Fiche d’analyse Dossier :

, Grenoble

La Tunisie, une société fragile face à la persistance de la menace de l’extrémisme violent

Une menace multidimensionnelle à la cohésion sociale dans un contexte de consolidation des acquis démocratiques

Mots clefs : Utilisation de la religion pour la guerre, utilisation de la religion pour la paix | Afrique du Nord | Tunisie

Carte Tunisie 1948, source wikipedia

L’extrémisme violent s’est progressivement imposé comme une menace majeure pour la cohésion sociale en Tunisie dans un contexte de transition démocratique, puis de consolidation des acquis de la Révolution. Bien que l’intensité de cette menace s’avère être relativement basse, la série d’attaques terroristes de 2015 a progressivement fait prendre conscience aux acteurs nationaux et internationaux qu’elle constitue aujourd’hui un des principaux potentiels d’instabilité dans le pays et à l’échelle régionale. Dès lors, cet article étudie les dynamiques situationnelles liées à l’extrémisme violent en Tunisie ainsi que ses manifestations autour de quatre niveaux de menace.

Activisme épisodique de groupes armés salafistes djihadistes sur le territoire national

Des groupes armés clandestins se revendiquant de la mouvance salafiste djihadiste, principale forme idéologique incarnée par l’extrémisme violent dans le pays, sont actifs sur le territoire tunisien et représentent une menace continue pour la sécurité nationale à travers des actions violentes épisodiques. Ces groupes renvoient à deux configurations distinctes, entre organisations paramilitaires et cellules terroristes dormantes.

Les organisations paramilitaires extrémistes violentes sont dispersées sur les massifs montagneux à la frontière tuniso-algérienne, dans le gouvernorat de Kasserine, et plus spécifiquement sur les Monts Chaambi, Salloum, Sammama et Mghilla. Cette zone montagneuse, boisée et constituée de grottes, présente une configuration naturelle qui favorise le refuge de groupes paramilitaires organisés échappant ainsi à la poursuite des unités de la Brigade Anti-Terroriste (BAT), et pouvant également organiser des opérations clandestines. De plus, la proximité avec l’Algérie, dont la frontière en zone montagneuse échappe à un contrôle intégral, facilite le transit de combattants et de biens de contrebande [1]. Ces groupes paramilitaires représentent une mosaïque de groupuscules dont les deux organisations principales sont Okba Ibn Nafa (affilié à Al Qaeda au Maghreb islamique – AQMI) et Jounoud al-Khalifa (affilié à l’Etat Islamique) [2]. Leurs 250 membres estimés présentent des origines variées, que ce soit à travers des combattants algériens liés au réseau d’AQMI, des Tunisiens soit partisans du parti Hizb ut-Tahrir [3], anciens membres du Front islamique du Salut (FIS) ou bien de retour de zones de guerre (Libye, Syrie, Irak et Nord du Mali), des Libyens du Groupe islamique des Combattants libyens (GICL), ou encore des combattants de nationalités égyptienne ou marocaine ayant rejoint une des organisations susmentionnées. Le profil de ces combattants, en grande partie étrangers, atteste d’une faible représentation des tunisiens au sein même des branches armées extrémistes violentes sur le territoire national, témoignant ainsi du faible ancrage social de ces groupes au sein de la société tunisienne. Le profil des combattants confirme également la dimension régionale de ces groupes avec leurs liens avec des organisations similaires en Algérie et en Libye. Par exemple, un des dirigeants d’Okba Ibn Nafaa, Abu Ouf al-Muhajer, est le frère de l’Algérien Lokhmane Abou Sakhr (lui-même ancien leader de ce groupe à partir de 2012 et tué lors de combats avec les forces de sécurité tunisienne en 2015) et est recherché en Algérie pour terrorisme depuis 1992. Aujourd’hui, les lignes d’approvisionnement de ces groupes, qui trouvent leurs sources principalement en Libye à travers les réseaux de l’économie informelle, tendent à se tarir compte tenu, d’une part, des revers militaires majeurs essuyés par l’Etat islamique et AQMI en Libye et, d’autre part, de l’intensification des opérations antiterroristes préventives et de lutte contre la contrebande en Tunisie. Acculés, ces groupes de combattants sont contraints à se retrancher ou à s’adonner, pour se ravitailler, à des attaques épisodiques ciblant les populations locales, notamment les éleveurs de bétail en milieu rural. Par ailleurs, le suivi des trajectoires de ces groupes (évaluation de l’évolution du nombre de leurs membres, de leurs accès à des réseaux de ravitaillement en armes, de leurs liens avec d’autres organisations transnationales, etc. ) est compliqué par des difficultés d’accès à l’information compte tenu du statut de ces zones montagneuses comme zones militarisées interdites d’accès aux civils.

