Fiche d’expérience Dossier : Les Organisations Non-Violentes en France

Guillaume Gamblin, Paris, janvier 2007

MIR : coopérer pour la paix

Le MIR - Mouvement International de la Réconciliation - est engagé en France depuis les années 20 contre les guerres et pour la promotion d’une non-violence active inspirée de l’Evangile. Le mouvement, membre d’un mouvement international interreligieux, intervient sur les thèmes de l’éducation à la non-violence, du rapport entre les religions et la paix, ou encore de la lutte contre les injustices, dans une réflexion de fond et en réaction à l’actualité internationale.

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I. Le MIR : un pilier la Coordination française pour la Décennie

L’IFOR, on l’a vu, est l’un des initiateurs de la Décennie de promotion d’une culture de non-violence et de paix au profit des enfants du monde, promulguée par l’Assemblée Générale de l’ONU en 1998 pour les années 2001-2010. Sa branche française, à son tour, se trouve être à l’origine de la création de la Coordination française pour la Décennie, qui regroupe des mouvements et des organisations d’horizons multiples dans le but de promouvoir, par des actions communes, cette culture de non-violence et de paix. Christian Renoux, co-président du MIR, en assure la présidence depuis sa création en 2000.

En trois ans, la Coordination a pris une grande ampleur en regroupant en son sein une cinquantaine de mouvements et associations, avec un comité de parrainage de plus de 120 personnalités dont les scientifiques Hubert Reeves, Albert Jacquard, Boris Cyrulnik, des artistes tels que Jean Ferrat, Thierry Lhermitte, Jean-Michel Jarre, des intellectuels tels que Philippe Meirieu, Ignacio Ramonet, Jean Delumeau, ou encore des religieux tels que Dalil Boubakeur, René-Samuel Sirat ou Mgr Stenger, etc…

La Coordination est de plus en plus active en France, elle s’est dotée d’un secrétariat pour assurer la coordination des initiatives prises dans ce cadre, et met en lien de nombreux mouvements qui habituellement ne sont pas tous mobilisés sur le thème de la paix. Des initiatives locales sont prises dans son cadre, telles que :

  • La création de coordinations locales pour la Décennie, associant les membres d’associations diverses.

  • La réalisation d’ateliers ou d’animations de quartier sur le thème de la paix.

  • L’organisation d’un Forum national sur La non-violence à l’école, de la maternelle à l’université en octobre 2003.

Ces actions s’inscrivent pour la plupart dans le cadre de la grande campagne portée par la coordination : la « Campagne pour l’éducation à la non-violence et à la paix à l’école », qui demande l’introduction d’un enseignement à la non-violence et à la paix dans le cycle scolaire, ainsi que l’introduction de cette matière dans la formation des maîtres et enseignants et l’accès de ces derniers à des stages sur la résolution non-violente des conflits. Cette campagne comporte une lettre-pétition, une réflexion sur des propositions de programmes scolaires, la création de mallettes pédagogiques pour chaque âge, des rencontres avec le ministère de l’éducation nationale,…Elle vise l’introduction effective de la non-violence et de la résolution des conflits dans le cadre du système éducatif.

En outre, l’autre grand projet de la Coordination française, est l’organisation du premier Salon international des Initiatives de Paix, qui se tiendra à Paris en Juin 2004.

Un certain nombre de commissions ont été mises en place dans le cadre de la Décennie :

  • La commission éducation, particulièrement chargée de soutenir la campagne pour l’éducation à la non-violence et à la paix à l’école.

  • La commission Salon des Initiatives de Paix, chargée de l’organisation de ce dernier.

  • La commission religions, qui étudie le rapport des religions à la non-violence et a pour projet de publier un ouvrage exposant le fruit de ces recherches.

  • La commission recherche, qui envisage la création d’un centre d’enseignement de la culture de paix en France, sur le modèle des peace studies anglo-saxonnes.

  • La commission animation, chargée de mettre à la disposition des coordinations locales les différents outils et fiches réalisés dans le cadre de cette Décennie.

Le MIR a joué et joue un rôle essentiel d’initiateur, de moteur et d’animateur de cette Coordination française.

