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Sorties de crise : du militaire vers le civil - Le cas des Balkans : colloque du Crespi.

L’implication des acteurs civils et politiques dans la reconstruction de la paix dans les Balkans.

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Réf. : Sorties de crise: du militaire vers le civil - Le cas des Balkans$$Crespi$France$janvier 2001$25 p.

Langues : français

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A la lumière de l’expérience qu’ils ont connu en ex-Yougoslavie, les acteurs de la reconstruction – organisations non-gouvernementales, militaires et responsables politiques – sont tous d’accord pour souligner la nécessaire coopération sur le terrain entre les civils et les militaires. Celle-ci vise une meilleure efficacité du processus de sortie de crise. Malgré les difficultés et les insuffisances toujours existantes, le bilan de l’action dans les Balkans, et plus particulièrement au Kosovo, traduit des avancées en ce qui concerne la mise en œuvre au niveau local de solutions visant un retour progressif à la normale. La réflexion et les efforts doivent cependant être poursuivis notamment, pour ce qui est de la transition du militaire vers le civil. La résolution des conflits passe ainsi par l’implication coordonnée des acteurs de tous niveaux : représentants de la société civile et du monde économique, militaires, responsables politiques nationaux et internationaux.

 

Le bilan du conflit qu’a connu le Kosovo en 1998-99 a été lourd, tant du point de vue humain que matériel. Le processus de reconstruction a donc mobilisé les efforts de nombreux acteurs, issus de différents milieux . Le 19 janvier 2001, ceux-ci se sont retrouvés lors d’un colloque organisé au sénat sur le thème : Sorties de crise : du militaire vers le civil – Le cas des Balkans. L’objectif de la rencontre était de tirer les premiers enseignements de leur présence sur le terrain, d’en souligner les points positifs sans oublier d’en rappeler les insuffisances.

L’Organisation des Nations Unies, tout d’abord, s’est vue confier une double mission, politique et sécuritaire. La résolution 1244 du conseil de sécurité, le 10 juin 1999, prévoyait ainsi la présence sur le terrain de deux entités complémentaires : la KFOR pour ce qui relevait du domaine militaire ; la MINUK en ce qui concerne la gestion civile de la reconstruction.

En effet, la gestion des crises, et par là même le retour progressif à la normale, supposent à la fois d’organiser la paix et de maintenir l’ordre. Il s’est donc agi au Kosovo de combler le vide sécuritaire : il n’y existait pas de forces de police locales. Aussi a-t-il fallu pallier ce manque par le déploiement de forces de police internationales dans le but de créer les conditions d’existence d’un triptyque : forces de police – appareil judiciaire – système pénal.

L’action sur le terrain s’est cependant heurtée à des problèmes de clarté de la mission et à des carences en matière de coordination entre les différentes composantes de ces forces. Si les résultats ont alors pu paraître insatisfaisants, Alain Le Roy, coordinateur du pacte de stabilité pour l’Europe du sud-est, rappelle néanmoins que les exigences en matière de respect et de protection des droits de l’homme, la lutte contre l’illégalité, l’établissement d’un appareil juridique et d’un système judiciaire impartiaux constituent des éléments fondamentaux pour la sécurité et la démocratie. A ce titre, le rôle de la MINUK a été primordial, ainsi que l’explique Eric Chevallier, conseiller spécial de Bernard Kouchner, qui retient quatre points fondamentaux :

  • la démilitarisation de l’armée de libération du Kosovo, l’UCK, première étape du processus de paix ;

  • la création d’une administration conjointe et représentative des différentes communautés ;

  • la contribution au retour des populations serbes ayant fui la province par peur des représailles ;

  • la transition démocratique, avec un changement de pouvoir à Belgrade et l’organisation d’élections locales.

Dans le même sens d’un retour progressif à la paix, l’action humanitaire et l’aide d’urgence ont, malgré les difficultés, fonctionné selon le principe de la coopération transversale entre les civils et les militaires. Si l’expertise des ONG dans le domaine de l’humanitaire n’est pas à démontrer, le concours de l’armée se révèle d’un précieux secours, entre autres …

… pour la protection des populations et des membres de ces organisations ;

… pour l’assistance et le soutien logistiques .

Au-delà de l’action d’urgence, cette coopération, où apparaissent des réservistes de haut niveau, des représentants des organisations internationales ainsi que des ONG et des services ministériels, rend possible la réalisation d’œuvres concrètes contribuant au retour à la normale : reconstruction d’écoles, de structures sanitaires, aide à la remise en route du système économique…

Pour terminer, les intervenants du colloque ont tenu à souligner que l’engagement sur le terrain de la reconstruction devait pouvoir engendrer de significatives retombées économiques (acquisition de marchés pour les entreprises publiques et privées) et culturelles (rayonnement national). C’est ainsi par exemple qu’Alcatel, entreprise de communication française a répondu à un appel d’offres et remporté un contrat consistant en la remise en état et l’installation du réseau de lignes téléphoniques du Kosovo. Ceci a pu se concrétiser grâce à une coordination entre différents acteurs :

  • le MEDEF international qui a déterminé les principales lignes d’action ;

  • les forces des Nations Unies, qui ont permis de mesurer l’ampleur des dommages, d’évaluer les besoins et donc d’orienter l’action.

Les participants au colloque ont ainsi pu tirer plusieurs enseignements précieux pour l’avenir :

  • si le principe de la participation des militaires à l’action humanitaire est acquis, il n’en demeure pas moins nécessaire que le basculement vers la gestion civile de le reconstruction se fasse le plus rapidement possible ;

  • la coopération militaire suppose une définition claire des objectifs, de leur planification et des besoins nécessaires ;

  • leurs logiques foncières n’étant pas les mêmes, civils et militaires doivent apprendre à travailler ensemble sur le terrain et à valoriser leur action commune ;

  • au niveau politique, un pilotage stratégique interministériel est nécessaire, chargé d’élaborer la stratégie globale et de préparer des scénarios d’action ;

  • une structure exécutive, dotée de moyens financiers et opérationnels importants doit voir le jour.

L’action sur le terrain et la transition du militaire vers le civil ne doivent en conclusion pas se faire dans l’urgence, de manière désordonnée ou sans cohérence. Il s’agit au contraire de faire fructifier une dynamique de coopération entre des acteurs portés vers une même aspiration : la paix.

Commentaire

La question de la sortie de crise et de la reconstruction d’un pays sortant d’une période de guerre se pose aujourd’hui avec d’autant plus d’acuité qu’elle met la communauté internationale face à ses responsabilités. Les Balkans, aussi violent qu’aient été les conflits qui s’y sont succédé, ont eu la chance qu’elle se saisisse du problème. C’est grâce à l’implication d’une multitude d’acteurs, dans les domaines politique, économique, humanitaire, que la région a pu retrouver un semblant de calme. Le colloque organisé au sénat a tenté de tirer les premières leçons, et de cerner quelques problématiques liées à l’action post-conflictuelle sur théâtre d’opérations extérieur : l’action humanitaire, la coopération des civils et des militaires, les enjeux de la reconstruction, la restauration d’un cadre politique et sécuritaire…

On ne peut que se féliciter de l’implication de la communauté internationale, lorsqu’elle permet la résolution d’un conflit. L’on regrettera néanmoins le caractère sélectif de ce type d’interventions – pourquoi le Kosovo et pas la Tchétchénie par exemple – qui en marque les limites lorsque des intérêts stratégiques et géopolitique sont en jeu.