A ce premier type de groupes viennent s’ajouter des cellules dormantes disséminées sur l’ensemble du territoire national et composées majoritairement de deux à quatre individus d’origine tunisienne. Le ministère de l’Intérieur affirme ainsi avoir démantelé 188 cellules terroristes en 2017 contre 245 en 2016, 197 en 2015, 131 en 2014 et 100 en 2013 [4]. Ces cellules dormantes représentent une menace latente avec la récurrence d’attaques épisodiques qui démontrent la difficulté, pour les autorités tunisiennes, de prévenir de tels actes isolés. Ces cellules sont aujourd’hui alimentées par le retour de tunisiens ayant combattu au sein de groupes violents en Syrie, en Irak et en Libye, et ce dans un contexte régional où les défaites militaires essuyées par l’Etat islamique dans ses fiefs lui imposent un retour à la clandestinité pouvant se traduire par un risque accru d’attentats à l’extérieur du théâtre syro-irakien. Dès lors, il convient de distinguer deux catégories de cellules dormantes. La première renvoie à des petits groupes participant aux réseaux d’envoi de jeunes tunisiens dans les zones de combats, à l’étranger, attestant ainsi de leur intégration au sein de mouvements transnationaux du salafisme djihadiste. Le second type de cellules dormantes, qui est particulièrement difficile à identifier, renvoie à des profils d’individus qui, contrairement aux groupes paramilitaires, agissent de façon isolée, par petits groupes ou de manière solitaire. Le passage à la violence chez ces groupes est particulièrement difficile à détecter, mais il convient de souligner que leurs attaques ciblent principalement les forces de sécurité intérieure ou l’armée.

Ces deux types de groupes armés clandestins sont responsables d’attaques terroristes épisodiques et d’affrontements réguliers avec les forces de l’ordre. Le point d’orgue de l’activisme de ces groupes salafistes djihadistes a été au cours de l’année 2015 avec les attentats du Bardo (18 mars), de Sousse (26 juin) et de la Garde présidentielle (24 novembre). La dernière attaque d’ampleur remonte au 7 mars 2016 avec l’assaut d’un commando de 60 combattants salafistes djihadistes tunisiens contre la caserne militaire et le poste de la garde nationale de Ben Guerdane, à 30km des frontières libyennes. Ces attaques terroristes ont justifié le rétablissement de l’état d’urgence et ont causé une rupture dans le secteur économique, sapant ainsi la confiance des investisseurs et réduisant nettement l’activité touristique , dont l’économie tunisienne est fortement dépendante, avec la destruction nette de 21.500 emplois dans le secteur du tourisme en 2015 [5]. Cet impact sur les volets sécuritaire, économique et social reflète un fort potentiel de déstabilisation de l’extrémisme violent en Tunisie et de potentielles futures attaques opérées par ces groupuscules risqueraient de plonger le pays dans une nouvelle crise.

La question épineuse du retour des ressortissants tunisiens partis combattre dans les zones de conflit

Le second risque de déstabilisation lié à l’extrémisme violent en Tunisie réside dans le retour potentiel des citoyens tunisiens partis combattre dans les zones de conflit auprès d’organisations salafistes djihadistes.

L’estimation du nombre de ces ressortissants partis en Syrie, en Irak et en Libye varie considérablement selon les sources entre 559 selon les données produites par l’Etat Islamique en Irak et au Levant et ayant fuitées en 2016 , jusqu’à 6000 selon les chiffres de 2015 du cabinet The Soufan Group repris par le département d’Etat américain [6]. Le ministère de l’Intérieur estime, quant à lui, que 3000 Tunisiens auraient rejoint des groupes salafistes djihadistes en plus de 600 individus qui seraient rentrés au pays et 800 [9] qui auraient été tués au combat [7], tandis que le Groupe de travail des Nations unies sur l’utilisation de mercenaires fait état de 4000 Tunisiens combattant en Syrie, entre 1000 et 1500 en Libye, 200 en Irak, 60 au Mali et 50 au Yémen [8]. Les chiffres les plus récents font par ailleurs état de 800 anciens combattants revenus sur le territoire national. Le débat relatif aux données quantifiées sur le nombre de ressortissants tunisiens partis dans les zones de conflits pour combattre auprès d’organisations salafistes djihadistes témoigne des lacunes en matière de connaissances fiables sur ce phénomène. Toutefois, la menace que représentent de tels individus à leur retour sur le territoire national ne saurait être évaluée uniquement au niveau quantitatif mais également du point de vue, au niveau individuel, de leur degré d’engagement passé au sein des groupes armés en Syrie et en Irak qui permet d’évaluer leurs capacités à recruter et à mobiliser, s’ils démontrent de bonnes capacités de leadership, de nouveaux combattants. La Tunisie se classerait néanmoins en seconde position des pays d’origine des combattants étrangers de l’Etat Islamique en Irak et au Levant derrière l’Arabie Saoudite, témoignant ainsi du caractère de foyer de recrutement du pays pour les groupes salafistes djihadistes.

