et leurs hommes sont à pied d’œuvre au Darfour, en RDC et en RCA. Au niveau communautaire, le Cameroun a participé de manière fondamentale à la réunion des ministres du COPAX à Libreville en février 2008 et à celle des ministres de la défense et de la sécurité de l’Union africaine tenue à Addis-Abeba le 28 avril 2008 sur l’opérationnalisation de la force africaine en attente (FAA). Enfin le Général note dans sa réflexion que la forte implication du Cameroun au niveau de toutes ces instances dénote du souci de préserver la paix au niveau du pays, de la région Afrique centrale et en Afrique, la paix étant pour lui, une pré-condition au développement.
L’armée, la constitution et la construction de l’Unité Nationale
Pour le Professeur Alain Didier OLINGA, « l’analyse du statut constitutionnel de l’armée au Cameroun et son rôle dans la construction de l’unité nationale amène à faire d’emblée un double constat : un statut constitutionnel relativement incertain et une contribution à l’unité nationale affirmée avec récurrence, mais non exempte de quelques équivoques. »
L’auteur soulève le problème sémantique lié à la notion d’armée. Depuis, la constitution du 04 mars 1960, La Constitution de la République ne connaît pas l’armée, mais « les forces armées » dont le Président de la République est le chef. Cette réalité sémantique, précise-t-il, consacre le fait qu’il n’existe pas au sein des institutions républicaines une institution publique qui serait l’armée, ayant une légitimité propre, ayant une autonomie organique et des missions pouvant être accomplies en toute indépendance. Par ailleurs, les structures opérationnelles en charge de la gestion de la défense et de la sécurité sont organiquement rattachées à la Présidence de la République. Ce qui permet que la discrétion du traitement réservé à l’armée dans la constitution conduise à faire de cette institution un appendice de l’institution présidentielle.
En ce qui concerne la réalisation de l’unité nationale, le professeur OLINGA note au passage que l’armée n’a pas pour mission première la réalisation de l’unité nationale, mais la défense de la patrie sous les instructions politiques du Président de la République, contre les atteintes à son indépendance et sa sécurité. La réalisation de l’unité nationale ou sa préservation est une mission politique garantie par le Président de la République qui incarne en sa personne ladite unité suivant la lettre de l’article 5 alinéa 2 de la constitution. Bien plus, en 1983, le Président de la République indiquait déjà que sous le signe de la vigilance, la défense est devenue à la fois totale et permanente. Les forces armées n’en représentent qu’un aspect. Leur mission nouvelle, ce n’est plus seulement d’être l’élément armé dans la Nation, mais d’armer moralement, psychologiquement, civiquement la Nation, de manifester sa volonté d’indépendance, de participer au jeu des institutions démocratiques qu’elles ne peuvent garantir qu’en respectant les règles.
En tout état de cause, conclut le professeur, le rapport entre les armées et la nation n’est pas étranger au processus historique de la constitution même desdites forces armées, ni à la dynamique de sédimentation de la réalité nationale dans le contexte camerounais. Les forces de défense doivent donc garantir de manière intangible, ce qui est en construction ; construction dont elles sont à la fois objet et ferment.
L’armée et l’édification de la nation camerounaise
Pour le professeur Vincent NTUDA EBODE, la nation est à la fois une prise de conscience d’un passé traditionnel par les groupes assemblés, une espérance commune pour réaliser dans l’avenir une destinée et une volonté farouche de défendre les acquis et de promouvoir les valeurs.
Il existe une relation consubstantielle entre nation et défense qu’exprime, à juste titre, le concept de défense nationale. Dès lors, la mission fondamentale de l’armée dans l’édification de la nation camerounaise est, de prévenir le corps social de toutes les menaces contre le patrimoine reçu et d’extirper de la nation les germes susceptibles de porter atteinte à sa volonté de vivre ensemble. Mais, souligne le professeur, la réalisation de ces deux missions n’est possible qu’après une bonne identification des pesanteurs, en termes de vulnérabilité, susceptibles de mettre la nation en danger. Pour cela, il identifie les menaces suivantes pouvant porter atteinte à l’édification de la nation camerounaise : les menaces contre la sûreté de l’Etat, contre les intérêts nationaux et contre les personnes et les biens, d’où la nécessité de les prévenir car : « la préparation aux périodes de crise se manifeste par la mise en place de structures de commandement, l’établissement de mesures applicables en temps de paix ou en temps de guerre, en fonction de la gravité des menaces encourues ».
Fondements politiques de la doctrine militaire camerounaise
Le Dr Wullson MVOMO ELA précise dans sa réflexion que : « la paix et le développement sont les fondements politiques de tout gouvernement particulièrement des jeunes Etats ». Depuis son accession à l’indépendance, le 1er janvier 1960, le Cameroun cristallise toutes ses politiques publiques, en particulier celle de sa défense, dans la poursuite de ces deux objectifs, soutient-il.
Pour lui, poser aujourd’hui la problématique de l’orientation de la doctrine de l’armée camerounaise vers la paix et le développement revient à la mettre en perspective, pour examiner son « mouvement », c’est-à-dire son énonciation, son application différentielle et sa nécessaire re-contextualisation au regard des mutations enregistrées depuis la fin de la guerre froide.
L’auteur fonde son analyse sur trois préoccupations successives de l’évolution de la doctrine militaire camerounaise, de l’indépendance à nos jours :
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La stabilité et la sécurité de l’Etat ;
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L’opérationnalité et la citoyenneté ;
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La modernité et la sécurité globale.
Stabilité et sécurité de l’Etat :
Au cours de l’année 1960, la doctrine militaire camerounaise privilégiait l’efficacité et la victoire militaires sur le théâtre des opérations, en vue de la réalisation des objectifs politiques à savoir : la paix, l’unité nationale et le développement.
Opérationnalité et citoyenneté :
Au début des années 1970, les défis de l’Etats était principalement centrés la paix, l’unité nationale à consolider et le développement à construire. Objectif qui selon l’auteur ramène l’outil militaire à ses missions classiques de défense nationale, tout en restant attentive à l’évolution de la situation intérieure.
Modernité et sécurité globale :
Depuis les années 1990, le reconfiguration du monde et la poussée de la démocratie libérale s’accompagnent d’une mutation du paradigme sécuritaire, notamment l’atténuation des risques de guerre totale et la montée des menaces asymétriques et non conventionnelles. Dans cet environnement, la doctrine militaire camerounaise est resté ancrée à ses fondements premiers « la paix et le développement ». Paix à l’intérieur avec les soubresauts inhérents à l’apprentissage démocratique et ensuite paix avec ses voisins notamment avec le Nigeria, dans la résolution du conflit avec lequel le Cameroun respectueux du droit international a mis une stratégie permettant à la fois de circonscrire l’occupation et de maintenir la dynamique opérationnelle à un niveau lui permettant de peser sur le rapport de force bilatéral et multilatéral autour de la presqu’île de Bakassi.