Larbi Bouguerra, La Corniche, Bizerte, novembre 2007
Troisème Dialogue de l’eau à Séville (novembre 2007)
Ce dialogue, patronné par Green Cross Espagne s’est penché sur les conflits autour de la ressource. La question de l’eau de l’Euphrate et du Tigre a été discutée.
Réf. : « Troisième Dialogue de l’eau » organisé par Green Cross Espagne à Séville les 15 et 16 novembre 2007.
Langues : français
Le vendredi 16 novembre 2007, les participants au Troisième Dialogue de l’eau initié par Green Cross Espagne, se sont attachés à exposer quelques cas emblématiques pour lesquelles la ressource est disputée. On a successivement passé en revue le cas du Nil, celui concernant l’eau au Moyen–Orient (Jordanie, Palestine et Israël) celui du partage de l’eau des fleuves qui arrosent le Népal, l’Inde et le Bangladesh et enfin celui de l’Euphrate et du Tigre.
Nous nous limiterons à ce dernier cas.
Exposés et débats ont mis en exergue l’importance et le gigantisme des travaux entrepris par la Turquie et dans quelles mesures ceux-ci affectent les pays d’aval : Syrie et Irak. Les barrages turcs sont destinés à la production d’électricité nécessaire pour le développement régional et doivent constituer des réserves d’eau pour l’irrigation des cultures (coton, tabac…).
Ils ont affecté des régions riches en vestiges préhistoriques et ottomans. Certains ont été définitivement inondés.
La Syrie a été concerné par ces projets hydrauliques et des négociations bilatérales ont eu lieu avec la Turquie.
Les pressions politiques ne sont pas absentes de l’attitude et des positions respectives de ces deux pays. La question kurde est en arrière-plan de la démarche d’Ankara.
Il a été rappelé que la Syrie et l’Irak ont été sur le point de se faire la guerre à propos de la construction de barrages sur l’Euphrate.
L’Irak et la Turquie ont eu, de leur côté, des discussions bilatérales et, pour exprimer sa maîtrise de la situation, Ankara n’a pas hésité, lors de la mise en eau du barrage Ataturk, de couper l’eau du Tigre - qui traverse la capitale Bagdad - pendant plusieurs semaines d’affilée.
Il n’en demeure pas moins que la Syrie est celle qui dépend le plus des eaux turques.
L’eau en fait sert la Turquie dans son dessein de jouer un rôle politique plus important dans la région, réminiscence de l’empire ottoman qui allait de l’Europe Centrale et des Balkans jusqu’aux confins algériens et sahariens.
Commentaire
Le débat a mis en lumière le rôle géostratégique que joue actuellement l’eau dans cette région du monde, au carrefour et plaque tournante entre l’Europe, l’Afrique et l’Asie. Le pétrole lui a apporté un certain nombre de difficultés voire de guerres.
L’eau devient maintenant un outil de géostratégie, de politique et de diplomatie. Ne parle-t-on pas « d’hydrodiplomatie » et « d’hydroconflits » ?
La Turquie trouve dans l’eau du Tigre et de l’Euphrate un moyen de se positionner comme un acteur politique majeur vis-à-vis des pays du Golfe- situés tous en zone désertique- et n’hésite pas à faire des affaires avec Israël avec lequel elle aurait une coopération. Des projets de « commercialisation » de l’eau seraient en tractation entre les deux pays.
On rappellera que la Turquie a été pendant longtemps le seul Etat de la région à reconnaître Israël avant d’être rejoint par la Jordanie et l’Egypte. Face aux bouleversements et aux troubles que connaissent le Proche et le Moyen –Orient, la Turquie voudrait peut être signifier aux Etats arabes producteurs d’hydrocarbures voire à l’Iran (qui tente de se placer comme un acteur important sur la scène internationale) qu’elle possède, elle, une ressource bien plus précieuse et bien plus « durable » que le pétrole et le gaz et qu’elle entend s’en servir et poser ses conditions.