L’unique étude quantitative disponible permettant une ébauche d’analyse de ces chiffres porte sur les caractéristiques sociodémographiques des Tunisiens jugés pour des activités liées au terrorisme entre 2013 et 2016, et informe ainsi sur les profils de 1000 individus qui composent cet échantillon [10]. Bien que cette étude renseigne sur certaines caractéristiques du profil sociologique de ces individus (qui sont à 97% des hommes, sont à 40% détenteurs d’un diplôme, sont originaires principalement des zones péri-urbaines notamment de Tunis -18,78%- et de Sidi Bouzid -14,32%-), elle ne peut constituer une ressource fiable à partir de laquelle tirer des enseignements déterminants sur le profil de ces personnes, d’une part parce que son échantillon n’est pas représentatif de la population étudiée, d’autre part parce que les enquêteurs n’ont eu qu’un accès limité à ces individus qui sont incarcérés dans le système pénitentiaire national dont l’accès est particulièrement restreint.

Cette question pose ainsi un défi de politiques publiques [11] majeur pour les autorités nationales qui doivent statuer sur l’encadrement du retour de ces anciens combattants, et notamment sur un cadre juridique idoine pour assurer le jugement et la réhabilitation de ces individus. Alors que le retour de tunisiens ayant combattu au sein de groupes extrémistes violents risque de s’accélérer avec les défaites récentes de l’organisation Etat islamique dans ses fiefs de Syrie et d’Irak, la réhabilitation et la réinsertion de ces individus représente un enjeu à trois niveaux. Tout d’abord, les autorités doivent assurer la protection de la société tunisienne face au risque de récidive de ces individus. Bien qu’il n’existe pas en Tunisie d’organisation de masse susceptible de fédérer ces anciens combattants et de leur offrir un relai logistique, ceux-ci risquent de représenter une menace latente en constituant des cellules dormantes. En second lieu, l’absence de législation et de cadre juridique spécifique représente un défi de politiques publiques cristallisé, entre autres, par les tensions politiques entre Nidaâ Tounes et Ennahdha au sein de la commission parlementaire d’enquête sur les filières de recrutement djihadiste. Celle-ci a ainsi été créée à l’Assemblée des Représentant du Peuple en janvier 2017 et son ancienne présidente, Leila Chettaoui (anciennement Nidaâ Tounes), a multiplié les accusations à l’encontre d’Ennahdha qui, au temps de la Troïka (2011-2014) où le parti islamiste était majoritaire, aurait fait preuve de laxisme, voire de connivence vis-à-vis de la persistance des violences au niveau local [12], et ainsi favorisé l’envoi de jeunes tunisiens dans les zones de conflits auprès d’organisations salafistes djihadistes. Limogée de son poste de présidente de la commission suite à un accord bipartite entre Nidaâ Tounes et Ennahdha, Leila Chettaoui continue son activisme au sein de cette commission et dans les médias pour dénoncer la responsabilité politique d’Ennahdha dans la vulnérabilité de la Tunisie face à l’extrémisme violent. Enfin, l’absence de preuves factuelles sur lesquelles une instruction judiciaire pourrait se constituer pose un défi majeur en matière de protection des droits des accusés, d’autant plus que le suivi des trajectoires individuelles de ces anciens combattants pose des difficultés méthodologiques en raison de l’opacité de leurs réseaux d’appartenance et de référence. Le risque que les mesures antiterroristes, dans le cadre de l’état d’urgence, portent atteinte à ces droits a ainsi été soulevé par plusieurs organisations nationales et internationales de défense des droits de l’Homme.

La menace latente d’un effet d’entrainement de l’instabilité régionale

Les frontières que partage le pays avec la Libye, pays qui est devenu un épicentre majeur de croissance de la menace salafiste djihadiste à l’échelle régionale, et l’Algérie, où le risque d’une réplique tardive des Printemps arabes pourrait déstabiliser la région entière, renvoient à une dimension géostratégique de la menace de l’extrémisme violent en Tunisie.