Au niveau international, la Coordination internationale pour la Décennie vient d’être créée : c’est la Coordination française pour la Décennie qui se trouve être à l’origine du lancement de celle-ci en juin 2003, et qui en assure la présidence. C’est donc Christian Renoux, co-président de la branche française du MIR, qui se trouve être également le président de cette Coordination internationale. Cette dernière regroupe plusieurs Coordinations nationales (Autriche, France…) ainsi que des organisations internationales (Caritas, IFOR, Pax Christi International…) présentes dans de nombreux pays : aux Philippines, aux Pays-Bas, aux Etats-Unis, etc… Elle est parrainée par deux Prix Nobel de la Paix et membres du MIR : l’Irlandaise Mairead Cunnigan et l’Argentin Adolfo Perez Esquivel.

II. Les mouvements non-violents et les autres partenaires privilégiés

Le MIR a vu naître l’ensemble des autres organisations non-violentes françaises, qui lui sont toutes postérieures, et a parfois participé à la formation de leurs fondateurs ou de leurs membres. Il a joué et joue un rôle important dans la dynamique générale de ces mouvements, ayant toujours été un lieu de croisement, de formation, de passage ou d’enracinement de nombreux militants.

Des liens réguliers ont toujours été entretenus avec les autres grands mouvements tels que l’Arche et le MAN, avec lesquels de nombreuses actions communes ont été menées contre le nucléaire ou encore pour l’objection de conscience. Des relations sont actuellement entretenues avec le Cun et l’Arche en particulier. Le MIR fait partie des membres fondateurs de Non-Violence XXI, et est l’un des principaux animateurs de la Coordination française pour la Décennie. C’est surtout à travers ces regroupements que le mouvement est en relation avec les autres organisations non-violentes.

Le mouvement garde la volonté de maintenir son identité de chrétien non-violent au sein des autres organisations non-violentes (Arche, MAN…).

Le MIR entretient des relations privilégiées et très étroites avec le mouvement Génération Médiateurs, qui est issu du groupe « Médiation » du MIR et intervient actuellement en milieu scolaire en particulier, pour la formation de jeunes médiateurs. Génération Médiateurs est l’un des principaux organismes de promotion de la médiation scolaire en France.

Au niveau international, on a vu que le MIR fait partie de l’IFOR, qui regroupe des membres, branches ou groupe affiliés dans plus de quarante pays dans le monde. De ce fait, le MIR jouit d’un réseau international de première importance et entretient des relations uniques et privilégiées avec de nombreux acteurs de paix dans le monde. C’est là incontestablement une immense richesse pour la réflexion et l’action du mouvement et un atout considérable pour une construction de la paix au niveau mondial qui passe par le dialogue et l’enrichissement mutuel des pratiques.

Des contacts étroits et privilégiés avec nombre d’institutions religieuses, ont été mentionnés plus haut. Mais au-delà, le MIR se trouve être à l’origine de la création de nombreux réseaux et mouvements ; il figure parmi les fondateurs de :

  • l’organisation Eirene ;

  • du Service Civil Internaional ;

  • du Comité de Coordination pour le Service Civil (CCSC) ;

  • de Stop-Essais ;

  • de la Maison de Vigilance de Taverny ;

  • de Church and Peace ;

  • du Collège Cévenol, organisations dont il est membre ;

  • ou de l’ACAT, dont l’une des fondatrices était membre du MIR.

Henri Roser, ancien président du MIR, fut également le premier président de Partage. Jean Goss figure parmi les initiateurs du SERPAJ (Servicio Justiz y Paz) en Amérique latine. Jean-Louis Valatx, membre du groupe lyonnais du MIR, est fondateur de l’Association des Vétérans des Essais Nucléaires.

III. Une présence active dans l’Afrique des Grands Lacs

Le MIR est également actif à l’étranger, par l’intermédiaire de ses membres qui vivent sur d’autres continents. La branche française soutient en particulier le travail impressionnant entrepris par Alfred Bour au Rwanda et dans les pays avoisinants pour la formation à la non-violence. Ancien président du MIR, prêtre, Alfred Bour est depuis 1995 envoyé par ses supérieurs et mandaté par le MIR pour effectuer un travail de formation et d’enracinement de la non-violence active dans un pays profondément meurtri par les violences. Il travaille dans la cadre du Bureau pour le Service de la Non-violence du diocèse de Butaré au Rwanda, mais intervient également au Burundi et en République Démocratique du Congo.

Son action comporte deux axes essentiels :

  • La formation à la non-violence active dans l’esprit du MIR.

