Simone GIOVETTI, Paris, mars 2009
Iran, le choix des armes ?
La paix et la guerre dans le monde dépendent de l’avenir des ambitions nucléaires iraniennes.
Réf. : François Heisbourg, « Iran, le choix des armes ? », éditions Stock, Paris, 2007.
Langues : français
Type de document :
L’Iran a-t-il fait ou fera-t-il le choix des armes nucléaires ? Les Etats-Unis ou d’autres ont-ils fait ou feront-ils le choix du recours aux armes contre l’Iran ?
Trois scénarios sont à l’heure actuelle envisagées par l’auteur pour faire face à la menace planétaire représentée par la nucléarisation du Moyen-Orient : coopération, compromission, confrontation.
I. Premier scénario possible : la coopération
L’Iran renonce à franchir le pas du seuil nucléaire militaire en s’en tenant dans les faits à la suspension de l’enrichissement de l’uranium. Dans ce scénario l’Iran, dans sa posture nucléaire, rassemblera à celle du Japon, avec des capacités avérées de maîtrise des parties sensibles du cycle du combustible, mais sans passage à l’acte et sans armes.
Désormais les Etas-Unis et l’Iran pourront organiser ensemble leur action en Irak sous la prééminence chiite et en Afghanistan où ils agiraient ensemble contre les talibans et les narcotrafiquants.
Les conséquences d’une telle éventualité seraient pour l’auteur a priori bénéfiques sur le plan de la non-prolifération. Tandis que au plan régional, les suites seraient nettement moins claires : en effet comment reconnaître l’hégémonie iranienne sur le Golfe sans déstabiliser l’ensemble de la région ? les risques d’un affrontement entre le monde sunnite arabe et l’axe persan ou entre le monde sunnite arabe et l’axe chiite-irano-irakien seraient une réalité à prendre en compte.
II. Deuxième scénario possible : la compromission
L’Iran accède à l’arme et déclare de la posséder mais ne passe pas à l’acte avec des essaies. Les conséquences de ces scénarios sont désastreuses. Le régime international de non-prolifération perdrait tout son crédit. Plusieurs pays éloignés de l’Iran pourraient décider d’engager des programmes nucléaires de « précaution » (Egypte, Arabie Saudite). Le risque d’un conflit nucléaire qui se déclencherait dans la région devient une réalité. L’Iran deviendrait ainsi la victime du pouvoir égalisateur de l’atome et la Région échapperait stratégiquement à son contrôle. L’Arabie Saoudite, l’Egypte et la Turquie bloqueraient son chemin vers l’hégémonie tandis que les autres petits pays de la région s’allieraient avec leur partenaire nucléaire préféré.
Pour que ce scénario ait lieu, il est nécessaire que deux conditions principales soient réunies. D’une part, l’Iran doit avoir décidé d’accéder à l’arme nucléaire, d’autre part les Etats-Unis et Israël doivent renoncer à des frappes préventives.
III. Troisième scénario possible : la confrontation
Selon l’auteur, une opération américaine aurait des conséquences graves, politiques et humaines.
À plus long terme l’Iran ferait sans doute l’impossible pour prendre sa revanche nucléaire après des frappes américaines et sur le terrain il n’y aura aucune présence physique qui pourrait empêcher l’Iran de recommencer.
IV. Conclusion
La non-prolifération des armes nucléaires est au cœur de la politique des Etats européens et inspire leurs valeurs de base et leurs intérêts vitaux.
Selon l’auteur, le choix binaire entre recours aux armes ou acceptation de la logique de prolifération au Moyen-Orient et dans le monde est à l’ordre du jour.
Commentaire
L’Iran en se posant en interlocuteur incontournable pour régler les crises régionales (Afghanistan, Irak, Liban) poursuit deux objectifs prioritaires :
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1) S’opposer à toute présence militaire des puissances extérieures à la région ;
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2) se présenter comme une puissance stabilisatrice au niveau régional.
Avec la crise du dossier nucléaire, l’Iran se trouve donc face à un choix stratégique : conforter son ambition d’être un acteur stabilisateur et de paix soit un acteur qui aurait fait le choix de la confrontation.
Ce sont les contours du XXI siècle qui se dessinent en ce moment à travers l’avenir nucléaire de l’Iran. Même si d’autres sujets de préoccupation peuvent motiver une appréciation similaire, le réchauffement climatique figurant par exemple au premier rang à cet égard. La spécificité de l’affaire iranienne, c’est la rencontre, comme souligne l’auteur, entre « des décisions à très court terme et des effets à très long terme ».