Dans un contexte de frontières naturellement perméables dans une zone désertique, d’instabilité chronique liée aux mouvements sociaux dans le Sud de la Tunisie (gouvernorats de Tataouine et de Médenine) et d’effritement du contrôle policier des réseaux de contrebande , le développement de la menace salafiste djihadiste en Libye qui a fait suite à la fin du régime de Kadhafi pose un défi sécuritaire et économique majeur à la Tunisie. D’une part, la Libye constitue une zone de transit pour les Tunisiens partant rejoindre les organisations salafistes djihadistes, et notamment l’Etat Islamique en Irak et au Levant. Entre 1000 et 1500 ressortissants tunisiens auraient ainsi rejoint des organisations salafistes djihadistes en Libye selon le Groupe de travail des Nations unies sur l’utilisation de mercenaires [13]. Ces combattants intègrent ainsi des camps d’entrainement sur ce territoire où la faillite de l’Etat central a favorisé le contrôle par les organisations salafistes djihadistes de plusieurs portions du territoire. La menace sécuritaire se déclare également de par le risque que des groupes extrémistes violents organisent, depuis la Libye, des attaques contre des localités en Tunisie en vue d’en obtenir le contrôle et de développer de nouveaux foyers de combat dans le Sud du pays en plus de ceux dans le gouvernorat de Kasserine. Par exemple, l’attaque du 7 mars 2016 avec l’assaut d’un commando de 60 combattants salafistes djihadistes tunisiens contre la caserne militaire et le poste de la garde nationale de Ben Guerdane avait pour but tactique d’établir un point de connexion permanent avec les réseaux salafistes djihadistes libyens [14]. D’autre part, les liens existant entre réseaux de contrebande (économie informelle) et réseaux salafistes djihadistes pose un enjeu à la fois sécuritaire et économique. Bien que les contrebandiers soient peu enclins à adhérer à l’idéologie salafiste djihadiste, que seulement une minorité d’entre eux rejoignent un organisation extrémiste violent, et bien que les réseaux de contrebande soient régulés sur le plan tribal et excluent de fait les groupes salafistes djihadistes, des connexions entre ces deux types d’acteurs s’opèrent, notamment dans le trafic d’armes et le marché de change parallèle. Ainsi, les groupes salafistes djihadistes emploient les réseaux de contrebande pour faire circuler leurs armes depuis la Libye jusque dans leurs cellules du gouvernorat de Kasserine. De plus, les réseaux de blanchiment d’argent représentent une opportunité pour le financement des groupes extrémistes violents en Tunisie [15]. En outre, la montée du phénomène d’islamo-banditisme dans les zones péri-urbaines de Tunis et de Soudi Bouzid, par exemple, représente un phénomène nouveau qui, en mêlant le développement d’opportunités économiques à un discours idéologique extrémiste violent, parvient à exalter les attentes de jeunes marginalisés pour leur recrutement.

Les frontières partagées par la Tunisie avec l’Algérie représentent un risque latent concernant la menace régionale de l’extrémisme violent. En effet, l’Algérie, qui n’a pas connu d’épisode majeur de remise en question de son système politique et institutionnel depuis 2011, pourrait connaitre une réplique tardive des Printemps arabes. Dans cette hypothèse, la fragilisation de l’autorité de l’Etat central pourrait, à l’échelle locale, favoriser la propagation de groupes paramilitaires. Historiquement, l’expansion de l’islamisme activiste au sein de la sphère politique algérienne pendant les années 1990 a surpris de nombreux observateurs de par son ampleur sans aucune mesure avec d’autres Etats d’Afrique du Nord [16]. Celle-ci a pu être facilitée par la stratégie du régime de diminuer l’influence de la rébellion du Front islamique du Salut (FIS), d’une part en autorisant la prolifération d’organisations politiques islamistes et, d’autre part, en interdisant le FIS et en arrêtant plusieurs milliers de ses membres. Cette stratégie a cependant eu deux effets déstabilisateurs. Tout d’abord, le morcellement de la rébellion islamiste a permis le développement d’un nombre significatif de groupes paramilitaires que l’Etat algérien n’est pas parvenu à éradiquer. Par ailleurs, l’idéologie portée par ces groupes s’est progressivement propagée et ancrée au sein de certaines franges de la société algérienne, profitant également d’un sentiment généralisé de la jeunesse algérienne exprimant son désaveu vis-à-vis du régime qui n’offrait plus de perspectives socio-économiques satisfaisantes. La conjonction de ces deux facteurs a permis à Al Qaeda de s’implanter durablement sur le territoire algérien où ses groupes affiliés représentent aujourd’hui une menace latente à la sécurité nationale et, indirectement, à la sécurité régionale. Les liens étroits entretenus entre les groupes paramilitaires tunisiens du Nord-Ouest (gouvernorat de Kasserine) et ceux d’Algérie, à travers leurs réseaux de combattants et de contrebande notamment, attestent par ailleurs que cette zone constitue, pour les groupes paramilitaires algériens, un espace de retranchement. Or, en cas de déstabilisation du pouvoir central en Algérie, les groupes paramilitaires salafistes djihadistes pourraient, dans un premier temps, utiliser leurs assises tunisiennes comme bases de ravitaillement à partir desquelles organiser des attaques épisodiques contre l’Algérie. En cas de succès de telles initiatives, ces groupes pourraient, dans un second temps, étendre leurs velléités à l’encontre de la Tunisie en obtenant le contrôle de plusieurs régions transfrontalières.

Permanence des facteurs de radicalisation dans la Tunisie postrévolutionnaire

Alors que l’idéologie salafiste djihadiste est très peu ancrée au niveau social dans le pays, la Tunisie est davantage perçue, par Al Qaeda et l’organisation Etat Islamique, comme un foyer de recrutement. En effet, les facteurs de poussée et d’attraction, qui ont été vecteurs de l’engagement de milliers de jeunes tunisiens partis combattre au sein d’organisations violentes en Syrie, en Irak et en Libye entre 2011 et 2014, continuent à alimenter le risque de radicalisation, notamment chez les jeunes.

