Fiche de document Dossier : Réflexions et interrogations autour du terrorisme et de la religion : dérives sécuritaires et dilemmes démocratiques.

Bianca Zanardi, Paris, 2008

La Poudrière du Moyen Orient

Noam Chomsky et Gilbert Achcar s’attaquent dans ce livre à des sujets sensibles : terrorisme, fondamentalisme religieux, démocratie, racisme, guerre en Afghanistan, occupation de l’Irak, conflit israélo-palestinien, conflit au Liban…

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Réf. : Noam CHOMSKY, Gilbert ACHCAR. La poudrière du Moyen Orient, Editions Fayard, 2007.

Langues : français

Type de document : 

Dans ce livre, Noam Chomsky et Gilbert Achcar débattent autour de questions concernant le Moyen-Orient.

Le livre se compose de cinq parties. Les trois premières concernent le terrorisme, la quatrième les guerres dans le grand Moyen-Orient (Irak, Afghanistan, Kurdes in Turquie, menaces iranienne et syrienne), et la dernière le conflit israélo-palestinien.

Chomsky ouvre le débat en affirmant que, si on interprète littéralement la définition du terrorisme qu’on trouve dans le US Code, le code officiel des lois états-uniennes (« le terrorisme est l’usage délibéré de la violence ou de la menace de la violence pour atteindre des objectifs qui sont de nature politique, religieuse ou idéologique par recours à l’intimidation ou à la coercition ou en inspirant la peur »), il s’avère que les Etats-Unis sont au premier rang des Etats terroristes.

En fait, il affirme que, du point de vue des décideurs états-uniens, la bonne définition serait en pratique la suivante: « la terreur est la terreur dans le sens habituel du terme si vous l’exercez contre nous ; mais si nous l’exerçons contre vous, elle est bénigne, c’est une intervention humanitaire ».

Achcar ajoute qu’aujourd’hui le terrorisme non gouvernemental, par exemple l’intégrisme islamique, n’est que la forme la plus visible du terrorisme. Le terrorisme non gouvernemental ne représente en effet qu’une infime fraction du terrorisme à l’échelle mondiale, qui est pour l’essentiel d’origine gouvernementale et qui est surtout pratiquée par les Etats-Unis.

Pour les deux intellectuels, la menace terroriste est bien évidemment très sérieuse. Selon eux on est en train d’aggraver cette menace, et cela consciemment. L’exemple le plus parlant à cet égard est l’invasion de l’Irak : celle-ci a été menée à bien tout en sachant qu’elle aggraverait la menace terroriste.

Ce que l’on peut faire contre le terrorisme est d’en atténuer les causes : Ben Laden et les autres se considèrent comme les défenseurs des terres musulmanes. Donc, si l’on cesse d’attaquer les terres musulmanes on réduira la menace terroriste. L’antidote au terrorisme n’est certainement pas la prétendue guerre de la terreur. C’est plutôt la justice : la justice politique, la primauté de la loi, la justice sociale, la justice économique.

Les auteurs considèrent que la force actuelle de l’intégrisme islamique est une conséquence immédiate des politiques très concrètes des Etats-Unis. Pendant les années 1960, la tendance dominante dans l’ensemble du monde musulman était le nationalisme laïque. Or, les Etats-Unis ont combattu les nationalismes de ce genre, le communisme et tous les autres courants gauchistes ou progressistes laïques en s’appuyant sur le plus réactionnaire des intégrismes islamiques, celui mis en œuvre et propagé par le royaume saoudien.

Pendant la guerre contre les Soviétiques en Afghanistan les Etats-Unis ont soutenu l’intégrisme musulman, ainsi, pendant les années Reagan, ils ont poussé le Pakistan à évoluer vers cette « option politique ».

Israël a agi à peu près de la même manière : en désarmant et en décrédibilisant l’OLP et la gauche libanaise a contribué au développement du Hezbollah et du HAMAS.

L’effet combiné de la répression des idéologies progressistes ou laïques et de l’échec subjectif – la faillite – de ces idéologies, cela aggravé par l’écroulement de l’Union soviétique, a laissé la voie libre au seul canal idéologique de protestation anti-occidentale qui était disponible, a savoir l’intégrisme islamique.

Commentaire

Les sujets abordés dans le livre sont extrêmement actuels et ils sont traités avec clarté linguistique et structurelle. Les deux intellectuels analysent les thématiques traitées en essayant d’identifier les causes qui sont à l’origine et de proposer des solutions concrètes pour lesquelles une application immédiate serait possible.

Il en ressort une invitation de l’Europe, de l’opinion publique et du lecteur à exercer une pression sur les Etats-Unis pour les encourager à modifier leur présence et leur attitude hégémonique au Moyen-Orient.

Washington est identifié comme le seul acteur capable d’agir concrètement pour la paix au Moyen-Orient.

Mais, si, d’une part, la clarté des auteurs nous aide à comprendre la complexité de la problématique et des enjeux, d’autre part on peut leur reprocher une certaine simplification qui aplatit le débat et semble réduire la question à une sorte de lutte entre le bien et le mal (où le mal serait représenté par les Etats-Unis et le bien par tous ceux qui s’y opposent). Cette présentation un peu caricaturale est d’autant plus polémique qu’elle a pour seul objectif de « réinventer » le slogan américain de « lutte contre le mal », lancé par G. Bush.