Larbi Bouguerra, La Corniche Bizerte, août 2007
Et Lula apporta l’eau et la lumière aux favelas
Pour améliorer les conditions de vie et couper l’herbe sous les pieds du crime organisé et sa violence, le Président brésilien Lula donne un sérieux coup de fouet à l’alimentation en eau potable et à l’assainissement des favelas.
Réf. : Chantal Rayes « Et Lula apporta l’eau et la lumière aux favelas », Libération, 11-12 août 2007, p. 11.
Langues : français
Type de document :
Le 11 août 2007, le Président Lula a lancé un ambitieux chantier qui vise l’urbanisation et l’assainissement des eaux des favelas, des bidonvilles de la capitale Brasilia et de douze autres régions. En effet, 12,4 millions de Brésiliens vivent dans les favelas, en périphérie des grandes villes. Rio compte à lui seul 752 favelas où vivent 1,5 million d’habitants soit 20 % de la population de la ville. L’assainissement des eaux y est une priorité en raison de son impact sur l’environnement et la santé, en particulier sur la mortalité infantile. D’après le ministre de la Ville, Márcio Fortes « …Seuls 53 % des domiciles brésiliens sont raccordés au réseau de collecte d’égout. Ce taux tombe à 35 % si on compte les foyers qui bénéficient également du réseau de traitement des eaux usées. Nous allons étendre ces services à toute la population, en donnant la priorité aux favelas. Nous allons également dépolluer les bassins hydrographiques dans lesquels les égouts sont déversés et généralement l’accès à l’eau courante et potable, qui parvient aujourd’hui à plus de 83% des foyers. »
Le ministre se fixe aussi comme priorité de reloger les populations pauvres qui occupent « les zones à risques », sujettes aux inondations et aux glissements de terrain. Le Président Lula assure : « Avec l’urbanisation des favelas et l’assainissement, viendront les écoles et les aires de loisirs, et la sécurité publique s’en trouvera améliorée. Si l’Etat ne remplit pas son rôle, le crime organisé le fera. »
Jusqu’à la fin de son mandat en 2010, Lula a prévu d’injecter plus de 15 milliards d’euros pour l’assainissement des eaux et l’urbanisation des favelas. Ces chiffres sont nettement supérieurs à ceux alloués à ces secteurs lors de sa première présidence.
Ces investissements font partie du Programme d’accélération de la croissance (PAC), un ensemble de grands travaux lancés en janvier 2007, financés par l’Etat et les emprunts auprès des banques. Comme le ministre Fortes est de droite, certains craignent « un virage conservateur dans la politique urbaine ».
Les critiques admettent cependant que « Le PAC est une avancée pour les favelas. Mais la société civile n’a pas de contrôle sur l’allocation de l’argent, qui risque d’être soumise au clientélisme des élites politiques traditionnelles… » Ils demandent qu’il soit mis fin à la « ségrégation spatiale des pauvres » afin « qu’ils ne soient pas confinés dans les favelas, même améliorées ».
Commentaire
Cet article souligne, de façon on ne peut plus claire, que l’eau potable et l’assainissement sont la colonne vertébrale de la vie en société et les premiers garants de la paix à l’intérieur d’une société donnée. La violence ne peut fleurir que sur le terreau de l’absence de l’autorité ou quand l’Etat ne remplit pas ses obligations vis-à-vis de ses citoyens notamment les plus vulnérables : les pauvres que la pénurie d’eau crucifie mais que les eaux menacent quand ils logent dans « les zones à risques » (glissement de terrain, inondations).
Cela est valable au Brésil comme en Haïti (à titre d’exemple parmi mille car on peut citer aussi ce qui se passe actuellement en Somalie autour de l’eau) où l’on voit que l’absence d’eau et d’assainissement permet aux gangs de sévir et de mettre à rude épreuve la population.
Il est heureux de constater que le gouvernement du Président Lula a saisi la gravité de la situation – en augmentant les crédits d’une présidence à l’autre - et qu’il a décidé de s’attaquer aux racines de la violence qui fauche tant de vies au Brésil.
Mais, comme partout,- le Brésil ne faisant pas exception - l’eau et l’assainissement sont soumis au jeu politique.