Dans un contexte de morosité économique avec la conjonction de plusieurs indicateurs alarmants tels qu’un taux de chômage élevé (15,4% au 4ème trimestre 2017) touchant particulièrement les jeunes diplômés (29,9%), le pays traverse une crise sociale sans précédent. Celle-ci affecte tout particulièrement une jeunesse de plus en plus désœuvrée et marquée par l’absence de perspectives socio-économiques, un sentiment relatif de détérioration de ses conditions de vie et le manque de structures inclusives de participation politique. Ce sentiment de désillusion est d’autant plus fort que, concernant le volet politique, le fossé entre les élites dirigeantes du pays et les citoyens semble aujourd’hui se creuser. Face aux attentes pressantes des populations en matière de développement, d’emploi et de réduction des inégalités, la classe politique est en effet peu en phase avec les priorités populaires alors qu’elle concentre le débat public autour des luttes partisanes, notamment à l’approche des échéances électorales. Les jeux de pouvoir se jouent aujourd’hui dans un cadre opaque à travers un mécanisme de dialogue et de construction du consensus qui réunit les principaux protagonistes partisans et sociaux, à savoir l’Accord de Carthage, mais dont le profil des membres qui le constituent, qui bascule entre d’anciens hommes et femmes d’appareil de l’époque de Ben Ali et une jeune élite technocrate montante, nourrit les perceptions et discours antisystèmes. En outre, le retour vers la religion d’une frange de la population tunisienne, dans un contexte d’assouplissement du contrôle des lieux de culte entre 2011 et 2014, a pu profiter aux prédicateurs extrémistes. En effet, la diffusion d’un discours religieux extrémiste qui légitime la violence sur la base d’une lecture radicale des préceptes religieux s’est trouvée facilitée par la vacuité du débat public sur ces questions alors que l’intervention des différents acteurs politiques, sociaux, culturels ou encore éducatifs pour neutraliser l’attractivité de tels discours à travers des références alternatives est demeurée à la marge. Ces facteurs sont autant de tendances qui confirment le sentiment de désillusion des jeunes tunisiens envers le processus postrévolutionnaire, expliquant qu’une frange croissante de la jeunesse soit tentée par l’émigration non réglementaire ou, dans une moindre mesure, l’extrémisme violent, et ce dans l’espoir d’un changement radical de leur quotidien.

La conjonction de ces facteurs, qui n’ont pas trouvé d’amélioration depuis 2011, rend particulièrement vulnérable la société tunisienne face aux risques situationnels de la menace extrémiste. Ceux-ci se sont pourtant estompés depuis 2015 avec les efforts, en matière sécuritaire, de l’Etat tunisien. En effet, les défaites essuyées par l’organisation Etat Islamique dans ses fiefs de Syrie et d’Irak ont rendu moins attractifs les appels, articulés au sein d’un discours islamiste activiste, à rejoindre une cause transnationale remettant en question l’ordre établi dans un contexte de Printemps arabes. De même, l’idéologie salafiste djihadiste est aujourd’hui étroitement contrainte alors que l’Etat tunisien a réaffirmé son contrôle sur, notamment, les lieux de culte ou bien la société civile. Les discours extrémistes avaient en effet pu trouver des vecteurs favorables au sein de la société tunisienne à travers la prise de contrôle de lieux de culte, la multiplication de tentes de prédication, un fort activisme sur internet ou encore l’animation de groupes de réflexion par d’anciens détenus militants libérés suite à une amnistie générale accordée à 1000 anciens prisonniers du régime de Ben Ali. De même, les réseaux de financement et de recrutement pour les zones de conflit ont pu profiter d’un relatif laxisme de la part des autorités entre 2011 et 2014 qui, depuis, a été corrigé par le déploiement de nouveaux dispositifs préventifs. Cependant, la neutralisation de ces facteurs d’attraction relève davantage d’une logique sécuritaire dont les acquis demeurent fragiles et dissimulent une menace qui reste latente et pourrait se révéler d’autant plus alarmante si les facteurs poussant à l’extrémisme violent ne sont pas rapidement atténués.

Un risque relatif pour une société partiellement immunisée

Dans un pays fragilisé par une transition démocratique inachevée et la faiblesse de ses performances économiques et sociales, l’extrémisme violent représente un facteur majeur de déstabilisation. Chacun des quatre niveaux de menace susmentionnés posent des risques d’instabilité à la fois sécuritaires, politiques, sociaux, ou encore économiques. Mais ces conséquences doivent être relativisées pour témoigner de dynamiques et de potentiels d’instabilité modérés qui ont permis d’éviter le développement d’un épicentre de croissance de l’extrémisme violent.