Cette activité consiste essentiellement dans la formation de personnes-ressources capables de transmettre cette culture de non-violence active. Cette dernière ne se réduit pas à des techniques d’action militante, mais intègre aussi et surtout les aspects quotidiens, relationnels, éducatifs, philosophiques de la non-violence, et ses racines religieuses et spirituelles. Alfred Bour a délivré jusqu’à aujourd’hui plus de deux cent certificats habilitant des jeunes de niveau universitaire à être formateurs et formatrices à la non-violence active : pour cela deux années de vie de groupe, d’étude de la non-violence et de formation sont exigés. Les jeunes peuvent s’engager dans ce cycle de formation lors d’une « eucharistie d’engagement ». Plusieurs groupes, comptant entre trente et cinquante personnes, sont nés de ce travail. Certains de membres de ces groupes fondent ensuite des « Maisons de paix », dans l’esprit d’une diffusion de la paix partant de l’intérieur (« un cœur en paix ») pour s’élargir progressivement (« famille de paix », « maison de paix »).

Des diacres du « groupe Jean Goss » (futurs prêtres) sont également formés à la non-violence et reçoivent des livres sur ce thème pour les encourager à devenir promoteurs actifs de la non-violence dans la société. Des formations et animations plus ponctuelles sont organisées également auprès de religieux et de laïcs de toutes confessions, dans un esprit d’ouverture œcuménique.

  • La diffusion de la non-violence évangélique active à travers des documents de promotion, de formation ou d’information.

Alfred Bour est l’auteur du manuel Oser la non-violence, qui en est à sa deuxième édition et a été publié à 5000 exemplaires, ainsi que d’autres ouvrages et opuscules sur la spiritualité de la non-violence, et sur l’avenir du Rwanda. Ces documents sont publiés en français ainsi que dans la langue locale. Un effort important a été fait pour la traduction du best-seller de Martin Luther King La force d’aimer en kinyarwanda, la langue du Rwanda. Le manuel Oser la non-violence sert en particulier de base à la formation des jeunes ; il est également diffusé bien au-delà de cette région.

La revue bilingue Le prix de la paix / Ikigazy Lyamahoro paraît depuis 5 ans et est publiée à 2000 exemplaires. Elle est un instrument essentiel de réflexion et de promotion de la culture de non-violence au Rwanda. Cet effort de diffusion ainsi que d’inculturation de la non-violence est relayé à son tour par les jeunes formés : ainsi le groupe Jean Goss a rédigé un lexique non-violent en kinyarwanda.

Le MIR apporte un soutien essentiel à cette action de longue haleine entreprise au Rwanda et dans sa région ; au niveau moral et spirituel d’une part, et au niveau financier d’autre part. Il ne s’agit pas là exactement d’un « partenariat » à proprement parler, mais plus d’une extension de l’activité du MIR à l’étranger. Activité qui constitue un pôle essentiel de celle du mouvement.

Coordonnées :

  • Adresse : MIR / Cahiers de la Réconciliation, 68 rue de Babylone, 75007 PARIS

  • Tel : 01 47 53 84 05

  • E-mail : mirfr@club-internet.fr

  • Site web : www.mirfrance.org

Commentaire

Le MIR dispose d’un certain nombre de ressources et d’atouts importants, de par son implication dans le réseau international IFOR, qui lui procure des liens de confiance et de coopération de premier ordre avec de nombreux groupes, branches et organisations affiliées à l’IFOR, dans le monde entier. De même, des relations soutenues et privilégiées sont entretenues avec les milieux chrétiens et les institutions religieuses, au travers de rencontres, d’interventions et de formations.

C’est pour une grande part dans ces partenariats et ce réseau en France et à travers le monde, que réside la principale richesse du MIR. Mais également dans une compétence acquise en formation et réflexion sur la non-violence et ses racines évangéliques. Cependant le mouvement connaît quelques difficultés de financement, ainsi que de renouvellement des adhérents, qui empêchent ses potentialités d’action et ses compétences d’être valorisées à plein. C’est donc en particulier à travers les initiatives entreprises en Afrique des Grands Lacs, ou l’implication dans la Coordination française pour la Décennie, qu’apparaissent pleinement les ressources et la fécondité du MIR aujourd’hui.

Notes

Sources :

  • Entretiens avec Christian Renoux, du 22 Mai et du 6 Novembre 2003.

  • Numéros des Cahiers de la Réconciliation.

  • Numéros du Bulletin d’information du MIR.

  • Brochures de présentation du MIR.

  • Texte " La non-violence et ses racines évangéliques. Orientations de la branche française du MIR », 1988.

  • « Lettre des Milles Collines » n°8.