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Alternatives non-violentes, Rouen, March 2006

Le Collectif des déboulonneurs s’engage en non-violence

Le combat antipublicitaire est de plus en plus marqué par les actions non-violentes de désobéissance civile menées par le Collectif des déboulonneurs. Celui-ci intervient dans un nombre croissant de villes françaises.

Keywords: | | | Principle of active subsidiarity

Paris, Boulevard Montmartre, vendredi 25 novembre 2005, il est 17h30. Une centaine de personnes se rassemblent, peu se connaissent encore.

Chacun sait qu’une action antipublicitaire, non-violente, de désobéissance civile, est imminente. Des journalistes sont là, certains avec des caméras de télévision. Soudain, six personnes s’élancent d’un pas décidé et emmènent le groupe à une centaine de mètres. Ils barbouillent trois grands panneaux publicitaires de l’afficheur JCDecaux, avec ces mots inscrits à l’aide de bombes de peinture : « Publicité = violence », « Pub = pollution visuelle », « Halte au matraquage ». La foule manifeste sa joie et applaudit. Une animation s’ensuit. Des orateurs montent à tour de rôle sur un tabouret pour de courtes prises de parole, expliquant aux passants ce qui est en train de se dérouler. Les journalistes s’en donnent à cœur joie, cette histoire leur plaît visiblement. Soudain, à 17h50, des voitures de police arrivent. Une quinzaine de policiers en sortent, dont deux armés d’un pistolet-mitrailleur. Ils se mettent en ligne sur la chaussée. Un commissaire s’énerve tout seul. Il téléphone à sa hiérarchie. Un observateur discret des antipublicitaires écoute la conversation. L’émotion de peur rode un peu partout, que va-t-il se passer maintenant ?

Il est 18h. Les barbouilleurs abandonnent les entretiens qu’ils donnent à la presse pour se concerter à la vitesse du son, puis un autre activiste prend la parole sur le tabouret. La nuit est là, le célèbre boulevard est merveilleusement éclairé, les trois panneaux sont barbouillés. Et l’orateur d’expliquer d’une voix forte : « La non-violence est notre force ! » Applaudissements de la foule. « Comme vous le savez, poursuit-il, les six barbouilleurs ont dégradé des affiches publicitaires, mais ils se déclarent responsables de leurs actes devant la police et les tribunaux. Ils vont donc s’avancer jusque devant les policiers. La non-violence est notre force. » Chacun retient son souffle. Les caméras tournent, les journalistes sont aux aguets. La foule s’ouvre, comme la mer rouge dans une autre histoire, et laisse passer les six « désobéissants » qui s’avancent lentement, tête haute, carte d’identité brandie au-dessus de leur tête, jusque devant les policiers disposés en ligne.

L’inimaginable se produit alors, les policiers reçoivent la consigne de reculer et de s’écarter. Il n’y aura donc pas d’arrestation ce jour-là. On croit savoir que la police est gênée par la présence des journalistes et des caméras. Les barbouilleurs se mettent alors à chanter en chœur Le Barbouilleur (une adaptation du Déserteur de Boris Vian). Il est juste de dire que ce jour-là, encore une fois, la non-violence a fait reculer la police. Une autre action du Collectif des déboulonneurs a lieu également à Rouen, dans la foulée de l’action à Paris, mais là le barbouilleur est conduit à l’Hôtel de police où il restera deux heures.

La couverture de presse est impressionnante pour la première sortie du Collectif des déboulonneurs, fin novembre 2005. Les titres des articles parlent d’eux-mêmes : « Action antipub à Paris » Libération (1) ; « Les anti-pub refont surface » 20 minutes (2) ; « Haro sur l’affichage publicitaire » La Vie (3) ; « Les déboulonneurs attaquent » Politis (4) qui commente à merveille cette action en parlant de « non-violence » et de « désobéissance civile » ; « Les anti-pub font leur pub » Paris-Normandie (5) ; des reportages de la presse audiovisuelle sont de la même veine et, grâce à l’A.F.P., des quotidiens de province relatent l’action, souvent photo à l’appui. (Notons au passage que le mot « antipub », commode pour des titres d’article dans les journaux, n’est pas une fabrication des antipublicitaires ! Ce vocable, créé probablement dans la dernière partie du XXe siècle, a été répandu par les journalistes à partir de 2001, époque des premiers barbouillages collectifs menés au grand jour dans les rues de Paris. Il a été repris lors des actions massives dans le métro parisien, à l’automne 2003.)

C’est ainsi que le 4e vendredi, samedi et dimanche de chaque mois, dans maintenant de plus en plus de villes, le Collectif des déboulonneurs intervient, et interviendra jusqu’à la promulgation d’une nouvelle loi sur l’affichage, décret d’application à l’appui. Le but est de « déboulonner la publicité, de la faire tomber de son piédestal, non pas la supprimer, mais la mettre à sa place, pour qu’elle soit un outil d’information… (6) »

 

François VAILLANT (*)

Commentary

Le combat antipublicitaire des déboulonneurs se déroule dans un conteste de désobéissance civile et de non-violence. Les manifestations, visant à rendre public le problème de l’ubiquité de la publicité, sont bien accueillies par le public.

Notes

  • (*) : Philosophe. Auteur notamment de La non-violence. Essai de morale fondamentale, Paris, Le Cerf, 1990.

  • (1) : 26.11.05

  • (2) : 28.11.05

  • (3) : 01.12.05

  • (4) : 01.11.05

  • (5) : 28.11.05

  • (6) : Lire l’argumentaire « Invasion publicitaire, désobéissons ! » , dont de larges extraits ont été publiée dans ANV n° 137. Cet argumentaire peut être imprimé gratuitement en allant le chercher sur le site www.deboulonneurs.org . Des fiches pratiques, liées à cet argumentaire, sont également disponibles. Elles sont au nombre de quatre : « Comment créer un collectif local », « Presse », « Justice », « Bibliographie ». L’argumentaire et les quatre fiches sont essentielles pour approfondir l’objectif des déboulonneurs, leur logique de l’action non-violente, pour bénéficier de conseils quand on se retrouve au poste de police ou devant un juge. Les quatre fiches peuvent s’obtenir, contre 3 euros ( timbres acceptés), en écrivant à Coordination nationale du Collectif des déboulonneurs, 24 rue Louis Blanc, 75010 Paris.