Tout d’abord, la diffusion de la violence extrémiste est un phénomène nouveau en Tunisie qui a continuellement été contenu. Jusqu’en 2015, le pays n’avait connu ni de conflit armé dans lequel des belligérants auraient prêté allégeance à une organisation transnationale salafiste djihadiste, ni de violences généralisées, ni de successions d’attentats terroristes majeurs. Malgré leur développement et leur enracinement sous le régime de Ben Ali, les groupes salafistes djihadistes ont alors fait face à un contrôle étroit et une répression systématique de la part des forces de sécurité [16]. Cette répression a permis de prévenir, jusqu’en 2011, l’expansion massive de la menace salafiste djihadiste malgré des manifestations épisodiques de violence (attentat de la Ghriba à Djerba le 11 avril 2002, fusillade de Soliman en janvier 2007). Le vide sécuritaire, la libération des prisons de nombreux militants salafistes djihadistes, ainsi que l’instabilité politique et économique qui ont fait suite à la Révolution de 2010-2011 ont certes ouvert la manifestation épisodique de faits de violences dont les plus saillants ont été l’attaque contre l’ambassade américaine (14 septembre 2012) ou l’assassinat de Chokri Belaïd (6 février 2013). Mais le lien entre ces manifestations de violence et des acteurs portant à la fois une idéologie extrémiste et des modes opératoires organisés et violents n’est pas avéré, ne pouvant donc pas attester d’une menace structurelle. La période s’étendant entre le 18 mars 2015 (attentat du Bardo) et le 7 mars 2016 (assaut de Ben Guerdane) représente la seule phase au cours de laquelle une succession d’attaques terroristes a fait peser une menace d’ampleur et de moyen-terme à la sécurité intérieure et à la cohésion sociale. Mais les mesures d’état d’urgence opérationnalisées par les forces de sécurité avec l’appui de la communauté internationale ont rapidement permis de contenir cette menace. Au regard de l’évolution de ce risque au cours de deux dernières décennies en Tunisie, l’extrémisme violent s’avère ainsi être une menace situationnelle.

A l’inverse de pays qui représentent des foyers de l’extrémisme violent tels que la Syrie, le Nigéria ou encore l’Afghanistan, ce phénomène maintient en Tunisie une dimension ultra minoritaire qui atteste d’un faible ancrage social des principaux groupes salafistes djihadistes transnationaux au sein de la société tunisienne. Sur une population totale de 11.134.588 habitants en 2016 [17], les évaluations les plus élevés font état d’un total de 6000 citoyens tunisiens partis combattre dans les zones de conflit auprès d’organisations salafistes djihadistes [18], de 250 membres de groupuscules organisés dans les zones montagneuses de l’Ouest, ainsi que d’une centaine de cellules dormantes de 2 à 4 individus disséminées sur l’ensemble du territoire [19]. A cet égard, les organisations partisanes porteuses d’une idéologie salafiste, ou tout du moins affiliée à l’Islam politique, ont rejoint le jeu démocratique et multipartite, ainsi que les règles qui s’y affèrent. La principale formation politique islamiste, le parti Ennahdha, rassemble, en moyenne, à chaque élection 30% de l’électorat. Cette portion de la population adhère et défend ainsi une vision de la démocratie qui est compatible avec l’Islam. Dans cette perspective, le parti Ennahdha constitue un obstacle à la radicalisation d’une portion de la société tunisienne en tant que vecteur de socialisation aux valeurs démocratique auxquelles il a adhéré en acceptant de participer aux règles institutionnelles de régulation du politique. Malgré des accusations à son encontre pour des connivences avec la violence salafiste djihadiste au niveau local ou bien dans le transit de Tunisiens vers des zones de conflit, Ennahdha fait davantage figure de rempart au fondamentalisme religieux violent bien que le parti ait suscité un rejet d’une portion de sa base qui le jugeait, à travers son dirigeant Rached Ghannouchi, trop modéré dans l’application des règles islamiques [20]. L’aspect minoritaire de l’extrémisme violent permet de comparer la Tunisie à d’autres Etats, en Europe notamment (France, Allemagne, Royaume-Uni), qui font face à une menace similairement ultra minoritaire et pour qui les enjeux se rejoignent, à savoir prévenir la radicalisation d’individus susceptibles de rejoindre des groupes extrémistes violents, renforcer la résilience de la société dans sa réaction aux atteintes sécuritaires des actions violentes extrémistes, et développer un cadre juridique idoine pour la réhabilitation des citoyens de retour des zones de conflit où ils ont combattu auprès de groupes extrémistes violents. Bien que minoritaire, la menace de l’extrémisme violent en Tunisie demeure conséquente compte tenu des réactions disproportionnées que chaque événement violent lié à une idéologie radicale est susceptible de provoquer.

Enfin, l’absence d’organisation de masse visant la prise du pouvoir central et à laquelle les ressortissants tunisiens partis combattre dans les zones de conflit susceptibles de rentrer en Tunisie constitue un obstacle majeur pour leur structuration et la continuation de leur combat de retour sur le territoire national [21]. En effet, les groupes paramilitaires des zones montagneuses de l’Ouest n’ont pas les capacités, du fait de leur clandestinité, de fournir à ces individus un appui logistique et militaire nécessaire à toute tentative d’ampleur de déstabilisation de l’Etat central. A cet égard, l’unique organisation nationale qui aurait été susceptible de véhiculer l’engagement de tels individus aurait été le mouvement Hizb ut-Tahrir. Mais ce dernier, en choisissant d’opérer dans la légalité en s’enregistrant officiellement auprès des autorités de régulation en 2012, a renoncé publiquement à tout mode opératoire violent et fait l’objet d’un contrôle étroit par les forces de l’ordre [22]. Dès lors, la menace salafiste djihadiste se révèle être dispersée et manquer de moyens logistiques et militaires pour constituer un réel risque de basculement dans une crise sécuritaire en Tunisie.

Compte tenu des faiblesses de la menace salafiste djihadiste (situationnelle, ultra minoritaire, dispersée) en Tunisie, le pays ne constitue pas un foyer de croissance de l’extrémisme violent comme peuvent l’être d’autres Etats au titre de la Syrie, du Nigéria ou encore de l’Afghanistan. En revanche, les organisations salafistes djihadistes transnationales, parmi lesquelles Al Qaeda et l’Etat Islamique, perçoivent la Tunisie à la fois comme un foyer de recrutement et un espace fragile à partir duquel organiser de possibles offensives contre l’Algérie ou l’Europe, notamment en s’appuyant sur les réseaux de communication et de transport tunisien qui favorisent le transit de contrebande. Dès lors, il convient de développer une approche préventive afin d’améliorer la résilience de la société tunisienne face à ce phénomène, ainsi que pour parer la radicalisation d’individus susceptibles de rejoindre des groupes extrémistes violents.

Notes

1) Meddeb, Hamza. Young People and Smuggling in the Kasserine Region of Tunisia. Tunis: International Alert, 2016.

2) International Crisis Group. Violence jihadiste en Tunisie: l’urgence d’une stratégie nationale. Briefing Moyen-Orient et Afrique du Nord N°50. Tunis/Bruxelles: International Crisis Group, 2016, p5.

3) Ayari, Michaël. Les facteurs favorisant l’extrémisme violent dans la Tunisie des années 2010. Revue analytique, Tunis: Programme des Nations Unies pour le Développement, 2017, p6.

4) Le parti politique Hizb ut-Tahrir, qui compte un millier d’adhérents, réfute tout lien avec les combattants du Mont Chaambi. Ce groupe affirme ne pas vouloir recourir à la violence pour atteindre ses objectifs qui consistent à restaurer le califat, adopter la Charia et permettre l’unité de l’Oumma. Mais ce parti a été interdit d’exercer à plusieurs reprises, et notamment en 2013 où il a été classé comme organisation terroriste par le ministère de l’Intérieur tunisien suite à l’attaque de l’ambassade des Etats-Unis en septembre 2012. Toujours à ce jour interdit, Hizb ut-Tahrir est le seul parti entretenant une accointance ambiguë avec le salafisme djihadiste et qui vise publiquement la prise du pouvoir central malgré un contrôle étroit des forces de l’ordre et un faible niveau d’institutionnalisation.

Michaël Béchir Ayari, Fabio Merone. «Ansar al-charia Tunisie: une institutionnalisation à la croisée des chemins.» Dans Soulèvements et recompositions politiques dans le monde arabe, de Frédéric Vairel Michel Camau, 414-428. Montréal: Les Presses de l’Université de Montréal, 2014.

5) Cette augmentation jusqu’en 2016 reflète l’accroissement de l’activité des forces de l’ordre et non pas le développement de ces cellules. Agence Tunisie Afrique Presse. «« En 2016, 245 cellules terroristes démantelées et 537 personnes devant la justice », annonce le ministre de l’Intérieur.» Huffpost Tunisie, 22 Avril 2017.

6) L’état d’urgence avait été en vigueur entre 2011 et mars 2014 dans un contexte d’instabilité propre à la période de transition démocratique. Il a été rétabli le 24 novembre 2015.

Amnesty International. « Nous ne voulons plus avoir peur ». Tunisie. Violations des Droits Humains sous l’état d’urgence. Tunis: Amnesty International, 2017, 53.

7) Le Royaume-Uni et les pays scandinaves ayant, entre autres, interdit à leurs ressortissants de voyager en Tunisie suite aux attaques terroristes susmentionnées, les opérateurs touristiques ont ainsi dû réorienté leur stratégie auprès d’une clientèle en provenance d’Algérie et de Russie.

Agence France Presse. «Le Foreign Office britannique assouplit ses recommandations pour les voyages en Tunisie.» Huffpost Tunisie, 26 Juillet 2017.

8) Observatoire Tunisien de l’Economie. 2008-2016: Evolution de la création d’emplois dans le secteur du tourisme. 28 Juillet 2017. www.economie-tunisie.org/fr/observatoire/infoeconomics/2008-2016-evolution-de-la-creation-demplois-dans-le-secteur-du-tourisme (accès le Août 6, 2017).

9) Brian Dodwell, Daniel Militon, Don Rassier. The Califate’s Global Workforce: An Inside Look at the Islamic State’s Foreign Fighter Paper Trail. West Point: Combating Terrorism Center, U.S. Military Academy, 2016, 46.

10) The Soufan Group. Foreign Fighters. An Updated Assessment of the Flow of Foreign Fighters into Syria and Iraq. New York: The Soufan Group, 2015, 26.

11) Agence Tunisie Afrique Presse. «« En 2016, 245 cellules terroristes démantelées et 537 personnes devant la justice », annonce le ministre de l’Intérieur.» Huffpost Tunisie, 22 Avril 2017.

12) Ayari, Michaël. Les facteurs favorisant l’extrémisme violent dans la Tunisie des années 2010. Revue analytique, Tunis: Programme des Nations Unies pour le Développement, 2017, p6.

13) 2920 tunisiens combattraient encore au sein de Daesh contre 6000 en 2015.

14) Mejri, Walid. « Terroristes » en Tunisie: que révèlent les dossiers judiciaires? 4 Janvier 2017. inkyfada.com/2017/01/terroristes-tunisie-dossiers-justice/.

15) Segneri, Giordano. Jihadi returnees: A policy challenge. Draft Concept Note, Tunis: PNUD , 2015.

16) International Crisis Group. Tunisie: violences et défi salafiste. Rapport Moyen-Orient/Afrique du Nord N°137. Bruxelles: International Crisis Group, 2013, pp38-39.

Richard Barrett. Beyond the Caliphate : Foreign Fighters and the Threat of Returnees. Washington : The Soufan Center, 2017, 41p.

17) International Crisis Group. La Tunisie des frontières: jihad et contrebande. Rapport Moyen-Orient/Afrique du Nord. Bruxelles: International Crisis Group, 2013, pp. 29-35.

18) Ayari, Michaël. Les facteurs favorisant l’extrémisme violent dans la Tunisie des années 2010. Revue analytique, Tunis: Programme des Nations Unies pour le Développement, 2017, p6.

19) Meddeb, Hamza. Young People and Smuggling in the Kasserine Region of Tunisia. Tunis: International Alert, 2016.

20) Un récent rapport de la Commission tunisienne des analyses financières pointe les mécanismes de blanchiment d’argent pour le financement du terrorisme à travers les secteurs où ils s’opèrent et prolifèrent, et en raison d’une insuffisance des moyens à disposition des autorités pour y faire face.

Lahmar, Mohamed. «Tunisie : le tableau noir du blanchiment d’argent. Des parades lacunaires!» African Manager, 6 Août 2017.

21) International Crisis Group. Islamisme, violence et réformes en Algérie : tourner la page. Rapport Moyen-Orient/Afrique du Nord. Bruxelles: International Crisis Group, 2004, pp. 4-11.

22) International Crisis Group. Tunisie: violences et défi salafiste. Rapport Moyen-Orient/Afrique du Nord N°137. Bruxelles: International Crisis Group, 2013, pp12-14.

23) Ayari, Michaël. Les facteurs favorisant l’extrémisme violent dans la Tunisie des années 2010. Revue analytique, Tunis: Programme des Nations Unies pour le Développement, 2017, p9.

24) Institut National de la Statistique. Tunisie en Chiffres 2016. Tunis: Institut National de la Statistique, 2017.

25) The Soufan Group. Foreign Fighters. An Updated Assessment of the Flow of Foreign Fighters into Syria and Iraq. New York: The Soufan Group, 2015, 26.

26) Agence Tunisie Afrique Presse. «« En 2016, 245 cellules terroristes démantelées et 537 personnes devant la justice », annonce le ministre de l’Intérieur.» Huffpost Tunisie, 22 Avril 2017.

27) International Crisis Group. Tunisie: violences et défi salafiste. Rapport Moyen-Orient/Afrique du Nord N°137. Bruxelles: International Crisis Group, 2013, pp42-44.

28) Ayari, Michaël. Les facteurs favorisant l’extrémisme violent dans la Tunisie des années 2010. Revue analytique, Tunis: Programme des Nations Unies pour le Développement, 2017, p7.

29) Michaël Béchir Ayari, Fabio Merone. «Ansar al-charia Tunisie: une institutionnalisation à la croisée des chemins.» Dans Soulèvements et recompositions politiques dans le monde arabe, de Frédéric Vairel Michel Camau, 414-428.

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